The Killing Machine

Un texte signé Michaël Guarné

Japon - 1975 - Norifumi Suzuki
Titres alternatifs : Shorinji Kenpo
Interprètes : Sonny Chiba, Yutaka Nakajima, Asao Koike, Kei Sato

S’il fallait ne retenir qu’un film avec le fameux acteur du Pays du Soleil Levant, alors peut-être choisirions-nous celui-là. Point fort de ce premier coffret, THE KILLING MACHINE n’accuse à aucun moment son maigre budget ainsi que ses courts quinze jours de tournage. Une œuvre forte, éblouissante, qui s’inspire librement de la vie du religieux bouddhiste Doshin So, fondateur du Shorinji Kenpo, forme d’art martial basée sur l’entraide et la compréhension mutuelle, dont les techniques privilégient des mouvements d’esquive et de défense.
Nous voilà donc plongés dans les derniers instants de la Deuxième Guerre Mondiale. Ayant, entre autres, étudié pendant plusieurs années le kung-fu de Shaolin auprès des bonzes Chinois, Doshin So joue actuellement les espions en Mandchourie pour le compte du gouvernement japonais. Mais l’annonce de la reddition de son pays le contraint à rentrer au bercail. De retour à Osaka, il constate avec amertume que maints gangsters locaux ainsi que les forces Alliées oppriment son peuple, que les terres qui appartenaient à sa famille ont été spoliées, que le marché noir règne plus que jamais sur le sol nippon… Bref, rien ne va plus. Afin notamment de redonner un peu de courage et d’espoir à ses compatriotes, il décide de fonder sa propre école d’arts martiaux qui pose vite problème aux autorités…
Sonny Chiba trouve là un de ses meilleurs rôles. Les nombreux liens existants entre la vie de l’acteur et celle du personnage qu’il incarne y sont d’ailleurs pour quelque chose. Tous deux ont des connaissances poussées en arts martiaux bien entendu, Doshin So ayant créé son style, et Chiba étant à la base un excellent gymnaste devenu ceinture noire 3ème dan de karaté et expert en judo, kendo, jujitsu et kenpo. Tous les deux ont fondé leur école, le premier pour redresser son pays et apprendre aux gens à vivre en harmonie avec eux-mêmes et autrui, le second pour initier les apprentis comédiens et cascadeurs aux arts martiaux (le Japan Action Club, qui vît le jour en 1969).
Le métrage oscille avec justesse entre le drame et l’action pure. Les multiples scènes de combats sont efficaces car très crues. Ainsi, afin de donner une bonne leçon à trois brigands ayant abusé d’une jeune fille, Doshin So arrache à l’aide d’une paire de ciseaux les bijoux de famille de l’un d’entre eux puis les donne à manger à un chien qui passait par-là… Dans le même état d’esprit, deux Américains renversent un gamin japonais à un moment. So les rattrape fissa et leur casse les jambes en retour… Autrement dit, une définition plutôt stricte de la justice en ce qui concerne So qui, il faut bien l’avouer, pérennise la sempiternelle vision du héros combattant pour l’honneur. Les bagarres, relativement brutales donc, sont joliment chorégraphiées. Certes, le niveau n’égale pas ce qui se faisait du côté de HK à cette époque, mais cela reste suffisamment bien fait pour y trouver son plaisir.
Par ailleurs, le contexte historique, le Japon d’après-guerre subissant l’occupation, n’est pas sans rappeler le somptueux LA BARRIERE DE CHAIR de Seijun Suzuki. On ressent bien le dédain des Nippons non seulement envers les forces américaines, mais aussi à l’égard de leurs voisins chinois et coréens. L’ambiance du film est un brin nihiliste, ce qui pourra facilement renvoyer à plusieurs métrages de Fukasaku, mais le tout fait parfois sourire tant la musique est en décalage avec l’image. Des guitares wah-wah et des airs funky : du pur Japon apocalyptique non ?…
En définitive, THE KILLING MACHINE, aussi connu sous le nom de SHAOLIN KARATE, est un petit chef-d’œuvre de son temps qui présente un Sonny Chiba au meilleur de sa forme. Norifumi Suzuki, réalisateur ayant oeuvré dans la Sexploitation (on lui doit LE COUVENT DE LA BETE SACREE sorti en 1974), signe là un film fort dont on ne ressort pas indifférent.


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- Article rédigé par : Michaël Guarné

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