Play Motel

Un texte signé Frédéric Pizzoferrato

Italie - 1979 - Mario Gariazzo
Interprètes : Ray Lovelock, Anna Maria Rizzoli, Marina Hedman, Anthony Steffen

Dès le générique, PLAY MOTEL annonce la couleur, à savoir celle d’un film érotique (pour ne pas dire pornographique) camouflé en giallo. La chanson choisie pour illustrer les premiers ébats, une infâme soupe pop à la ringardise additive (« play motel ») berce une courte séquence « chaude » fort mal filmée et reviendra à intervalles réguliers afin de s’incruster dans le cerveau du spectateur. Donc, lors de cette scène de sexe située dans une maison de passe nommée le Play Motel, un homme déguisé en Diable d’opérette se paie du bon temps en compagnie d’une prostituée habillée en nonette. Notre libertin satanique, en réalité un riche homme d’affaires nommé Cortesi dans la vie civile, rentre ensuite au bureau détendu et productif. Hélas, il reçoit peu après un paquet de photographies le détaillant en plein remake du « Kamasutra pour les nuls ». La maison de passe qu’il fréquente sert, en effet, de terrain de chasse à un maître chanteur ravi de vendre ses clichés contre une forte somme. Après avoir contacté son avocat, qui lui conseille d’en référer à la police, Cortesi décide finalement de payer le prix, très élevé, demandé par l’arnaqueur sans savoir que son épouse, Luisa, le trompe avec l’homme de loi précité. Pour des raisons connues d’elle seule, Luisa s’empare alors des photos compromettantes et les apporte à la police. L’inspecteur De Santis (Anthony Steffen), mis sur l’affaire, remonte une piste conduisant à une jeune demoiselle posant pour des magasines de charmes, Loredana.

Mario Gariasso, scénariste et réalisateur italien, né en 1930 et décédé en 2002, livra, au cours de sa carrière longue de trente ans, pas moins de dix neuf longs métrages, souvent signés du pseudonyme de Roy Garret. On lui doit, entre autre, un western honorable (LE JOUR DU JUGEMENT), un décalque sexy de L’EXORCISTE intitulé LA POSSEDEE et une addition tardive au sous-genre « cannibale » avec le sympathiquement ringard AMAZONIA L’ESCLAVE BLONDE. En 1979, il livra ce PLAY MOTEL des plus médiocres qui, à l’instar d’autre gialli tardifs comme l’intéressant THE SISTER OF URSULA et le mauvais GIALLO A VENEZIA, sortis à la même époque, joue davantage la carte de l’érotisme que du mystère.

Pratiquement dénué d’intérêt, PLAY MOTEL aligne les scènes de nudité intégrale avec une belle complaisance, multipliant les déshabillages d’apprenties mannequins, orchestré par un photographe libidineux. Une manière commode de rogner sur le temps de projection et d’économiser sur le budget, probablement extrêmement faible, en donnant l’occasion au spectateur de se rincer l’oeil. On note ainsi la pauvreté affligeante des décors réduits à quelques éléments signifiants : un bureau figure un poste de police, un couloir d’hopital,…Le cinéaste cadre d’ailleurs des panneaux éclairants (« morgue », « photographe »,…) afin que le spectateur sache à quoi s’en tenir.

L’intrigue policière, elle, se déroule de manière flegmatique et Mario Gariasso s’y intéresse fort peu, se contentant de l’illustrer de manière routinière en proposant un maximum de séquences osées. Malheureusement, ces dernières s’avèrent d’une rare platitude et complètement réfrigérantes en dépit de brefs et complètement inutiles plans « hardcore » (supprimés de certaines versions) n’arrangent pas les choses, loin de là, tant les acteurs paraissent peu motivés. Dans le rôle principal, nous retrouvons ainsi un Ray Lovelock (LE MASSACRE DES MORTS VIVANTS, MURDEROCK) indifférent aux côtés de la porn star suédoise Marina Hedman (alias Marina Lotar alias Marina Frajese). Enfin, le vétéran du western Anthony Steffen (GARRINGO, LA HORDE DES SALOPARDS,…) incarne l’inspecteur de police cherchant très mollement la vérité en se demandant manifestement ce qu’il est venu faire dans cette galère en perdition, symptomatique des derniers jours du giallo.

La musique, horriblement datée, ne parvient jamais, elle non plus, à conférer le moindre rythme à ce PLAY MOTEL assoupi. En dépit de la présence d’un meurtrier portant des gants de cuir noir, d’une machination, d’une jeune femme s’improvisant détective et d’une complexe affaire de chantage finalement résolue durant les dernières minutes, le film peine à maintenir l’intérêt défaillant du spectateur. Si Mario Gariasso reprend tous les clichés du giallo, il le vide tellement de sa substance que le résultat se révèle simplement navrant. Les quelques crimes, d’une timidité préjudiciable, ne peuvent relever le niveau et sont dénués du moindre suspense. L’identité du coupable, elle, semble à ce point évidente dès les premières minutes que chacun soupçonne le cinéaste de garder un atout dans la manche pour asséner une ultime et fracassante révélation finale. En définitive, ce n’est pas le cas et PLAY MOTEL se termine de manière très prévisible et sans le moindre éclat..

Giallo de dernière zone à l’érotisme accentué mais dénué d’efficacité, PLAY MOTEL sombre dans les abymes de l’exploitation la plus crasse et aboutit, au final, à une oeuvrette minable ne parvenant même pas à se montrer divertissante. Un ratage total.


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- Article rédigé par : Frédéric Pizzoferrato

- Ses films préférés : Edward aux Mains d’Argent, Rocky Horror Picture Show, Le Seigneur des Anneaux, Evil Dead, The Killer


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