Yohkiro

Un texte signé Chrystelle Cavaglia

Japon - 1983 - Hideo Gosha
Titres alternatifs : Le Royaume des Geishas
Interprètes : Ken Ogata, Kimiko Ikegami, Atsuko Asano, Sayoko Ninomiya

YOHKIRO, film romanesque et dramatique, est la seconde adaptation à l’écran par Gosha d’un roman de Tomiko Miyao. Le réalisateur y dépeint avec émotions la vie des geishas dans le Japon des années 30, un Japon qui se modernise et s’occidentalise.
Katsuzo (Ken Ogata) est amoureux d’une geisha, Tsuru, qui lui a donnée une fille. Il tente de s’enfuir avec elle et le bébé mais ils sont vite rattrapés par des yakuzas qui assassinent Tsuru. Vingt ans plus tard, sa fille Fusako qui a été élevée par la rivale de sa mère, la directrice de la Maison Yohkiro, est désormais Momowaka, une célèbre geisha. Quant à Katsuzo, il est devenu proxénète pour le Yohkiro mais n’entretient presque aucun lien avec sa fille. Jusqu’au jour où les yakuzas d’Osaka se mettent à convoiter la plus grande maison de geishas du sud du Japon…
Tout comme dans L’OMBRE DU LOUP, Gosha nous montre, avec un sens critique et humaniste, la condition de la femme et la misère sociale dans un Japon en mutation sous l’emprise de la pègre.
Mais dans YOHKIRO, le thème des yakuzas sert uniquement de toile de fond au sujet principal qui est la vie quotidienne des geishas : leurs apprentissages, intimités, rivalités, cruautés, disputes et peines de cœur. Le réalisateur, par une vision réaliste, romancée et dramatique, nous plonge au cœur de l’univers fascinant des geishas. On découvre ainsi la vie tragique de Momowaka, la plus belle et la plus appréciée des ‘employées’ du Yohkiro. Les geishas sont présentées comme des femmes cultivées et raffinées pratiquant l’art et le chant, à la différence des prostituées. Elles ont également un niveau de vie et des revenus supérieurs et sont respectées et reconnues par la société. Leur univers demeure très ritualisé et codifié et leur éducation se fait dès leur plus jeune âge. Les actrices incarnant ces femmes sont très belles ; elles font preuve d’un certain charisme par la beauté de leurs visages, corps et regards. Que ce soit la tendre geisha Momowaka, Tamako l’effrontée, prostituée et maîtresse de Katsuzo, ou bien encore la dure mais juste directrice du Yohkiro, ces femmes semblent toutes charmantes, attachantes et émouvantes. A travers ses personnages, Gosha porte ainsi un regard attendri sur ces femmes en quête d’indépendance et d’affranchissement indissociables du commerce de leur corps.
Il filme le grain de leur peau avec une sensibilité particulière qui offre une touche d’érotisme très sensuel. La photographie est sublime ; les couleurs et les lumières s’harmonisent parfaitement avec l’ambiance romanesque des amours impossibles des geishas et de leur bonheur inaccompli. Le scénario s’avère riche en rebondissements mélodramatiques et amoureux et la mise en scène, soignée, demeure lente, surtout vers la fin qui traîne un peu en longueur.
Avec YOHKIRO, Gosha nous offre donc une peinture moderne et tragique du monde intriguant des geishas. Un film passionnant, réalisé avec talent, qui décrit la vie difficile des femmes dans la société japonaise.


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- Article rédigé par : Chrystelle Cavaglia

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