The Lost

Un texte signé Rodolphe Dumas

USA - 2006 - Chris Sivertson
Interprètes : Marc Senter, Shay Astar, Alex Frost, Megan Henning, Robin Sydney

Ray, Tim et Jennifer font la fête dans les bois. Imbibé d’alcool, Ray assassine deux jeunes filles qui campaient non loin de là. Les années passent et les policiers, bien que convaincus de la culpabilité de Ray, n’ont pas réussi à trouver des preuves le reliant aux meurtres des deux campeuses. Tim et Jennifer qui n’ont jamais rien révélé de cette terrible affaire pensent que le pire est maintenant derrière eux mais la personnalité de Ray va refaire surface et l’horreur va les rattraper.

Tiré d’un roman de Jack Ketchum (à qui l’on doit entre autres THE GIRL NEXT DOOR qui a été porté à l’écran par Gregory Wilson), THE LOST est le premier film en solo de Chris Sivertson, après plusieurs co-réalisations, notamment un rigolo ALL CHEERLEADERS DIE qu’il a co-dirigé avec Lucky McKee, réalisateur du formidable MAY et producteur du THE LOST qui nous intéresse aujourd’hui (voilà une boucle de bouclée). Relativement classique dans sa trame et sa construction, THE LOST n’en reste pas moins un sympathique thriller qui se suit sans déplaisir et, surtout, sans le moindre ennui.

La bonne tenue de l’ensemble est surtout due à une sympathique ambiance rétro (l’action se déroule dans les années 60) qui n’est pas sans rappeler CHRISTINE de John Carpenter. Vieilles bagnoles, télé noir et blanc, drive-in, blousons noirs et coupes de cheveux ultra-gominées sont donc au programme afin de planter le décor. Cependant, niveau musiques, Chris Sivertson a aussi su faire des choix déroutants mais au final très intéressants. Si l’ensemble de la bande son est majoritairement composée de rock ‘n’ roll tout à fait en adéquation avec l’époque, Sivertson s’est permis d’inclure des morceaux plus modernes (orientés punk et metal) pour accompagner quelques passages bien précis (une scène de sexe bestiale, une crise d’hystérie, etc…). En plus de provoquer un anachronisme qui chamboule tous les repères du spectateur, ces variations dans les musiques accentuent les changements de tons dans la narration (drame, horreur et humour noir se cotoient tout au long du film) et font ressortir la personnalité trouble de Ray Pie. Car même si il nous est permis de suivre un semblant d’enquête et des histoires plus ou moins secondaires (qui tournent la plupart du temps autour des relations amoureuses et/ou sexuelles entre divers protagonistes), c’est bien sur ce personnage que repose l’ensemble.

Mythomane, égocentrique, narcissique, Ray Pie est aussi un psychopathe de la pire espèce. Ca fait beaucoup pour un seul homme et c’est peut être là une des faiblesses du film… car même si Marc Senter (qui a joué dans I KNOW WHO KILLED ME du même Chris Sivertson ainsi que dans CABIN FEVER 2 et qui a fait quelques apparitions dans diverses séries telles JAG ou NCIS…) semble bien campé dans les bottes de Ray Pie, son interprétation, exempte de toute finesse, ne lui permet pas nécessairement de soutenir cet énorme poids sur ses épaules. Il force (intentionnellement ou non) chacun des traits (déjà relativement grossiers) de son personnage et fait du coup perdre au métrage une partie de sa crédibilité. La scène finale où il entraîne ses dernières victimes dans une maison isolée, sous le regard effrayé des propriétaires, en est un bon exemple. Se voulant dans la lignée des débordements vus (notamment) dans ORANGE MECANIQUE de Stanley Kubrick et HENRY, PORTRAIT OF A SERIAL KILLER de John McNaughton, tant dans l’ambiance que dans le jeu des acteurs, elle n’atteint malheureusement jamais la folie malsaine des intrusions de Alex et ses drougs (Marc Senter n’est pas Malcolm McDowell) ni la violence crue et froide des agissements de Henry (il n’est pas non plus Michael Rooker dont le regard vide faisait froid dans le dos). C’est vraiment dommage d’autant que le reste du casting tient bien la route. Aux côtés de « vieux » habitués des seconds rôles tels Ed Lauter (dont le crâne chauve a brillé dans de nombreux films et séries comme LES RUES DE SAN FRANCISCO, KOJAK, FRENCH CONNECTION II, CUJO, TRUE ROMANCE, LES EXPERTS et bien d’autres…) ou le toujours bonhomme Richard Riehle (vu notamment dans SABRINA, L’APPRENTIE SORCIERE, BUFFY, L’ARME FATALE 4, LAS VEGAS PARANO ou, plus récemment, dans BUTCHER…), on retrouve quelques jeunes têtes comme Alex Frost (dont le rôle le plus marquant reste celui d’Alex dans le génial ELEPHANT de Gus Van Sant), Megan Henning (vue entre autres dans la série SEPT A LA MAISON…) ou encore Robin Sydney (THE GINGERDEAD MAN, NCIS, etc…), avec une mention particulière pour cette dernière qui parvient à être à la fois terriblement sexy, fragile et inquiétante dans le rôle de la nouvelle conquête de Ray Pie. A noter aussi les présences de Misty Mundae (sous le nom de Erin Brown), actrice et réalisatrice habituée des remaniements coquins de grosses productions (comme THE LORD OF THE G-STRINGS : THE FEMALESHIP OF THE STRING, AN EROTIC WEREWOLF IN LONDON…) et de Jack Ketchum lui-même dans un petit rôle.

Dans l’ensemble, THE LOST reste un bon thriller qui a le mérite d’être intéressant sur toute sa durée mais qui se révèle légèrement frustrant car bien moins dérangeant qu’il ne souhaiterait l’être. De plus, sans être une mauvaise adaptation de Ketchum à l’écran, on lui préfèrera toujours dans le domaine le traumatisant THE GIRL NEXT DOOR.


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- Article rédigé par : Rodolphe Dumas

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