Nuit Blanche

Un texte signé Yannik Vanesse

France - 2011 - Frédéric Jardin
Interprètes : Tomer Sisley, Serge Riaboukine, Julien Boisselier, Joey Starr

Un policier pourri braque de dangereux trafiquants de manière terriblement musclée, en pleine rue. Hélas, il est démasqué, et le chef des bandits enlève le fils de Vincent, le policier borderline en question. Ce dernier va, toute la nuit durant, essayer de récupérer son fils, dissimulé dans la boîte de nuit appartenant au truand, sans perdre la vie.

Voici le quatrième film de Frédéric Jardin, dont il est aussi le scénariste. Après trois comédies avec Edouard Baer, il s’attaque à présent au polar, un genre qui a le vent en poupe en France en ce moment. Pour son film, il s’entoure d’un casting solide, puisque le héros, Vincent, est incarné par Tom Sisley, aussi charismatique que physique, comme il a pu le prouver dans les LARGO WINCH. Il met face à lui Serge Riaboukine, totalement excellent en truand calme et froid, à la présence écrasante. Il incarne un homme très dangereux, qui s’énerve rarement et qui a droit à de nombreux dialogues très savoureux. D’autres seconds rôles se croisent dans ce film, comme Julien Boisselier, très bon en flic Némésis du héros. Il est aussi doué pour les scènes de bagarre (et nous offre, en compagnie de Tom Sisley, une des séquences les plus intenses du film) que pour jouer les infâmes salopards. Joey Starr, gangster lui-aussi, est un cas un peu plus problématique. Il a sans doute dans l’idée, avec ce film, d’imiter ses collègues rapeurs américains. Ces derniers sont en effet nombreux à aller jouer les gangsta dans des films hollywoodiens. Il n’est certes pas mauvais, brillant même dans quelques scènes grâce à de bons dialogues, mais joue souvent de manière bancale. Son image est peut-être moins forte qu’un Ice-T ou Ice Cube, à moins qu’il ne manque seulement de pratique, mais il est souvent difficile de le prendre au sérieux, hélas.

Il existe deux manières de débuter un film. Soit le réalisateur présente calmement les personnages en une introduction paisible, soit il projette le spectateur directement dans la violence. Frédéric Jardin opte pour la deuxième solution et nous assène une formidable scène d’action qui nous percute comme un train en pleine vitesse. Le braquage qui débute le film est génial, une excellente course poursuite en voiture très intense, suivi d’une fusillade sauvage et sanglante. D’ailleurs, tout au long du film, il essaiera de ne pas faire baisser la tension. Les personnages sont présentés le temps de quelques lignes de dialogues, histoire de comprendre les enjeux, puis le héros apprend l’enlèvement de son fils. Cependant, ces dialogues ne sont pas bâclés ou vite expédiés, non, le réalisateur va juste à l’essentiel, pour se concentrer sur ce qui compte : l’intensité. Et il ne s’en sort pas trop mal ! Certes, NUIT BLANCHE ne parvient pas à éviter les scènes de remplissage, que ce soit des courses dans les couloirs de la boîte de nuit, ou des scènes de danse, de gens qui boivent ou autre, mais dans l’ensemble, le spectateur est plongé dans l’action, ce qui n’est pas si facile, avec un huis-clos pareil.
En effet, l’action se déroule pour la plupart du temps dans une immense discothèque de luxe (avec restaurant, salon privé et diverses commodités à l’attention des clients) et, avec son décor impressionnant peuplé de nombreux figurants, il démontre que le budget de ce film est tout de même conséquent (provenant de fonds français, luxembourgeois et belges).
Le scénario de ce film est, il faut l’admettre, des plus classiques et prévisibles, nanti de quelques twists un peu trop politiquement corrects. Car, si le classicisme de l’histoire n’est pas gênant (ce genre de métrage opte plus souvent pour l’efficacité que pour l’originalité), en évitant de faire un métrage trop badass et, lors d’un twist inutile, en ramenant le film sur des rails beaucoup plus propres que ceux empruntés au début, Frédéric Jardin fait un choix malheureux. Les spectateurs aiment les polars badass peuplés d’anti-héros. John Carpenter tout comme Olivier Marchal l’ont bien souvent prouvé (ce dernier très récemment avec LES LYONNAIS). De même, Frédéric Jardin est un bon réalisateur. Ses scènes d’action sont claires, lisibles, énervées, au découpage parfait. Les moments plus calmes sont filmés posément. Mais le réalisateur, là aussi, se prend les pieds dans le tapis lors d’un plan certes très bien filmé, mais à la complexité inutile, esbroufe déplaisante dont le spectateur se serait bien passé. La caméra passe ainsi dans un trou du faux plafond des toilettes, pour se déplacer dans ce faux plafond, jusqu’à ressortir par un autre trou. Cette séquence est sans doute un hommage à David Fincher, mais ce dernier n’a jamais agit de la sorte inutilement, allant même jusqu’à filmer son ZODIAQUE de manière très épurée. Il s’agit cependant d’un détail, une courte séquence un peu présomptueuse, qui ne gâche nullement le film. De même que l’aspect caricatural des personnages et de leurs relations ne nuisent pas au métrage.
Au final, NUIT BLANCHE, malgré ses imperfections, une fin un peu stupide et certaines scènes ratées (faire perdre le contrôle d’eux-même aux mafieux lors d’une séquence de bagarre brouillonne n’était pas des plus judicieux) est un très bon polar. Il offre d’excellentes scènes d’action, et se révèle dans l’ensemble des plus prenants, et comblera tout amateur du genre.


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- Article rédigé par : Yannik Vanesse

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