Noroi

Un texte signé André Quintaine

Japon - 2005 - Kôji Shiraish
Titres alternatifs : The Curse
Interprètes : Masafumi Kobayashi, Marika Matsumoto, Maria Takagi

Depuis RING, le cinéma asiatique livre inlassablement sur le marché mondial ses produits horrifiques. Ce filon qui perdure depuis plus de dix ans n’est toujours pas épuisé. Si une bonne partie du public s’est lassée, il y a toujours suffisamment de gogos pour se laisser persuader par des stratégies marketing diablement efficaces, promulguées par des chaînes de télévision « jeunes et sexy », des magazines spécialisés et autres festivals. Pourtant, force est de constater que cela fait déjà plusieurs années que le cinéma asiatique ne produit plus que des sous-produits américanisés. Néanmoins, dans ce marasme, une poignée de films surnage et, ô bonheur, NOROI en fait partie. En même temps, est-ce vraiment une surprise ? Kôji Shiraishi, est un réalisateur qui semble vouloir s’engager dans le genre. Il s’est déjà fait remarquer en signant JU-REI, mais surtout DEAD GIRL WALKING, un moyen métrage qui n’était pas loin d’égaler le fameux MERMAID LIVE INSIDE THE MANHOLE.
NOROI n’a pas besoin de cacher ses influences, elles sont évidentes. NOROI, c’est la rencontre de RING avec BLAIRWITCH. Le film se compose d’images tournées par un journaliste spécialiste en phénomènes surnaturels. Dès le début du film, on nous explique que la maison de Masafumi Kobayashi a brûlé. A l’intérieur, on a retrouvé le cadavre de sa femme mais nulle trace du journaliste qui a disparu depuis ce drame. C’est à travers les images recueillies par la police que nous allons découvrir l’enquête menée par Masafumi Kobayashi.
Tourné en vidéo, NOROI rappelle BLAIRWITCH mais se déroule dans des décors plus modernes, en ville. Masafumi Kobayashi interroge une jeune femme qui entend des cris de bébé provenir de la maison voisine alors qu’il n’y a pas d’enfant en bas âge dans le quartier… Puis, c’est au tour d’une jeune femme d’être au centre de l’enquête. Dans une vidéo, on la voit entourée de fantômes… Surgit alors un médium excentrique, entièrement recouvert de papier aluminium censé le protéger des monstres serpents qui « volent » autour de lui.
Désormais accompagné de ces deux médiums, Masafumi Kobayashi suit une piste qui l’emmène dans un village dont les habitants pratiquent la magie noire et invoquent un démon. A ce moment-là, les gimmicks et coutumes perpétrés par ces étranges individus ne seront pas sans rappeler l’univers de Lovecraft.
Dans la première partie, NOROI emprunte un ton proche du second degré comme pour mieux se protéger des remarques désobligeantes que sa ressemblance avec BLAIRWITCH suscitera forcément. Les trois héros du métrage sont on ne peut plus étranges et détonnent dans ce genre de production. Masafumi Kobayashi paraît rapidement trop crédule. Il « gobe » trop facilement les premiers indices. Le médium excentrique qui vit protégé par du papier aluminium est encore plus étonnant. Son entrée dans le film a même pour conséquence de faire perdre à cet instant toute crédibilité au métrage, d’autant plus qu’elle a lieu lors d’une émission de télé réalité. C’est dans ce même contexte qu’apparaît Marika Matsumoto, l’autre médium héroïne de NOROI. Au bout d’une demi-heure, on se dit que NOROI est mal parti en ce qui concerne sa crédibilité et le spectateur en quête d’un film d’épouvante sérieux se retrouve bien malgré lui dans le rôle d’une Scully nippone.
Astucieux, la suite du métrage va mettre en doute nos premières impressions.
Au fil et à mesure que le mystère se dévoile, on se dit que cette histoire n’est finalement peut-être pas aussi sotte qu’elle en a l’air. Lentement, le ton change et devient de plus en plus dramatique. Lorsque le climax arrive, plus personne ne fait le malin dans la salle.
Tel RING avec sa Sadako s’extirpant de la télévision, tel le fantôme de SHUTTER juché sur les épaules de celui qu’il tourmente, NOROI termine sa progression scénaristique sur une image terrible qui devrait marquer les esprits pour un bon moment.
Au final, on est agréablement surpris de constater que, comme un gamin, on s’est laissé prendre au jeu. Les 3 improbables héros de NOROI, ce village inquiétant qui vit au rythme de la sorcellerie et cette enquête dont le suspense est admirablement entretenu jusqu’au final, font de NOROI l’événement horrifique nippon de l’année… A ne pas regarder seul !


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- Article rédigé par : André Quintaine

- Ses films préférés : Frayeurs, Les Griffes de la Nuit, Made in Britain, Massacre à la Tronçonneuse, Freaks

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