Tutto Quel Nero

Un texte signé Mario Gazzola

Italie - 2011 - Astori Cristiana

“-Excellent choix ! s’exclama le photographe. Cette fille fera des strip-tease à hurler…
Et comment. Puis il y avait eu tout le reste.
Cette moue avec les lèvres entrouvertes. Le regard vide et extatique. Et les mains. Ces mains qui remplissaient le cadrage entier (son cadrage ! ) pour l’entraîner dans un tourbillon de soie, de regards, d’ombres.
Soledad…
Tu as déjà eu des désirs impurs ?
Si, pensa le Réalisateur. Mais je n’ai jamais tant désiré être mordu.” (P.7)
TUTTO QUEL NERO (éditions Mondadori) est un roman noir de Cristiana Astori, parsemé d’éléments gothiques de ghost-story contemporaine, qui ne pourra qu’exciter les fans de cinéma de genre, puisqu’il prend place dans le monde du cinéma underground des années 70, où apparaît le personnage de Soledad Miranda, actrice fétiche de Jess Franco, morte en 1970 dans un accident de voiture.
Susanna, étudiante fauchée, est chargée par une mystérieuse organisation de retrouver une vieille pellicule. Ses recherches l’entraîneront dans les boîtes underground de Turin et les marchés noirs de collectionneurs sans scrupules, des salles pornos aux entrepôts de vieilles pellicules perdus dans le brouillard… jusqu’à une obscure rue de Lisbonne où se dénouera le mystère. Peut-être que le film n’existe même pas… mais alors, pourquoi tous ceux qui se trouvent mêlés à l’affaire sont-ils étranglés avec une bobine de pellicule ?
TUTTO QUEL NERO est un voyage dans le cinéma parallèle qui mêle les ingédients classiques du giallo (morts violentes, enquête) à de mystérieux flashbacks oniriques, qui nous font imaginer que toute l’affaire n’est peut-être qu’une hallucination dans l’esprit de l’impressionnable protagoniste.
Le roman est moins convaincant dans le développement de la psychologie des personnages, un peu bidimentionnels, et dans la solution policière à proprement parler : on devine que Astori préfère explorer l’horreur que le policier classique ; ainsi l’explication rationnelle de l’intrigue l’intéresse moins que la création d’atmosphères inquiétantes (comme d’ailleurs le giallo post-Argento des années 70).
TUTTO QUEL NERO plaira néanmoins au fétichiste du cinéma bis : au-delà de la citation de la collaboration (trop brève) Franco/Miranda (surtout le DRACULA avec Christopher Lee), on découvre des noms cultes du cinéma de genre italien, comme Renato Polselli et Alberto Cavallone…
De plus, Steve, le chasseur de pellicules de collection qui accompagne Susanna (ami ou profiteur cynique ?) est sur les traces du mythique MALDOROR : un film réellement tourné par Cavallone, jamais complété et maintenant perdu, malgré les recherches conduites par la revue Nocturno, citée dans le roman, pour le récupérer.
Dans TUTTO QUEL NERO, se cachent aussi des personnages et des films réels sous de faux noms et de faux titres : IL MORBOSO VIZIO DELLA SIGNORINA SMITH pour LO STRANO VIZIO DELLA SIGNORA WARDH de Sergio Martino, ou le producteur Omero Astorakis qui évoque Ovidio Assonitis.
Cristiana Astori est écrivain et traductrice : elle a publié des nouvelles sur différentes anthologies, comme 365 RACCONTI HORROR PER UN ANNO (Delos BOOKS, 2011) et EROS & THANATOS, toujours pour Giallo Mondadori, pour qui elle traduit actuellement le cycle Dexter de Jeff Lindsay.

(trad. de l’italien : P. Ficini)


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- Article rédigé par : Mario Gazzola

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