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Princesse Aurora

Dans un centre commercial, une maman est furieuse contre sa petite fille d’une demi-douzaine d’années. Elle l’emmène dans les toilettes et la « dispute » comme du poisson pourri ! Comme elle ne se calme pas, elle l’entraîne cette fois dans une des cabines pour la frapper violemment. La scène se déroule sous les yeux indifférents d’une dizaine de personnes utilisant les mêmes toilettes. Une femme, néanmoins, va réagir. Après avoir entraîné la fillette hors du lieu d’aisance, elle s’arme d’un pic à glace et massacre littéralement la mère indigne et le spectateur se dit que finalement, elle l’a plutôt bien mérité.
Tout comme SYMPATHY FOR LADY VENGEANCE, qui ne s’interroge nullement sur le bien-fondé de la vengeance, PRINCESSE AURORA ne se pose jamais la question non plus. La quête de cette femme qui a subi la pire expérience que peut connaître une mère est on ne peut plus légitime.
PRINCESSE AURORA pointe du doigt la corruption mais surtout l’indifférence. Comme pour mieux faire prendre conscience son égoïsme au spectateur, le réalisateur choisit de l’attaquer là où ça fait mal, en mettant en scène des enfants, victimes de l’indifférence générale. Le passage à tabac d’une fillette dans les toilettes étincelantes d’un centre commercial forme une image qui se passe de commentaire. De même, le film se termine sur une image identique où une autre fillette se retrouve seule à errer dans les rues d’une grande ville coréenne. Tentant de rentrer chez elle, elle longe des rues aux trottoirs surpeuplés et au trafic automobile intense. Une seule personne se souciera de cet enfant qui traîne seul dans les rues, la mauvaise personne…
La responsabilité reste néanmoins collective. Il y a le criminel, mais il y a aussi une société individualiste qui fuit ses responsabilités. Quant à la loi, PRINCESSE AURORA la dépeint au mieux inefficace, au pire corrompue.
Cette société qui s’incline et qui démontre son incapacité à résoudre les problèmes est symbolisée par l’époux de l’héroïne en quête de vengeance. Il est flic et étudie pour devenir pasteur. Il incarne les deux pôles qui garantissent la stabilité de la société. A son image, ces deux pôles ont visiblement abdiqué et démontré leur incapacité à rétablir une cohésion dans une société en déperdition.
En tout état de cause, la quête de vengeance de cette femme qui a perdu la chair de sa chair est légitime et nul ne peut contester son choix. Cet aspect fascisant que certains critiqueront est néanmoins détourné lors du final, cynique, qui démontre le caractère destructeur que revêt la déperdition de la société.
Tout comme de nombreux films américains contemporains, PRINCESSE AURORA montre un réel désenchantement face à nos institutions. Le film coréen va néanmoins plus loin que des films comme DERAPAGE, par exemple, qui, face à l’inefficacité de la justice, encourage une révolte personnelle et individualiste qui rappelle les fameux films de Charles Bronson. PRINCESSE AURORA, en revanche, démontre que de cet individualisme découle violence et injustice. Un message que le réalisateur transmet parfaitement, malgré quelques passages où il frôle d’un peu trop près le larmoyant.

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