The second coming of Eva

Un texte signé Éric Peretti

Suède - 1974 - Mac Ahlberg
Titres alternatifs : Porr i skandalskolan
Interprètes : Rune Hallberg, Teresa Svensson, Jack Frank, Kim Frank, Brigitte Maier, Jim Steffe, Berit Agedahl, Suzy Andersson

Venu de Suède, THE SECOND COMING OF EVA témoigne de cette époque révolue où le porno était affaire de comédie et de bonne humeur. Loin des clichés infamants du genre, le film ne se contente pas d’aligner des plans gynécologiques lors de séquences hard mais bénéficie d’une mise en scène soignée et dynamique qui parvient à érotiser les situations les plus chaudes. Encore plus fort, il n’y a pas un seul plan d’éjaculation et c’est presque à chaque fois un orgasme féminin qui conclue les rapports. Alors qu’importe si la trame du récit est plus que ténue, cette bande scandinave mérite largement le détour.
Bo Goldenrod (ou Gyllenstake en suédois) doit percevoir une importante somme d’argent suite au décès de son oncle qui vivait aux Etats Unis. Mais ce dernier avait rajouté une close dans son testament qui stipule que l’héritier doit fournir la preuve de sa bonne morale, ce qui pose un sérieux problème à Bo, dont les mœurs sont plutôt libres. Il décide alors de transformer sa garçonnière de manoir en un institut de bonne conduite pour jeunes filles délurées. Une dizaine de charmantes donzelles y sont inscrites par leur entourage. Parmi elles, la douce Eva. Surprise, quelques temps plus tôt par sa sœur Elsa, alors qu’elle se caressait dans son sommeil, portée par un rêve que l’on devinait délicieux, elle se retrouve placée contre son gré dans cette école austère, à écouter le discours de bienvenue moralisateur du directeur Goldenrod. Mais les apparences peuvent être trompeuses. Une fois seul avec ses élèves, Bo et ses amis professeurs démarrent une gigantesque orgie pour le plus grand plaisir des jeunes femmes.
L’amour libre se consomme sans retenu dans le château et tout semble aller pour le mieux dans ce cadre idyllique jusqu’à l’arrivée de Roderick Elliot, sévère homme de loi mandaté par la famille éloignée de Bo, qui compte bien démasquer l’imposture que représente cette école de morale et redistribuer l’héritage à des personnes plus saines. Peu aidé par ses pensionnaires et ses amis, trop occupés à batifoler, Bo se rend vite compte qu’il va tout perdre. Les filles décident alors de sortir le grand jeu afin de placer Roderick Elliot dans une situation si compromettante qu’il sera bien obligé de renoncer à sa mission…
En filigrane de cette comédie, nous suivons le parcours sexuel initiatique d’Eva (interprétée par l’intrigante Teresa Svensson, qui n’aura que des scènes simulées, donc sans pénétration, avec son partenaire masculin) qui va, après un intermède lesbien avec la toujours superbe Brigitte Maier, découvrir l’amour et le plaisir dans les bras d’un beau jeune homme.
Hymne à la sexualité, qu’elle soit en couple ou en groupe, le film célèbre une libido libre et débarrassée d’inhibitions. A ce titre, les personnages prudes et moralisateurs que sont Roderick Elliot et Elsa seront tournés en dérision, car différents de la norme en vigueur, jusqu’à ce qu’ils se laissent guider par leurs pulsions et rejoignent la communauté.
Si THE SECOND COMING OF EVA est bourré de qualités formelles indéniables, à savoir une superbe photographie colorée alliée à une mise en scène vivante (particulièrement l’époustouflant travelling circulaire qui accompagne “l’attaque” de Roderick par les filles dans la bibliothèque), il faut toutefois remarquer qu’il souffre d’un léger déséquilibre rythmique. En effet, la première partie, essentiellement composée de la séquence d’orgie dans le château, est trop longue et devient lassante. Alors que la suite, avec l’arrivée de Roderick, est bien plus comique et dynamique. L’alchimie entre pornographie et comédie n’est pas parfaite et il faudra se tourner vers un autre film du réalisateur, JUSTINE ET JULIETTE (1975), pour obtenir un chef d’œuvre du genre. Dissimulé derrière le pseudonyme Bert Torn, Marc Ahlberg signe là un film paillard et jouissif pour sa première incursion dans le hard après plusieurs bandes érotiques. Sa carrière ne se limitera pas à cela, car il émigrera aux Etats-Unis et exercera avec talent en tant que chef opérateur et/ou directeur de la photo sur de nombreux films de Stuart Gordon, dont RE-ANIMATOR, mais également sur d’autres petits classiques tels HOUSE et GHOULIES, ou encore sur des projets plus importants tel LE FLIC DE BEVERLY HILLS 3. Preuve en est, une fois de plus, que le porno fut aussi un vivier d’artistes talentueux.


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- Article rédigé par : Éric Peretti

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