retrospective

Storie de Vita e Malavita

Avec STORIE DI VITA E MALAVITA, Carlo Lizzani nous présente un film de scénettes sur le sujet de la prostitution de jeunes filles. Ainsi, on fait la connaissance de plusieurs filles qui, pour une raison ou une autre, se retrouvent dans le monde de la prostitution. Un monde dans lequel les filles sont vendues d’un mac à un autre et duquel elles n’ont plus aucune chance de sortir.
Les raisons pour lesquelles ces filles se prostituent sont légions. A ce propos, le film brosse plusieurs portraits, celui d’infortunées victimes de circonstances malheureuses, celui des filles qui se prostituent par ennui ou encore qui veulent pouvoir se payer la belle vie. On remarque assez vite la volonté de Carlo Lizzani de nous peindre un portrait réaliste d’une jeunesse victimisée et utilisée.
Malheureusement, STORIE DI VITA E MALAVITA reste l’un de ces exemples où la volonté ne garantie pas forcément le résultat. Côté positif, le réalisateur arrive à dépeindre une variété intéressante de cas de filles tombant dans la prostitution. Mais de l’autre, tous les hommes sont mauvais et sournois. Ce qu’ils ont dans la tête se résume soit à gagner de l’argent avec le malheur des filles, soit à coucher avec elles. Les flics, de connivence avec les maquereaux, sont tout juste bons à renvoyer les filles qui se sont enfuies. Même le docteur qui s’inquiète pour l’une des filles dont il doit vérifier la virginité, s’avère finalement n’être intéressé que par ses honoraires.
Quant aux femmes, elles se désintéressent tout autant que les hommes du sort des filles. Leur recherche du profit est la même. Tout d’abord, il y a la femme qui fait travailler sa jeune cousine clandestinement, ne la paie pas et qui s’enfuit sans elle lorsque son mec se retrouve en prison. Ensuite, il y a celle qui invite à ses fêtes des jeunes filles dans le but de les vendre à la gent masculine de l’assistance. Finalement, n’oublions pas la mère qui fait de l’auto-stop, accompagnée de sa jeune fille, pour offrir cette dernière aux chauffeurs, contre rémunération bien sûr. Bien qu’elle le fasse pour nourrir sa famille, elle contribue à créer un monde où il n’est pas possible de sortir du cercle vicieux.
On peut tout à fait comprendre les intentions de Carlo Lizzani. Néanmoins, son film ne joue pas du tout dans la même cour que par exemple MOI, CHRISTIANE F. (1981), LE film sur l’abus de drogue et la prostitution. D’un côté STORIE DI VITA E MALAVITA veut faire la critique de maux sociaux et de l’autre, il se saborde lui-même. En incluant des scènes pornographiques, on nous invite, au moins partiellement, à regarder le film pour les mêmes raisons que celles qui sont condamnées chez les protagonistes. On peut alors visionner le film avec un léger sentiment désagréable. Même si au début ces scènes n’étaient peut-être pas prévues (et filmées, semble-t-il, par un autre réalisateur), leur inclusion donne à cette œuvre un caractère Jekyll et Hyde. En montrant les filles nues à la moindre occasion, STORIE DI VITA E MALAVITA s’approche trop du film d’exploitation célébré par les SCHULMÄDCHEN REPORT et consorts pour qu’on prenne son message très au sérieux.
Ceci dit, Carlo Lizzani arrive malgré tout à créer un style assez original avec ce film. La mise en scène reste classique mais contrairement à d’autres films-reportages érotiques de l’époque (SCHULMÄDCHEN REPORT encore, entre autres), les différentes scénettes ne sont pas des petites histoires fermées sur elles-mêmes, elles créent une entité. Ainsi, la narration abandonne une fille au milieu de l’histoire pour suivre une autre fille, qui ainsi prend la relève. Au début, cette approche peut laisser perplexe. En effet, plus d’une fois, on se retrouve dans une nouvelle intrigue avant même de le réaliser. De plus, cette approche complique l’identification du spectateur avec les filles. En revanche, et malgré ceci, Carlo Lizzani arrive à donner ainsi l’impression d’une toile d’araignée où les différents fils s’entrelacent, où les macs se connaissent rendant ainsi toute tentative de fuite presque impossible.
Reste finalement encore le peu connu thème d’Ennio Morricone. Mémorable et relativement minimaliste, il crée dès le début une atmosphère assez malsaine et sérieuse, atmosphère que le film ne parvient pas à suivre tout à fait.
STORIE DI VITA E MALAVITA s’avère donc finalement être une œuvre assez intéressante, même si elle n’arrive pas à tenir toutes ses promesses. S’il faut malgré tout en parler, c’est à cause de sa rareté, ainsi que grâce au fait que ce film, par son sujet, reste quand même assez controversé.

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