Nine Dead

Un texte signé Brice Allavoine

USA - 2010 - Chris Shadley
Interprètes : Melissa Jon Hart, William Lee Scott, Edrick Browne, Daniel Baldwin, Lawrence Turner

Le film nous raconte l’histoire et le calvaire de deux femmes et sept hommes, kidnappés et retenus en otage par un mystérieux personnage masqué.
L’ultimatum est simple. Ils auront la vie sauve s’ils comprennent pourquoi ils sont réunis en ce lieu, s’ils découvrent leur point commun.
Les héros involontaires croient tout d’abord à une plaisanterie. Puis l’horreur entre en scène quand une première victime, puis une autre, viennent appuyer les dires de leur bourreau et exécuteur. Alors, les langues se délient, les souvenirs reviennent du plus profond de leur mémoire, jusqu’à l’ issue finale.

Chris Sadley signe un film de bonne facture, un huis-clos musclé dans lequel chaque parole revêt toute son importance. Non content de livrer du spectacle au public, le réalisateur joue avec lui comme le tueur ses propres victimes. Passées les dix premières minutes du film, le spectateur se trouve piégé et est contraint d’aller jusqu’au bout du film pour connaître cette vérité si abominablement arrachée.
Il serait aisé de comparer ce film à Saw, mais cela serait une gageure, l’affiche du film est en cela trompeuse. Autant Saw s’évertue à filmer dans la douleur physique, autant Nine Dead nous plonge dans les méandres de la pensée humaine. Saw demeure un jeu sadique, Nine Dead est une sentence.
La réflexion est ici de mise et c’est la condition pour survivre. Mais la réflexion a un prix. Un prix humain, le prix du sang et un prix temporel qui est très marqué, qui s’impose à tous. Chaque scène est ponctuée par la vision obsédante de la pendule incrustée dans le mur, pendule qui sert aussi d’oeil au tueur.
Le générique de début montre au spectateur ce calculateur et ingénieux bourreau mesurer au millimètre près l’emplacement du mobilier et l’installation de cet oeil pervers qui aura une importance déterminante dans le déroulement du film.
En outre, les acteurs endossent une multitude de rôles pour chacun de leur personnage. Le bon père de famille est un violeur à ses heures perdues, le curé essaie de rester fidèle à son serment. Même si cela le torture et que les victimes s’accumulent, il reste campé dans toute sa rigidité ecclésiastique.
Nous trouvons réunie toute une faune hétéroclite. Nous passons successivement du malfrat à l’homme de justice, du pédophile homosexuel au curé, du policier à l’agent d’ assurance.
Le tueur tisse sa toile et le spectateur peut réunir les pièces du puzzle au fur et à mesure que les propos s’éclaircissent et que les souvenirs se matérialisent en citant un nom, un lieu. Mais quand le bout du tunnel est proche, le scénario virevolte sur lui-même et anéantit tous les efforts des reclus.
Le spectacle est digne d’ une représentation théâtrale, l’unité de lieu est respectée, ainsi que l’ unité de temps.
C’est à travers les flashbacks et les scènes extérieures, souvenirs des victimes, que nous est donné un aperçu de leur vie antérieure au kidnapping.
Ces scènes sont filmées de façons brèves et rapides, tout comme l’ensemble du film d’ailleurs. Le style est nerveux comme le temps qui s’écoule, comme les pensées et les faits des prisonniers. Et puis au fil du temps, les actions vénéneuses reviennent à la surface, de façons saccadées et agressives, comme un torrent de paroles. La peur est palpable du début à la fin.
Et la chronologie des meurtres suit un rituel précis. Les paroles cessent soudainement, la caméra regarde attentivement les dernières secondes qui s’écoulent puis fixe la porte dont l’ouverture est précédée par le grincement de la roue qui l’actionne.
L’ordre des exécutions répond à une logique implacable, uniquement connue de l’exécuteur.
En fait, les personnages les plus endurcis arrivent à un moment donné de leur réflexion à changer de visage, à se repentir. Le temps de quelques secondes, le mafieux lui-même reconnaît la bêtise de sa vie et parvient à éprouver de la compassion pour ses victimes.
Les rôles, faits sur mesure, sont campés par des acteurs qui sont su donner de l’envergure à leur personnage respectif. Ces derniers, au rythme des situations, sont à la fois bourreaux et victimes. Melissa Joan Hart joue ici à contre-emploi. En effet, l’actrice est célèbre pour interpréter le rôle de Sabrina dans la série Sabrina l’Apprentie Sorcière et son alter égo William Lee Scott, dans le rôle du policier, s’est auparavant distingué dans les films Pearl Harbor et L’Effet Papillon.

Le film Nine Dead restera longtemps dans la mémoire des spectateurs avides de thrillers et de films d’horreur car c’est là un étonnant hybride des deux genres que nous propose Chris Shadley. Le mensonge est roi tout au long de ce film. La vérité émerge lentement au début puis éclate et éclabousse morts et vivants. Le film est sans doute un peu trop moralisateur mais nous démontre qu’une action anodine peut avoir des répercussions désastreuses sur le vie d’un homme, à cet égard c’est une réussite.


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- Article rédigé par : Brice Allavoine

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