The Survivalist

Un texte signé Sophie Schweitzer

Dans un futur pas si lointain, la famine frappe le monde entier. C’est au milieu d’une forêt isolée qu’un homme solitaire survit grâce à sa ferme. Mais la solitude et de régulières attaques l’ont rendu méfiant, bourru et taciturne. L’arrivée d’une mère et de sa fille va bouleverser son existence. Redevenu sauvage, le survivant a bien du mal à accepter la présence des deux femmes. Dans ce monde où la civilisation s’est effondrée, les comportements sont sauvages et la confiance difficile à accorder.

À l’instar d’un 28 JOURS PLUS TARD, THE SURVIVALIST place son héros dans la délicate position du survivant. S’il n’y a pas de zombies, les hordes sauvages destructrices qui ratissent la région et donnent dans le cannibalisme constituent une menace importante. Ces hordes d’ailleurs font un peu penser à l’univers de la saga MAD MAX. Mais contrairement à d’autres films post-apocalyptiques, ce métrage nous place dans l’intimité des personnages, délaissant l’action, et dans des décors impressionnants.

THE SURVIVALIST raconte avant tout l’histoire d’êtres qui ne savent plus comment se faire confiance. Chaque personnage vit quasiment la main sur une arme. La méfiance est le maître mot. Pour survivre, il faut se tenir prêt à trahir tous ses proches ! Nous comprenons vite que dans ce monde sans nourriture, l’homme est redevenu un être sauvage guidé par ses bas instincts. La survie est au prix de la vie des autres. Et au milieu de ce monde aride, même les femmes ne sont guère aimantes ni douces. Au lieu de constituer un espoir pour le héros, elles sont en réalité une menace, même si elles sont, au fond, la seule manière de briser sa solitude. En effet, il est habité par une solitude poignante, au point qu’il finisse par baisser sa garde. Quant aux femmes, la mère comme la fille sont des prédatrices se déguisant en agneaux. La mère est une louve, quant à la fille, séductrice, elle est tout aussi dangereuse que sa mère, si ce n’est plus. Finalement, c’est le choc entre l’animalité brutale et le besoin de l’autre qui provoque la construction d’une famille ou peu s’en faut.

En effet, THE SURVIVALIST raconte la construction d’une famille. Dans ce monde où la civilisation a disparu, c’est l’essentiel qui prime. Survivre, mais aussi et surtout, ne pas être seul.

Ainsi, la femme surveille sa fille telle une lionne, prête à ouvrir le ventre de n’importe quel homme qui s’en approchera. Le survivant, quant à lui, d’abord sauvage et méfiant, devient peu à peu apprivoisé par la fille. Cette dernière, derrière son air boudeur, manipule aussi bien qu’elle est manipulée par ses propres sentiments. C’est ainsi que le récit se tisse, comme une famille qui petit à petit se construit, s’unit, s’affronte aussi. Pour le survivant qui a perdu la sienne, il s’agit là d’une seconde chance, tandis que pour la fille, comme pour la mère, c’est l’occasion unique d’enfin pouvoir se poser et construire quelque chose.

Drame poignant, bouleversant, THE SURVIVALIST étonne, dérange et fascine. Récit post-apocalyptique, il redessine les codes du genre. Abandonnant tout souci d’un décor travaillé, c’est plutôt dans la manière dont la caméra tourne autour des acteurs et construit ses personnages, qu’il nous donne à voir le récit de quelque chose d’assez primaire. Stephen Fingleton détruit puis reconstruit la famille et au passage l’individu. Un film éblouissant et étonnant, qui marquera sans doute les esprits.


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- Article rédigé par : Sophie Schweitzer

- Ses films préférés : Le bon, La brute et le Truand, Suspiria, Mulholland Drive, Les yeux sans visage, L'au-delà

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