DossierL'étrange Festival 2014review

Open Windows

Programmé dans la compétition long-métrage de L’Étrange Festival 2014, OPEN WINDOWS est le dernier film de Nacho Vigalondo.
Nick gagne un dîner avec son actrice favorite, Jill Goddard, suite à un concours sur internet. Le rendez-vous est finalement annulé, mais en guise de compensation le manager de la diva propose à Nick de surveiller celle-ci via son ordinateur.
Après le brillant TIMECRIMES et l’étonnant EXTRATERRESTRE, Nacho Vigalondo se présentait déjà comme l’un des nouveaux réalisateurs espagnols à suivre. OPEN WINDOWS confirme l’inscription de ce réalisateur parmi les talents du pays.
Pour commencer, c’est un superbe casting que réunit Nacho Vigalondo pour cette nouvelle réalisation. Dans le premier rôle, Elijah Wood, l’éternel Hobbit, qui fait depuis ces derniers temps des sauts répétés dans l’univers du genre avec entre autres CRIMES A OXFORD, MANIACS et GRAND PIANO. C’est l’acteur anglais Neil Maskell, connu pour son interprétation de Jay dans KILL LIST de Ben Wheatley, qui endosse le rôle de l’antagoniste. Enfin c’est la sublime Sasha Grey qui incarne la troisième tête de ce casting. Elle est principalement connue pour sa carrière pornographique à laquelle elle a mis fin en 2011. “Oui Sasha Grey est une ancienne actrice pornographique, c’est fini, il faut accepter maintenant…”
Le scénario travaille principalement sur l’entremêlement entre visible et invisible. L’intrigue peut se résumer par le désir de l’antagoniste de faire des photos dénudées de Jill Goddard, incarnée par Sasha Grey, un choix d’actrice qui n’est pas anodin. L’enjeu scénaristique du film quitte donc parfois la diégèse avec humour.
En ces temps de piratage, où certaines actrices comme Jennifer Lawrence se retrouvent sur la toile dans des positions peu avantageuses ou très avantageuses, le lecteur décidera, le scénario prend une résonance tout à fait savoureuse. OPEN WINDOWS vise très juste et crée un thriller autour de ces questions d’accessibilité, de vie privée sur les réseaux sociaux, mais aussi de mise en scène du quotidien par l’image. Mettant en scène les nouvelles technologies de l’information comme des outils de manipulation, Nacho Vigalondo arrive à construire un film pertinent et entraînant.
Ne soyons pas avare de compliments, le film est une réussite. Intelligent, jamais prétentieux, le scénario en forme de poupées russes, arrive à captiver un spectateur embarqué dans une succession de retournements de situation. La narration en pli se développe avec la révélation d’informations cachées, donnant l’impression que quelque chose est toujours dissimulé.
Dans la forme, le réalisateur espagnol opte pour une « sorte » de found-footage, dont la particularité est d’établir un plan-séquence à l’intérieur de la diégèse du film. En effet, l’ensemble du métrage se passe sur le bureau d’un écran d’ordinateur. Les fenêtres apparaissent sur le poste et donnent accès à de nouveaux espaces visuels ou techniques par le biais de vidéos et programmes. Nacho Vigalondo troque alors les coupes traditionnelles du montage pour un système de zoom sur le bureau virtuel. Le spectateur est ainsi extrait d’une séquence pour en suivre une autre sans la moindre coupure. Une proposition technique et esthétique particulièrement réussie qui symbolise probablement le flux continu d’informations de ces technologies, mais aussi notre incapacité à nous en défaire. À l’image de Big Brother, l’écran nous surveille et il est impossible de le couper.
La séquence de course-poursuite est probablement la plus inventive du métrage. Dynamique, elle ne souffre d’aucune lenteur, malgré le dispositif de mise en scène très statique. Natcho Vigalondo mobilise pour cela, différents artifices chers au médium vidéoludique, comme la voix off dominante et indicative, ou un système de flèches balisant le trajet à suivre. Notons ainsi, la voix de l’antagoniste, incarné par Neil Maskell, qui est d’une froideur et d’un sarcasme à toutes épreuves. Elle rappelle alors parfois celle du jeu THE STANLEY PARABLE.
Enfin pour extraire le spectateur du réceptacle de la voiture, le réalisateur espagnol utilise un système de caméras miniatures intitulées « ping-pong ». Ces petites caméras sphériques, apparaissent tout au long du film, et s’insèrent partout afin d’offrir à notre personnage principal voyeur et aux spectateurs des angles de vues extérieurs et éloignés. Elles filment ainsi la belle Sasha Gray comme une peinture cubiste, reproduisant sur une surface plane de multiples prises de vues d’un espace tridimensionnelle. Une idée superbe qui s’intègre très bien au propos du film et une réussite visuelle.
Si le dernier tiers est malheureusement moins intéressant que le reste du film, OPEN WINDOWS brille par son inventivité et sa maîtrise. Encore un excellent film pour le réalisateur Espagnol qui nous l’espérons poursuivra dans cette lancée.

Retrouvez nos chroniques de l’Etrange Festival 2014

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