Yéti le géant d’un autre monde – Gianfranco Parolini (1977)

Un texte signé Frédéric Pizzoferrato

Italie - 1977 - Gianfranco Paroloni
Titres alternatifs : Yeti – Il gigante del 20º secolo
Interprètes : Antonella Interlenghi, Jim Sullivan, Tony Kendall, Edoardo Faieta, Aldo Canti, Donald O'Brien

Gianfranco Parolini (1925 – 2018), réalisateur de Yéti, le géant d’un autre monde, fut un artisan talentueux du cinéma populaire italien ayant débuté sa carrière en 1953 avant d’accéder à une certaine notoriété via le péplum. Au début des sixties, il enchaîne ainsi Sanson contre Hercule, Hercule se déchaîne, Les Dernier Jours d’Herculanum, etc.

Comme la majorité de ses collègues il creuse ensuite les sillons du bis au gré des modes en vogue: polar dans le style du krimi, avec notamment cinq aventures du Commissaire X (Le commissaire X traque les chiens verts, Halte au L.S.D., etc.), cinéma-fumetti (Les 3 fantastiques supermen) et, bien sûr, le western. Parolini crée ainsi deux pistoleros mythique de l’Ouest avec Sartana puis Sabata. Après avoir tâté de la comédie western à la mode fayot via Trinita, nous voilà! notre homme achève pratiquement sa carrière avec Yéti, le géant d’un autre monde en 1977 (il tournera encore, dix ans plus tard, un sous Indiana Jones, Le Secret du temple inca).

Yéti le géant d'un autre monde – Gianfranco Parolini (1977)
Yéti le géant d'un autre monde – Gianfranco Parolini (1977)

Dans la seconde moitié des seventies, le retour sur les écrans de King Kong (via le remake à gros budget et souvent sous-estimé de John Guillermin et Dino DeLaurentiis) agite le microcosme du bis. Les réponses ne tardent pas à fleurir: un King Kong revient coréen, un divertissant Colosse de Hong Kong chinois, un mythique (mais sûrement piteux) Queen Kong,…L’Italie ne peut que se jeter dans la mare et Parolini dégaine le premier, via ce Yéti, le géant d’un autre monde fort peu convaincant.

L’intrigue s’inspire évidement de King Kong: un industriel, Morgan Hunnicut (Edoardo Faieta, Le Corsaire noir), et son ami le professeur Wassermann (John Stacy, S.O.S. Concorde), organisent une expédition pour étudier un gigantesque Yéti, découvert congelé sur la côte de Terre-Neuve. Bien sûr, les intentions de Morgan sont louches et bassement commerciales: plutôt que d’étudier scientifiquement la créature, il souhaite surtout l’exploiter comme une attraction de foire. Et, forcément, toute l’agitation des spectateurs effraie le Yéti. Ce-dernier s’échappe, poursuivi par les petits enfants de Morgan et leur chien.

Yéti le géant d'un autre monde – Gianfranco Parolini (1977)

Dès l’entame, Yéti, le géant d’un autre monde part sur de mauvaises bases avec son figurant engoncé dans un costume ridicule que n’importe quel Kaiju-Eiga eut refusé. Pire, les transparences sont très visibles et les incrustations approximatives anéantissent immédiatement toute crédibilité du récit. Le monstre lui-même semble, de son côté, changer de taille d’un plan à l’autre au gré du scénario. Un défaut déjà existant dans le King Kong de 1933 mais qui, ici, parait fort gênant. Non seulement car nous sommes à la même époque que La Guerre des étoiles mais surtout car tous les personnages sont agaçants.

Commençons par le trio terrible: la jeune fille maligne, le gamin muet suite à un traumatisme et le gentil chien fidèle. Bref, l’horreur absolue de la naïveté et du bon sentiment pour un public familial ayant laissé son cerveau au vestiaire. Nous avons droit aussi au milliardaire capitaliste très bête et au scientifique caricatural. Parolini confond manifestement spectacle familial et bouffonnerie. Car, autre problème, Yéti, le géant d’un autre monde n’est jamais effrayant, ni même inquiétant ou mystérieux. Le monstre y relève du gros nounours candide coincé dans un monde vraiment trop méchant. Une option qui annonce, avec dix ans d’avance, celle de Bigfoot et les Hendersons, lequel avait au moins l’avantage de divertir.

Dans les rôles secondaires, le physionomiste reconnaît Tony Kendall (Le Commissaire X en personne) et Donald O’Brien (Zombie holocaust) aux côtés de l’héroïne, campée par la nymphette Antonellina Interlenghi, revue ensuite dans Frayeurs (et, pour les pervers, dans La Cage aux folles 3).

Longuet, d’une naïveté confinant à la stupidité et prévisible de la première à la dernière image, Yéti, le géant d’un autre monde signe la fin des glorieuses heures du bis italien en recyclant jusqu’à la nausée les tropes du cinéma américain avec des budgets dix fois inférieurs. On peut certes trouver le film charmant par sa nonchalance ou éprouver une bouffée de nostalgie pour ce figurant en costume grimpant sur des maquettes mais l’ensemble reste sinistre: dix ans après les outrances du western spaghetti ou la flamboyance du giallo, assister à un tel spectacle est plus triste que divertissant. Le bis italien fonçait alors droit dans le mur et les futurs décalques de La Guerre des étoiles élaborés avec deux maquettes et des robots en aluminium allait le précipiter vers sa fin…


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- Article rédigé par : Frédéric Pizzoferrato

- Ses films préférés : Edward aux Mains d’Argent, Rocky Horror Picture Show, Le Seigneur des Anneaux, Evil Dead, The Killer - Ses auteurs préférés - Graham Masterton, Christophe Lambert, Thomas Day, Stephen King, Clive Cussler, Paul Halter, David Gemmell

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