Tarantula

Un texte signé Eric Escofier

Lorsque Jack Arnold réalise en 1955 TARANTULA, il vient de réaliser en 5 ans 15 films pour Universal dont deux fantastiques : LE METEORE DE LA NUIT en 1953 et le premier volet de L’ETRANGE CREATURE DU LAC NOIR. Il décide alors de porter à l’écran une histoire qu’il a lui-même écrite et l’adapte en collaboration avec Robert Fresco.
Les premières images s’ouvrent sur une nature aride où un homme au visage difforme s’écroule… On apprendra plus tard que ce dernier est l’assistant du Professeur Deemer qui lui a inoculé un mystérieux produit le transformant en un monstre horrible… Notre professeur a inventé un sérum capable de grossir les animaux ! Une tarentule va par accident être libérée et grossir jusqu’à devenir gigantesque !!!
Ici, Jack Arnold nous montre les méfaits d’un sérum nutritif sur l’espèce animale. N’oublions pas que depuis 1954 avec DES MONSTRES ATTAQUENT LA VILLE de Gordon Douglas, les américains sont confrontés à toutes sortes d’animaux devenus effroyablement gigantesques par les méfaits de la science ! On peut conclure que le Professeur Deemer fait partie de la race des savants fous. D’ailleurs, tout comme pour Frankenstein, son monstre se retournera contre lui avant de périr dans les flammes…
L’oeuvre de Jack Arnold est magnifique et dès le générique on peut apprécier la présence de toute l’équipe technique chère au studio Universal. La musique signée par Joseph Gershenson (qui collabora souvent avec Jack Arnold : Le météore de la nuit, l’étrange créature du lac noir, l’homme qui rétrécit) nous offre des sonorités grinçantes lors de l’apparition de l’immonde Tarantula. Alexander Golitzen crée des maquettes qu’il superpose sur un décor naturel, comme par exemple lors de l’attaque du monstre dans la villa du professeur. Bud Westmore, auteur du célèbre maquillage de LA CREATURE DU LAC NOIR se surpasse en faisant des assistants du professeur des êtres atteints d’acromégalie. Notons au passage la séquence où le Professeur Deemer est attaqué dans son laboratoire par un de ces êtres, qui n’est autre que le porteur de masques attitré de la Universal : Eddie Parker (il doubla Boris Karloff, Lon Chaney Junior, Bela Lugosi), non crédité au générique… Les effets spéciaux de Clifford Stine sont magnifiques et employés à amener le spectateur dans une indicible peur : d’abord l’attaque dans un corral de chevaux, où tout nous est montré dans un ordre croissant : la nervosité des bêtes, puis la peur mixée avec les sifflements de la créature jusqu’à son arrivée
Côté casting, Jack Arnold reprend le beau John Agar (vedette du deuxième opus de la Créature). Il a ici 34 ans. Il est alors marié à l’actrice Shirley Temple et fut remarqué dans le FORT APARCHE de John Ford. Il est ici le jeune docteur qui se retrouve mêlé à une aventure fantastique ! Mara Corday est ici la jeune biologiste qui doit travailler avec le professeur Demmer, homme égoïste et détraqué incarné par le grand Leo G. Carroll, âgé ici de 63 ans et vedette des films hitchcockiens. N’oublions pas que pour le petit écran, il fut Alexandre Waverley le chef de Napoleon Solo et Iliya Kuryakine dans « Les Agents Très Spéciaux ». Et pour finir, citons Clint Eastwood dans le rôle du pilote de chasse. Clint Eastwood jouera aussi dans la REVANCHE DE LA CREATURE où il sera un assistant de laboratoire.
Merveilleux chef-d’oeuvre du film à gigantisme animal, Tarantula n’a pas vieilli, c’est de la bonne science-fiction ! Jack Arnold a réalisé des films qui tiennent la route car ils possèdent de la poésie, une pointe d’érotisme, un zeste d’humour et une bonne dose d’horreur ! Voilà tous les ingrédients qui, une fois mixées, vous donnent TARANTULA.