The unjust

Un texte signé Philippe Delvaux

Corée - 2011 - Ryoo Seung-Wan
Titres alternatifs : Bad deal, Bu-dang-geo-rae
Interprètes : Cheon Ho-jin, Hwang Jeong-min, Jeong Man-sik, Jo Yeong-jin, Ma Dong-seok, Ryoo Seung-beom, Woo Don-gi, Yoo Hae-jin

Pressée par l’opinion, la police doit trouver le coupable d’une série de viols et meurtres sur enfants. Problème, un policier a abattu le principal suspect, avant d’avoir pu obtenir des aveux qui auraient clos l’affaire de manière satisfaisante. Acculée, la hiérarchie décide de fabriquer un coupable et confie cette mission à Choi Cheol-gi, un de ses capitaines. Pour cela, Choi doit abandonner une enquête impliquant le mafieux de la construction Jang Suk-gu, ce qui ne fait pas l’affaire du procureur Soo, corrompu de son côté par l’adversaire de Jang, le président du groupe de construction TK. Soo et Choi vont se livrer à une bataille feutrée qui deviendra vite meurtrière. Qui fera tomber l’autre en premier ? Et qui sera entrainé dans cette guerre ?

Avec THE UNJUST, Ryoo Seung Wan, auteur d’ARAHAN (2004), CRYING FIST (2005), NO BLOOD, NO TEARS (2002), DIE BAD (2000) et de CITY OF VIOLENCE (2006), livre un grand polar dont le mérite revient certainement en partie à l’imparable scénario de Hoon-Jung Park, dont on a pu découvrir en 2011 l’extraordinaire travail sur J’AI RENCONTRE LE DIABLE (Kim Jee-Woon). Les erreurs de l’appareil policier coréen avaient précédemment déjà été magnifiquement soulignées, par exemple par THE CHASER ou MEMORIES OF MURDER.

On retrouve tout ce qui fait le sel du grand cinéma coréen depuis une bonne décennie déjà : un scénario fouillé (qui nécessite une attention de chaque instant pour ne pas perdre le fil), étayé de rebondissements bien amenés, des personnages crédibles bien mis en valeur par la mise en scène, un travail sur le rythme et la tension, des pauses humoristiques bien venues pour ponctuer les traditionnels, quoique rares, accès de violence.

Le mérite de l’intrigue est de nous proposer une galerie de personnages corrompus, mais conservant leur dimension humaine. Choi accepte la mission moins par ambition que pour obtenir une promotion qu’il aurait dû obtenir de longue date mais qui lui passait sous le nez parce qu’il ne sort pas de l’académie de police. On retrouve ici une critique du fonctionnement en cercles fermés des institutions, encore appuyée par le réseau familial qui a installé Soo à son poste et le protège. Plus que la corruption, c’est sans doute là que réside le thème porteur du film, comme en témoigne le glaçant dialogue final au sein du palais de justice. Le procureur Soo est, lui, dessiné en personnage arrogant, intelligent mais carriériste et corrompu. Tant pour Choi que pour Soo, la frontière du bien et du mal est dorénavant une notion floue, le premier interrogeant d’ailleurs le second à ce sujet et étant lui-même questionné par son adjoint (« sommes-nous encore du bon côté ? »). Cet estompement de la norme, ce passage de l’autre côté de la barrière, est souvent systémique au genre du polar.

THE UNJUST nous livre le combat de deux hommes, manipulés par des entrepreneurs, des mafieux, leur hiérarchie. Mais cet affrontement devient central au point de perdre tous ceux qui y sont liés.

Le scénario garde une dernière cartouche pour un twist final inattendu mais parfaitement crédible, qui noircit encore le tableau.

Sa présentation à l’Etrange festival 2011 (après quelques autres passages en festival au rang desquels rien moins que celui de Berlin en section Panorama) coïncide avec la sortie en salle de PRESUME COUPABLE (Vincent Garenq) et OMAR M’A TUER (Roschdy Zem) par lesquels le cinéma français embrasse (enfin) le fait de société pour dénoncer les errements d’une justice moins infaillible qu’on pourrait l’espérer. Le réel français rencontre la fiction coréenne.

THE UNJUST sera distribué par CJ Entertainment.

Retrouvez nos chroniques de l’Etrange Festival 2011.


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- Article rédigé par : Philippe Delvaux

- Ses films préférés : Marquis, C’est Arrivé Près De Chez Vous, Princesse Mononoke, Sacré Graal, Conan le Barbare


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