Lausanne Underground Film Festival 2010

Rien… que par derrière

C’est désireux de faire mentir l’adage prétendant que lorsqu’on a vu un porno, on les a tous vu, que Christophe Bier a sélectionné RIEN… QUE PAR DERRIÈRE lors de la carte blanche que lui a accordé le LUFF en 2010. Présent sur scène pour justifier ses choix de programmation, le spécialiste du cinéma décalé a expliqué, à une audience toute acquise, l’origine de ce porno très étrange, qui est bien plus intéressante que le film en lui-même.
Au départ, le sieur Bier voulait passer un porno gay mais face aux difficultés rencontrées pour trouver des copies en bon état, il s’est rabattu sur ce film très gay friendly. Son réalisateur est Norbert Terry, un ancien assistant de Jacques Tati, homosexuel militant qui s’était spécialisé dans les films pour les hommes qui aiment les hommes. Afin de doublement rentabiliser ses productions, il tournait régulièrement une version hétéro de certain de ses films en remplaçant l’acteur principal par une actrice. C’est ainsi que sur le tournage des PHALLOPHILES, il débauche la blonde Karine Gambier, actrice récurrente chez Jess Franco, et la place au centre d’un casting majoritairement homosexuel avec les conséquences que cela implique : les pauvres acteurs n’ont que peu de désir pour la pulpeuse héroïne du récit et toute action reste à l’image de cette bande, définitivement molle.
Quittant sa vieille parente vivant en lisière de forêt, la jeune Patricia, qui n’aime que le sexe et l’argent, est victime de l’Homme des Bois, un fou furieux psalmodiant d’ineptes propos sur une mystérieuse « vérité ». Mais elle sera délivrée par un jeune éphèbe qui la conduit dans sa chaumière et ira la venger en violant son agresseur. S’ennuyant, Patricia décide de quitter son sauveur qui lui dit de se méfier car l’âme maléfique du sauvage va se réincarner en quatre morceaux pour la poursuivre. N’y croyant pas plus que le spectateur, Patricia poursuit son chemin dans la forêt, ne cessant de se faire sexuellement attaquer par toutes les personnes qu’elle va croiser, et ne cessant d’être secourue par son fermier, toujours là au bon moment alors qu’ils ne cessent de se dire au revoir…
Bien curieux porno en effet qui ne comporte pas de fellation, ni d’éjaculation et encore moins d’érection d’ailleurs. En fait, il n’y a aucun insert hard dans cette version et le tout ressemble fortement à un film érotique vantant les vertus de la nature, comme ceux produits par les Allemands. RIEN… QUE PAR DERRIÈRE est assez fastidieux à suivre et seuls les dialogues totalement surréalistes provoquent régulièrement une saine réaction zygomatique chez le public, l’empêchant lui aussi de tomber mollement… dans le sommeil.
Bref, le film est une curiosité de festival, gentillette et bucolique, qui ne laissera pas un souvenir impérissable une fois les lumières rallumées, mais qui est suffisamment rare pour se convaincre que c’était une bonne chose de l’avoir vu.

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