Rave Di Morte

Un texte signé Patryck Ficini

Italie - 2009 - Gazzola Mario
Titres alternatifs : Future Snuff

” Du sang partout des mouches qui bourdonnent sur le festin nu. Des cris des pleurs des tirs tout tourne maisons déformées lumière aveuglante le vent qui souffle du sable dans les yeux une puanteur qui étourdit.
Des mouches. (…)
Noir total et silence.” (P. 158)

On aime parler ici de romans italiens encore non traduits en France. Pour ceux qui ont la chance de lire cette belle langue, cela peut s’avérer une information précieuse puisqu’on n’en entendrait guère parler ailleurs en France.
Après un excellent VLOODY MARY signé Paolo Di Orazio, après, et bien évidemment, nombre d’oeuvres d’Alda Teodorani, voici le tour du RAVE DI MORTE de Mario Gazzola (éditions Mursia), passionné de musique et peut-être de technologie.
Voilà un fort bon roman de S.F. horrifique qui n’a pas froid aux yeux pour décrire les pires horreurs tout en créant un background très intéressant (univers -le futur proche, très cyberpunk- et personnages).
Le héros est un critique musical qui apprend à ses dépens une terrible vérité à l’écoute d’un album inédit de la chanteuse Yorki Amor, sur fond de corporations surpuissantes prêtes à tout pour défendre leurs intérêts financiers. Arrêté, victime d’une machination, Lester Peels est envoyé en tôle. Détroit, une ville-prison où règnent les gangs et les sectes de cinglés (les Ressuscités Aveugles, hommage à De Ossorio ?). Les choses prennent alors un côté NEW YORK 1997, en nettement plus hard. On pense aussi à la fin infernale de LA VOIE DU LOUP (E. E. Knight, Milady) pour l’ultra-violence de cet univers si différent de celui, doré, toujours connu par notre antihéros qui en sait trop. Certains passages gore/sexe/trash font même songer à SERBIAN FILM, quand même ! (Ce dégénéré qui sodomise un tronc déchiqueté donne des nausées).
Le mariage entre horreur gore et anticipation intelligente fonctionne parfaitement. Certains pourront accuser Gazzola de complaisance dans le sordide. Une accusation facile que l’on fait à tous ceux qui osent aller au-delà du bon goût tout public et politiquement correct. Et pourtant, pour décrire un monde violent, montrer la violence est une force. Pour peindre des dégénérés inhumains à force de haine, il est bon de présenter à un lecteur stupéfait, écoeuré mais fasciné malgré lui, leurs actes malsains.
La postface de Carlo Formenti est des plus intéressantes ; elle montre à merveille les emprunts de l’auteur mais aussi ce qui fait son indéniable spécificité (par exemple tout le thème, d’actualité, du téléchargement illégal des oeuvres et des moyens mis en place pour leur protection).
La fin du roman (court : 160 pages ; pas un mot de trop) nous plonge en pleine 5ème guerre irakienne, seul moyen trouvé par Lester Peels pour échapper à la prison. C’est ce qui s’appelle tomber de charybde en scylla : les dernières pages décrivent un véritable massacre – avec viol d’enfant par une blessure faite à la baïonette… Ames sensibles s’abstenir.
Là encore, rien de gratuit. Qui peut imaginer la guerre, cette chose dégueulasse qui permet l’assouvissement de tous ses bas instincts, comme une promenade de santé ? Qui peut croire à la «guerre propre» que l’on a essayé de nous vendre il y a quelques années ? La guerre n’est pas qu’une affaire de militaires valeureux ( ?), c’est aussi, et malheureusement, «les femmes et les enfants d’abord»…
La guerre est sale, comme le futur décrit par Mario Gazzola. Un futur pas si lointain, un simple écho de notre monde actuel. Comme souvent dans la meilleure science-fiction.
A quand une traduction française ?


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- Article rédigé par : Patryck Ficini

- Ses films préférés : Django, Keoma, Goldfinger, Frayeurs, L’Au-delà

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