School on Fire

Un texte signé Claire Annovazzi

Hong Kong - 1988 - Ringo Lam
Titres alternatifs : Xue xiao feng yun
Interprètes : Fennie Yuen, Lam Ching-Ying, Damian Lau, Roy Cheung

Dans un lycée de Hong Kong, les triades se sont implantées en recrutant des adolescents pour leurs trafics. L’argent et le pouvoir montant à la tête de certains, l’ambiance est tendue entre les membres des différentes factions. Suite à une dispute sans intérêt, le conflit s’envenime, et lors d’un règlement de compte orchestré par un membre extérieur à l’établissement, un lycéen est tué. Ses camarades sont appelés à témoigner devant la police, mais ce n’est pas si facile de se retourner contre la mafia locale. Une jeune élève, Chu Yuen-Fong, va l’apprendre à ses dépens.

Avec SCHOOL ON FIRE, Ringo Lam concluait ce que l’on a coutume d’appeler sa trilogie commencée l’année précédente avec CITY ON FIRE et PRISON ON FIRE. À travers ces trois films pourtant bien différents, le réalisateur explorait la frontière entre le monde des triades et celui de la police. Frontières parfois mal définies, où l’on ne sait plus très bien qui sont les gentils et qui sont les méchants, où les deux cohabitent tant bien que mal.
Dans SCHOOL ON FIRE, il ajoute un nouveau groupe: les professeurs. Et au milieu de tout ça, des adolescents désoeuvrés, sans espoir, qui ne savent pas de quoi sera fait demain, essayent de trouver leur voie.
Proies rếvées pour les truands, ceux-ci leur offrent la voie de l’argent facile et du pouvoir, tandis que les professeurs, du moins ceux que ça intéresse encore, tentent de leur inculquer de meilleures valeurs. En face, la police ne recherche qu’une paix relative au prix du sacrifice de cette jeunesse paumée.
Il y a toutefois un point commun entre tous ces groupes: ils bafouent les règles – un professeur éteint sa cigarette juste avant d’entrer dans la salle de classe –, oublient les traditions – les nouveaux membres des triades ne souhaitent pas boire le thé avec leurs aînés – et n’ont pas la notion de respect.

Comme on peut le voir, l’univers dépeint dans SCHOOL ON FIRE n’est pas des plus roses. Pour personnifier le mal-être de ces lycéens, Ringo Lam choisit de s’attarder sur le parcours d’une jeune fille, Chu Yuen-Fong – étonnament bien interprétée par Fennie Yuen – qui, de jeune élève attentive et sérieuse, va être obligée, par la force des choses, d’en arriver à se prostituer. Entourée d’une amie au coeur d’or qui a déjà versé dans la prostitution depuis longtemps, d’un jeune gangster éperdument amoureux qui est prêt à tout pour elle, et d’un professeur auparavant dévoué mais qui a démissionné, déçu par ses élèves, elle va pénétrer de plus en plus dans le terrible monde des triades et être confrontée aux pires atrocités.

Car SCHOOL ON FIRE est un film violent. Mais pas cette violence fantasmée, chorégraphiée, qui ressemble à de la danse et à laquelle le cinéma de Hong Kong a donné ses lettres de noblesses. Ici, on assiste à la violence des rues, à des bagarres brutales, sanglantes. Quand les acteurs se tapent dessus, on a mal à leur place. Et ça tache!
Le cinéma de Hong Kong des années 80 avait décidé d’être plus près de la réalité – enfin au moins pour les scènes d’action – et 1988 fut en particulier une grande année: TIGER CAGE, POLICE STORY 2, AS TEARS GO BY, autant de longs métrages bruts et méchants, auquel vient donc s’ajouter SCHOOL ON FIRE.

En dehors de la chronique sombre qu’il nous livre, Ringo Lam a à coeur de nous proposer de grandes leçons de vie, et même des moments de poésie. Poésie urbaine par exemple, quand on peut voir en arrière-plan du lycée, l’aéroport et les avions qui décollent, montrant par là l’envie de liberté de ces jeunes. Leçons de vie quand les souffre-douleurs de la classe finissent par s’acharner sur le petit caïd qui leur en a fait voir de toutes les couleurs: on récolte toujours ce que l’on sème.

S’il ne fallait retenir qu’une scène du film, ce serait quand l’héroïne, désabusée et en pleurs, met le feu à la bibliothèque de l’établissement: jamais les études et le travail scolaire ne permettront, à elle et à ses camarades, d’échapper à leur destin, finir dévorés par les triades et leur violence.
Un film à regarder absolument.


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- Article rédigé par : Claire Annovazzi

- Ses films préférés : Une Balle dans la Tête, Fight Club, La Grande Bouffe, Evil Dead, Mon Voisin Totoro


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