Primeval – Les Dents de la Mort

Un texte signé André Quintaine

USA - 2007 - Michael Katleman
Titres alternatifs : Primeval
Interprètes : Dominic Purcell, Brooke Langton, Orlando Jones, Jürgen Prochnow, Gideon Emery

Une équipe de reporters est envoyée en Afrique pour capturer un crocodile de 9 mètres…
PRIMEVAL s’ouvre sur une scène magistrale tant sur le fond que sur la forme. On voit une jeune Américaine entourée de noirs en train de sortir des cadavres d’un charnier. Là, git une bonne dizaine de personnes victimes d’un génocide qu’on a presque envie de qualifier de quelconque tant ils sont légion sur le continent berceau de l’humanité. Soudain, une créature attaque la jeune Américaine et l’entraîne sous les eaux dans le marais qui juxtaposait le charnier. La communauté internationale est évidemment en émoi et la rédaction d’une chaîne de télévision dépêche une poignée de journalistes histoire de ramener un sujet croustillant aux spectateurs.
PRIMEVAL n’y va pas par quatre chemins et s’insurge clairement contre cette hypocrisie qui fait que les pays occidentaux confèrent délibérément et sans aucune honte plus de valeur à la vie d’un blanc qu’à celle d’un noir. Il n’y a d’ailleurs aucun sous-entendu et Michael Katleman ne cherche pas à faire passer le message par la symbolique ou la métaphore. Les protagonistes posent fréquemment les questions qui font mal et manient le cynisme. Ils n’hésitent pas à condamner le fait qu’ils sont là uniquement pour amuser le téléspectateur américain avec un gros croco et pas du tout pour évoquer les injustices, la corruption et la guerre civile qui sévit sur le territoire où prospère Gustave, la grosse bébête.
Néanmoins, le film s’avère parfois ambiguë dans son discours. Le réalisateur s’essaye à quelques traits d’humour plutôt surprenants ; comme lorsque le caméraman rigolo et noir du groupe découvre les bienfaits de l’esclavagisme qui lui a permis de ne pas grandir sur un continent aussi dangereux ! Quoi qu’il en soit, objectivement, les pics contre la civilisation occidentale sont suffisamment nombreux pour laisser transparaître les intentions réelles du réalisateur. Lorsqu’un autochtone vient demander à l’un des héros de l’emmener avec lui aux Etats-Unis car sa vie est en danger, l’Occidental lui explique que ce n’est pas possible et ne trouve rien de mieux à faire que lui proposer un tic tac en guise de compensation.
Notre équipe de reporters va finalement très vite abandonner l’idée de ne traiter que du crocodile géant et va aussi s’attacher à dépeindre la situation sur place. C’est également l’impression générale que dégage le film. Gustave, la bête, fait finalement jeu égal avec Petit Gustave, le bien nommé tyran local. A la recherche de Gustave, nos héros n’auront de cesse de s’extirper des griffes de l’homme politique de la région dont ils détiennent des images compromettantes. Sans être non plus qu’un simple prétexte pour dénoncer l’immobilisme occidental, la présence toute relative du crocodile monstrueux fait de PRIMEVAL plus qu’un film de monstre. Nul doute que ce parti pris courageux a dû en décontenancer plus d’un et peut expliquer en partie l’échec du film au box-office américain.
Michael Katleman est très certainement un amoureux de l’Afrique et il nous livre un véritable livre d’images. Les paysages sont splendides et superbement valorisés par la photographie. Les plans larges sont fréquents et nous offrent des couleurs et paysages qui sont un régal pour les yeux. La caméra s’immisce parmi la population et produit des images féeriques et toujours surprenantes où les gens côtoient des animaux sauvages comme nous des vaches et autres moutons.
Evidemment, au milieu de tout ça, dans un film aussi riche, le pauvre crocodile passe un peu au second plan. Pourtant, il serait injuste de ne pas l’évoquer d’autant plus que, pour une fois, on ne peut vraiment pas se plaindre des effets spéciaux numériques qui s’avèrent très convaincants. Si Gustave se voit décerné peu de temps à l’antenne, il sait en user à bon escient. La scène la plus impressionnante, bien que complètement improbable, est celle où Gustave poursuit dans la brousse notre pauvre caméraman black… Le tout filmé en plan large et au ralenti !
Film de monstre au propos honnête, PRIMEVAL vaut assurément beaucoup plus que ce qu’on a pu en dire.


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- Article rédigé par : André Quintaine

- Ses films préférés : Frayeurs, Les Griffes de la Nuit, Made in Britain, Massacre à la Tronçonneuse, Freaks

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