The Terror live

Un texte signé Frédéric Pizzoferrato

Débutant comme un compromis entre le thriller et le film catastrophe, cette production coréenne s’oriente rapidement vers le suspense en huis-clos fortement politisé. Une option gagnante puisque THE TERROR LIVE fut un immense succès tant public (cinq millions d’entrées dans son pays natal) que critique (Byeong-woo Kim obtenant le « blue dragon award » du meilleur réalisateur).

Yoon, journaliste vedette en disgrâce (et récemment divorcé) a présenté durant cinq ans le « 20 heures » avant d’échouer dans une modeste radio. Un jour, en pleine émission, Yoon se voit contacté par un auditeur qui affirme avoir placé des bombes en divers lieux de Séoul. D’abord perplexe, Yoon admet la véracité de ces dires lorsqu’une explosion détruit en partie un des ponts de la métropole. Le journaliste entame alors un jeu dangereux avec le terroriste dans l’espoir de faire grimper l’audience et de retrouver la célébrité. Pendant ce temps, des otages (dont son ex femme) se retrouvent coincés sur les ruines du pont qui menace de s’affaisser.

Sans grande surprise, THE TERROR LIVE s’inscrit dans la veine du thriller tendu dont les Coréens semblent s’être fait une spécialité depuis une dizaine d’années. Plus modéré que la majorité de ses confrères au niveau de la violence, Byeong-woo Kim ne se prive pas, néanmoins, d’adopter les codes du pur film d’action lors d’un troisième acte qui renoue également avec les conventions du cinéma catastrophe. Le long-métrage propose dès lors quelques explosions variablement spectaculaires, en partie gâchées par des effets spéciaux perfectibles, durant ses trente dernières minutes.

Néanmoins, si Byeong-woo Kim cherche à divertir (et y réussit souvent), il tente surtout de délivrer un message radical qui résonne comme un véritable appel à la révolution armée. La charge politique se fait donc assez lourde au fur et à mesure de la projection tant le cinéaste tire à boulet rouge sur les institutions, les élites et les politiciens, tous balancés dans le même sac et identifiés comme des « pourris corrompus ». Le personnage du patron de la radio obnubilé par l’audience (au point de payer une somme énorme pour garder l’exclusivité) se révèle à ce sujet gratiné et sombre même dans la caricature. Prenant fait et cause pour les masses exploitées (ici les travailleurs du bâtiment qui « triment comme des chiens pour le gouvernement »), le film, sans nuance, va légitimer les actions du terroriste (qui assassine un haut gradé en direct et cause la mort d’une poignée d’otages puis d’une escouade de flics) durant un final jusqu’au-boutiste (vaguement inspiré de FIGHT CLUB) peu crédible. Le film pousse d’ailleurs très loin la suspension d’incrédulité du spectateur et bien des décisions ou retournements de situation apparaissent invraisemblables.

De plus, l’ensemble se montre quelque peu bavard en dépit d’une poignée de rebondissements qui relancent l’intérêt parfois de manière artificiel. Ainsi la situation des otages sur le pont revient sur le devant de l’intrigue de manière opportune afin de préparer le basculement d’opinion du présentateur vedette. Heureusement, la réalisation use avec efficacité de l’espace confiné disponible et dynamise adroitement ce quasi huis-clos filmé pratiquement en temps réel. Le montage, nerveux, évite d’ailleurs tout sentiment d’ennui quoique l’essentiel du film se focalise sur cette confrontation assez statique, via les ondes, entre le terroriste aux abois et un journaliste de plus en plus dépassé par les événements.

Un thriller efficace à condition d’accepter son manque de vraisemblance et de prendre son message avec les réserves d’usage.


Votre soif de lecture n'est pas rassasiée ?
Téléchargez les anciens numéros de Sueurs Froides


Inscrivez-vous à la liste de diffusion et accédez au
téléchargement des anciens numéros de Sueurs Froides :
- Une tranche d'histoire du fanzinat français
- 36 numéros de 1994 à 2010
- Près de 1800 films critiqués
Un index est disponible pour chercher un film ou un dossier
CLIQUEZ ICI.

- Article rédigé par : Frédéric Pizzoferrato

- Ses films préférés : Edward aux Mains d’Argent, Rocky Horror Picture Show, Le Seigneur des Anneaux, Evil Dead, The Killer

Share via
Copy link