retrospective

Nuits de cauchemar

Vincent Smith, alias Fermier Vincent (Rory Calhoun) et Nina (Nancy Parsons), sa plantureuse sœur, sont deux bouchers charcutiers dont la renommée des produits n’est plus à faire. Ils sont de surcroit propriétaires d’un motel, le Motel Hello, attenant à leur entreprise. Le fait est que le succès de leurs produits tient en grande partie à l’utilisation de chair humaine qu’ils se procurent en enlevant des touristes, pour ensuite les « cultiver » et les engraisser comme des légumes humains dans leur « petit jardin secret ». Un soir, parti en quête de matière première, Vincent recueille Terry (Nina Axelrod), une jeune femme dont il vient de kidnapper le compagnon, et l’installe encore inconsciente dans sa ferme…

Pour bon nombre d’amateurs de petites productions horrifiques déviantes, NUITS DE CAUCHEMAR a longtemps trimballé une aura de film culte. Il en va probablement de même pour certains de ceux qui ne l’auraient pas revu depuis sa sortie. Il est sûr que nous sommes à peu près tous enclins à fantasmer sur les métrages auxquels nous n’avons pu avoir accès, du simple fait de la réputation qui les précède.

Dans le domaine de l’étude ethnologique du redneck viandard il y a certes eu des précédents fort estimables de la part de Tobe Hooper ou de Wes craven. La recette de la comédie horrifique mêlant humour noir et gore a depuis été reprise à maintes occasions (par Stuart Gordon, Brian Yuzna ou Peter Jackson, pour ne citer qu’eux…). Il est donc envisageable qu’en revoyant ou simplement en découvrant NUITS DE CAUCHEMAR, du fait d’inévitables comparaisons, on puisse penser se trouver face à une œuvre bien timorée, en tout cas relativement avare en outrances scénaristiques et visuelles.

Rétrospectivement, la réalisation, les situations, les dialogues et jusqu’à l’esthétique globale du film manquent d’un brin de folie et d’un soupçon supplémentaire de férocité qui sied tant au genre, quand bien même on sait très bien que la surenchère n’est pas forcément un gage de réussite.

Il y a dans ce MOTEL HELL une juxtaposition de petits tableaux, de scènes censées de la part du réalisateur Anglais Kevin Connor mettre en lumière les tares de l’Amérique profonde afin de (se) nous divertir, ainsi que celle dont est affublée la famille Smith ; mais l’ensemble se révèle au final assez décousu et manque cruellement de croustillant.

Alors certes, le script aborde le cannibalisme, la corruption des prédicateurs Américains et ose effleurer le thème de l’échangisme (avec un humour qui se révèle plus lourdingue que corrosif) en tant que symbole des turpitudes citadines. Il y a bien entendu le très attendu cliché concernant le marasme intellectuel des forces de police locales. Il aurait sans doute été plus intéressant de développer les rapports entre Vincent et Ida, histoire de les corser un tant soit peu. Vincent étant dépeint par touches discrètes comme un vieux puceau et allié à la truculence naturelle de Ida, cela aurait peut être pu donner lieu à des scènes assez croquignoles. Néanmoins, la romance qui petit à petit va lier Vincent à Terry est là pour le révéler en tant qu’indécrottable bouseux pudibond. La seule bonne surprise réside en fait dans le cérémonial barré qui préside à la mise en culture du bétail humain et l’idée qui anime le frère et la sœur de participer à une grande œuvre, quoique cela aurait mérité d’être un peu plus fouillé (les deux acteurs principaux ayant le potentiel et le talent de porter la chose assez loin).

Pour ce qui est de l’aspect horrifique et gore du film, malgré quelques rares fulgurances, on demeure également dans la tiédeur. Tout fonctionne en fait en permanence comme si le réalisateur et la production s’interdisaient certains débordements afin de rester dans l’acceptable, en termes commerciaux probablement. Ce n’est pas l’aspect outrancier de la dernière scène, au demeurant tournée de manière assez mollassonne malgré les bonnes idées qu’elle recèle (comme des références aux films de zombis), qui vient changer la donne.

Malgré tout cela, NUITS DE CAUCHEMAR se laisse visionner sans déplaisir, ne serait-ce que pour étoffer ses références dans le genre, tant il est représentatif du charme vintage des productions 80’s. Le fait qu’il ne constitue qu’une demi réussite n’est alors qu’accessoire.

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