Ugly nasty people

Un texte signé Philippe Delvaux

Italie-France-Belgique - 2017 - Cosimo Gomez
Titres alternatifs : Brutti e cattivi
Interprètes : Claudio Santamaria, Marco D'Amore, Sara Serraiocco, Simonico Matrucci, Narcisse Mame, Aline Belibi

Un cul de jatte et sa femme manchot s’associent avec le jamaïcain Merda (parce qu’il pue du bec) et le nain Cico (qui , de sa langue, « mouline la chatte des filles ») pour dérober quatre millions d’euros à la mafia chinoise. Mais c’est peu dire qu’ils n’ont pas vraiment l’intention de partager équitablement le magot. L’idée serait plutôt de simplifier l’équation en éliminant certains d’entre eux, voire tous. Bon, y’a intérêt à pas se rater, parce que les survivants apprécient généralement moyennement la trahison.

Ah c’est clair, on n’est pas vraiment sur le même registre que dans INTOUCHABLE. Pourtant, vu l’affliction de l’épouse, on se retient de crier « pas de bras, pas de chocolat », surtout lorsqu’elle fricote avec un prêtre africain.

AFFREUX SALES ET MECHANTS (BRUTTI, SPORCHI E CATTIVI). La référence est là par contre immédiate et assumée puisque le titre original d’UGLY NASTY PEOPLE est… BRUTTI E CATTIVI. Ici aussi, on côtoiera une bande de bras cassés, aussi mauvais qu’avaricieux. Sauf qu’au lieu de s’entredéchirer pour la pension du chef de famille, ils entendent dérober le butin à leurs complices, et de préférences en éliminant lesdits complices.

La seconde référence est évidemment FREAKS de Tod Browning (1932), film matriciel lorsqu’il s’agit de handicapés. Ce n’est donc pas un hasard si le cul de jatte d’UGLY NASTY PEOPLE est issu d’un cirque qui n’intervient pourtant jamais vraiment dans l’intrigue : cet élément de contexte entend inscrire le film dans la filiation de FREAKS qui, rappelons-le, voyait aussi éclore la traitrise au cœur du mariage.

Mais si on gratte un peu, on identifie une troisième référence : ACTION MUTANTE d’Alex de la Iglesia. Le film qui a signé le renouveau du cinéma de genre espagnol présentait aussi son lot de mutants et de handicapés pour le moins teigneux et remontés. UGLY NASTY PEOPLE signera-t-il le renouveau du cinéma de genre italien. La tendance est positive puisqu’un an plus tôt, JEEG ROBOT avait en tous cas emporté la mise dans nombre de festivals. Mais comme on annonce ce renouveau italien à chaque production, on attendra un peu avant de chanter alléluia.

D’autant plus que, tout rigolo qu’il soit, UGLY NASTY PEOPLE n’est pas parfait. Son dernier acte échoue à faire monter la tension et résout assez platement ses enjeux. En outre, la prostituée africaine, seul personnage positif et utilisé donc en contrepoint, manque cruellement de caractérisation et s’incruste artificiellement dans le reste de l’intrigue.

Dommage, car tout le reste nous emporte dans une tornade de rire et de moments drolatiques. On s’esclaffe des malheurs de nos bras cassés (voire « bras manquant ») et de leurs truanderies diverses. Les scénaristes se sont bien amusés et nous emportent dans leurs délires.

Lancé mondialement au festival de Venise, UGLY NASTY PEOPLE était présenté deux jours plus tard en première internationale à l’Etrange festival 2017. A ce stade, et sous réserve des limites pointées plus haut, on lui prédit une belle carrière.


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- Article rédigé par : Philippe Delvaux

- Ses films préférés : Marquis, C’est Arrivé Près De Chez Vous, Princesse Mononoke, Sacré Graal, Conan le Barbare


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