Niourk

Un texte signé Yannick Vanesse

France - 1957 - Wul Stefan

La Terre, quasiment asséchée, voit un groupe de sauvages errer dans un des rares endroits à peu près sûr de la planète. Les chasseurs se nourrissent des chiens sauvages errant dans la région, et, régulièrement, le Vieux, sage du village, se rend chez les dieux, qui résident dans une ancienne ville humaine. Si ses congénères pensent qu’il va y chercher conseil, il s’y saoule au rhum. Dans cette tribu est née un enfant noir, haï de tous. Mais, alors que le Vieux meurt, un incendie de forêt oblige la tribu à se rendre dans la région des monstres. L’Enfant noir, de son côté, après avoir vu le vrai visage des dieux et pris la place du Vieux, va essayer de se rendre à Niourk, ville qui lui fournira la réponse à ses questions

Derrière le nom de Stefan Wul se dissimule Pierre Pairault, auteur français de science-fiction, considéré comme culte. En 1957, la même année qu’OMS EN SERIE, il écrit ce NIOURK, réédité aujourd’hui par le passionnant éditeur French pulp, qui donne une deuxième jeunesse au patrimoine littéraire bis français, en numérique. Si les ouvrages qu’il édite sont passionnants, relevant du sans faute tant ils s’avèrent excellent et marquants, il est dommage que French pulp se repose sur l’édition précédente (chez Fleuve Noir pour la plupart) et n’offre pas aux œuvres une véritable relecture professionnelle. En résulte la plupart du temps des coquilles, NIOURK atteignant hélas des sommets en la matière. Mots incorrects mais aux sonorités proches du mot juste, lettres qui manquent ou en trop, problèmes de ponctuations, mots coupés en deux par un espace, ou encore symbole de dialogue manquant sont donc le lot de ce livre, qui aurait été, sans cela, quasiment parfait. Cependant, fidèle à son habitude, French pulp propose, en fin d’ouvrage, une petite annexe sur l’auteur, et sur l’année où le livre a été écrit, ce qui permet de le positionner dans son époque.

NIOURK a donc été écrit la même année qu’OMS EN SERIE, et cela se sent avec l’apparition de thématiques similaires. En effet, dans les deux livres, les humains, après une catastrophe qui a détruit leur habitat, ont régressé (ici, ils sont devenus des sauvages). Un homme va cependant se découvrir la capacité de percevoir au-delà de l’intelligence de sa race, et va comprendre ce qu’il est advenu, tout en créant une sorte de révolution.
Dans NIOURK, l’auteur nous dépeint donc une Terre après un cataclysme de radioactivité, et mélange des termes propres à l’intelligence des sauvages, avec des explications (rapides et simples) qu’ils ne comprennent pas, mais adressées au lecteur. Le mélange crée une dichotomie déstabilisante mais qui possède un certain charme, et nous suivons avec plaisir cet Enfant noir, alors qu’il redécouvre son monde avec de nouveaux yeux, qu’il l’arpente jusqu’à atteindre Niourk (ancienne ville de New-York).
Le livre est court, et se concentre ainsi sur l’action. Le récit est dynamique, bien que manquant parfois d’un petit souffle épique, mais le lecteur, surpris et admiratif, découvre les fameux monstres, puis la ville de Niourk datant d’un futur lointain par rapport à notre époque, devenue automatisée. Il y rencontre aussi deux hommes ayant fui la Terre, ce qui permet de développer deux sociétés parallèles issues de la même catastrophe.
Dans les non-dits, NIOURK se fait complexe, et livre un récit qui va au-delà de ce qui est raconté, dévoilant une crainte toute légitime en l’avenir, ainsi qu’une manière de la vaincre, en utilisant, pour ce faire, les armes de la destruction (la radioactivité). L’Enfant noir est un personnage d’abord insupportable car trop imbu de lui-même, mais diablement crédible, produit de son époque et de sa culture, qui devient plus sympathique quand il accepte sa grande intelligence et s’en sert pour sauver son univers.
NIOURK est un livre qu’il est difficile de lâcher quand on l’a commencé, et qui se dévore ainsi jusqu’à son épilogue, qui bascule dans une ambiance complètement autre, plongeant le récit dans de la science-fiction plus complexe, avec de longues explications, mais offrant une fin passionnante, surprenante et des plus réussies.
Sans surprise, NIOURK est encore un excellent choix de la part de French pulp. Ne reste plus qu’à espérer que l’éditeur fera plus attention, avant de publier ses ouvrages, à les relire, pour proposer le meilleur produit possible à ses lecteurs.


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- Article rédigé par : Yannick Vanesse

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