Samoa reine de la jungle
Italie - 1967 - Guido Malatesta
Titres alternatifs : Samoa la fille sauvage, Samoa regina della giungla
Interprètes : Roger Browne, Edwige Fenech, Ivy Holzer
Disparu précocement, le réalisateur-scénariste Guido Malatesta n’aura pas, durant sa courte carrière (1958-70), marqué le ciné populaire italien autrement qu’à travers quelques séries B sympathiques mais oubliables. Débutant avec un film de guerre (EL ALAMEIN, 1958), il se tourne ensuite vers le péplum « fantaisiste » (GOLIATH CONTRE LES GEANTS, 1961 ; MACISTE CONTRE LES MONSTRES, 1962) et teinte la fin de sa filmographie d’un érotisme léger (LES NUITS CHAUDES DE POPEE, 1969). Aussi « connu » sous le pseudonyme de James Reed, il a par ailleurs signé deux « films de jungle » avec héroïnes légèrement vêtues : SAMOA… et TARZANA, SEXE SAUVAGE (1969) qui ont lancé la carrière de deux indispensables actrices du « bis » italien : Edwige Fenech et Femi Benussi. Merci Signor Malatesta !
Nous sommes à Singapour où l’intrépide aventurier Clint Kloman se voit confier le commandement d’une périlleuse mission : mettre la main sur un gisement de diamants situé quelque part dans la jungle de Bornéo. Il est accompagné par un géologue et sa séduisante fille ainsi que par plusieurs « mercenaires ». Sur place, le danger est grand puisqu’ils doivent traverser le territoire des fameux Kayaques, une tribu de redoutables « chasseurs de têtes ». Ils feront également la connaissance de la belle Samoa, une indigène métisse européenne ( !) d’une tribu pacifique. Dans son village, le groupe d’aventuriers découvre des diamants par milliers ; c’est entre eux le début des conflits, des trahisons, des meurtres, le tout dans un territoire hostile. Comment va réagir notre héros ? Quel sera le rôle de Samoa, éprise de ce dernier ? Triompheront-ils de l’adversité ? Difficile de répondre tant les enjeux paraissent complexes….
Puisant directement à la source des « serials » américains des années 30-40 (JUNGLE JIM, QUEEN OF THE JUNGLE…), les Italiens n’ont pas été avares en « films de jungle ». Des sous-Tarzan (l’ultra-bis KARZAN, MAITRE DE LA JUNGLE de Demofilo Fidani, 1972) jusqu’aux déclinaisons horrifiques du genre (CANNIBAL HOLOCAUST de Ruggero Deodato, 1981) en passant par le classique film d’aventures pimenté d’érotisme (LA MONTAGNE DU DIEU CANNIBALE de Sergio Martino, 1978), les contrées sauvages auront été une source d’inspiration fertile mais très inégale pour nos amis transalpins. SAMOA, REINE DE LA JUNGLE est un des tout premiers « fleuron » de ce sous-genre qui voit généralement un groupe d’Européens confronté à un environnement et à des situations létales, qui finit par en triompher, souvent de façon gratifiante (en plus d’avoir terrassé l’ennemi, les survivants auront trouvé un trésor et la femme de leur vie pour les plus chanceux !). Le film respecte à la lettre ce canevas très codifié et le scénario très linéaire de Guido Malatesta ne laisse place à aucune surprise de taille : les personnages sont stéréotypés à l’extrême (le héros est propre, sans aucun relief, propice à l’identification ; le méchant du groupe est désigné rapidement : visage patibulaire en gros plan que souligne une musique inquiétante) et les péripéties tout à fait prévisibles. Mais la caractérisation des personnages échappe par instants au manichéisme dans la mesure où même les « bons » ne sont pas exempts de défauts : Clint, le valeureux héros, n’hésite pas à voler les diamants sacrés des indigènes pacifiques et le sympathique géologue reconnaît ouvertement sa lâcheté. Le western italien et son ambiguïté morale a très certainement « contaminé » le film, de façon inconsciente peut-être. En revanche, l’absence de suspense nuit fortement au récit, le spectateur ayant toujours deux ou trois longueurs d’avance sur les protagonistes ; les scènes d’action, moyennement filmées en dépit d’une utilisation convenable du format 2.35 n’ont de ce fait rien de très palpitant. Récurrents, les assauts menés par les Kayaques (les « coupeurs de têtes ») sont assez peu vigoureux et comme ces derniers choisissent d’attaquer un par un et à total découvert, nos sympathiques héros n’ont qu’à rester cachés derrière un rocher pour les descendre patiemment. Filmées dans une forêt de studio, les scènes sont souvent entrecoupées de « stock-shots » vraisemblablement empruntés à un film documentaire sur la jungle de Bornéo ; insérés de manière maladroite, ces plans « réels » (combat de serpents, chutes d’eau, vrais indigènes…) contrastent fortement avec l’ambiance toute artificielle du reste du métrage. Heureusement, SAMOA, REINE DE LA JUNGLE ne se prend pas au sérieux et nous gratifie de la présence d’Edwige Fenech qui, si elle n’a rien d’une « reine de la jungle » avec son bikini et son paréo très « sixties » n’en reste pas moins l’atout principal du film ;l’érotisme discret qui le parsème (indigènes peu vêtues ou prenant leur bain, scène d’amour entre Samoa et Clint…) contribue au final au charme de cette petite bande fauchée et kitsch.
L'auteur : Alexandre Lecouffe