retrospective

Quick-draw Okatsu

Parce que les habitants d’un village ne peuvent pas payer leurs taxes en riz, le seigneur d’une petite province, Shiozaki, effectue une expédition punitive, massacrant une partie des paysans. Quelques survivants, menés par Rui, une jeune épéiste surdouée, viennent chercher refuge au dojo de Makabe, un respectable maître d’armes. Ils sont accueillis par Okatsu, fille adoptive de Makabe, qui leur offre sa protection. Ce geste agace au plus haut point Shiozaki, qui aimerait faire d’Okatsu sa concubine, projet impossible car cette dernière ne l’aime pas, et aussi parce que Makabe ne porte pas le seigneur dans son estime.
Aidé de Samonji, son éminence grise, Shiozaki pense pouvoir parvenir à ses fins en piégeant le fils de Makabe : Rintaro. Ce dernier, délaissant l’art du combat au grand dam de son père, souhaite devenir un paysan et épouser Saki, enceinte de lui. Abusé par le tenancier d’une boîte de jeu, Rintaro perd une grosse somme d’argent qu’il lui est impossible de rembourser. Par amour pour son frère, Okatsu se sacrifie, et accepte de se mettre au service de Shiozaki. Mais ce dernier ne désire qu’une chose : la posséder physiquement. Okatsu refuse ; elle, ainsi que son père adoptif venu à son secours sont faits prisonniers. Alors qu’impuissante, Okatsu est violée par Shiozaki, Makabe est torturé à mort dans une pièce voisine.
Second volet de la série LEGENDS OF THE POISONOUS SEDUCTRESS, trilogie constituée de films indépendants mais ayant comme point commun l’actrice Junko Miyazono, QUICK-DRAW OKATSU se démarque à peine du premier opus. Malgré un autre réalisateur derrière la caméra, et le fait que Junko incarne un personnage différent ; malgré aussi un passage du noir et blanc à la couleur, on reste de plein pied dans une sombre histoire de vengeance impliquant la mort tragique de la famille d’une jeune femme particulièrement habile dans le maniement des armes blanches. Après avoir perdu sa mère et son amant dans FEMALE DEMON OHYAKU, l’héroïne (appelée non plus Ohyaku mais Okatsu) voit cette fois son père et son frère mourir, à cause d’un seigneur cruel, corrompu et prêt à tout pour faire de la jeune femme son esclave sexuelle. Nous sommes toujours dans un Japon féodal (avec néanmoins l’apparition d’armes à feux) où règnent à tour de rôles les alliances et les trahisons, l’ivresse du pouvoir et la concupiscence des hommes, dans un univers où la femme est fortement soumise.
Dans ce deuxième volet, Junko Miyazono retrouve Tomisaburo Wakayama, acteur légendaire immortalisé entre autres par la saga BABY CART. Bien que n’ayant droit cette fois encore qu’à un rôle secondaire, celui d’un chasseur de primes, c’est toujours un grand plaisir que de revoir cette figure emblématique liée au film de sabre. Autre acteur important du chambara : Kô Nishimura, qui incarne Makabe, a participé à un nombre conséquent de films de ce genre, comme YOJIMBO d’Akira Kurosawa, ainsi que dans trois épisodes de ZATOICHI, sans oublier sa présence dans la trilogie HANZO THE RAZOR.
Seule femme forte dans le premier opus, Junko trouve ici une alliée de choix en la personne de Reiko Oshida, qui endosse la panoplie de la jeune Rui, redoutable sabreuse, toujours là au bon moment pour sortir Okatsu des pièges tendus par ses ennemis. Reiko aura deux ans plus tard le rôle principal de DELINQUENT GIRL BOSS : WORTHLESS TO CONFESS, devenant ainsi l’une des égéries du courant de la « Pinky Violence ».
QUICK-DRAW OKATSU est l’œuvre de Nobuo Nakagawa, d’après une histoire écrite par le talentueux Kôji Takada. Nakagawa a commencé sa carrière de réalisateur dès la fin des années 30. Durant les années 50, il s’est fait une réputation de conteur d’histoires de fantômes et de vampires, à travers des films comme VAMPIRE MOTH ou THE LADY VAMPIRE.
Bien que sa mise en scène soit irréprochable, son film ne possède pas la force émotionnelle du premier opus de Yoshihiro Ishikawa. En reprenant bon nombre d’éléments de FEMALE DEMON OHYAKU, le facteur surprise est forcément atténué. Cela n’empêche pas le film de comporter quelques passages anthologiques, dont une scène de supplice que l’on pourra comparer à la guillotine du premier volet. Une torture impliquant deux victimes, là encore, deux personnes qui s’aiment et se voient souffrir mutuellement. On n’oubliera pas non plus la tentative d’avortement de Saki, vendue dans un bordel, ni les scènes de combat, toujours efficaces dans ce genre de productions. Si l’érotisme légèrement amorcé dans FEMALE DEMON OHYAKU est ici complètement absent, on se rattrapera avec les nombreuses scènes de violence que comprend ce second volet, et qui font de QUICK-DRAW OKATSU une réussite à part entière, malgré d’évidentes ressemblances avec son prédécesseur.

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