Yuva

Un texte signé Patryck Ficini

Inde - 2004 - Mani Ratnam
Interprètes : Ajay Devgan, Abhishek Bachchan, Vivek Oberoi, Kareena Kapoor

YUVA est un savant mélange de film à message et de polar. Un polar politique, en quelque sorte, comme en firent les Italiens aux beaux jours de leur cinéma.
C’est avec habileté que le réalisateur croise 3 destins. Le film est ainsi divisé en 4 parties. Une partie par personnage (les héros et le méchant) et un dernier chapitre qui mêle enfin leurs histoires, en montrant l’alliance des deux braves types face au bad boy.
Au début, on ne comprend pas grand-chose. Ajay Devgan se fait tirer dessus par Abhishek Bachchan après avoir pris en stop Vivek Oberoi. Puis l’auteur narre ce qui a précédé et qui a amené là nos 3 personnages. Cette structure originale pourra irriter ou séduire ; en tout cas, le procédé captive et maintient éveillée l’attention du spectateur. Notons qu’il ne masque cependant en rien, et comme on pourrait le craindre, une superficialité des personnages ou de l’intrigue. Cette construction audacieuse renforce simplement notre intérêt pour un contenu déjà très fort.
Le méchant, excellemment interprèté par un haissable Abhishek Bachchan, est une petite frappe, un voyou qui passe son temps à se battre quand il ne dérouille pas sa femme. Sans que cela l’empêche de danser avec elle, Bollywood oblige ! Ambitieux, il se met vite au service d’un politicien sans scrupules et sera utilisé par lui pour abattre le personnage d’étudiant militant incarné par Ajay Devgan.
Celui-ci, idéaliste, est prêt à tous les risques pour faire passer ses idées, quitte à déranger un politicien véreux pourtant à même, apparemment, de l’écraser.
C’est Devgan qui prend en stop sur sa moto le troisième larron du film, Vivek Oberoi (les deux acteurs figurent aussi au générique du plus célèbre COMPANY de Ram Gopal Varma), un jeune gars insouciant et dragueur qui tombe amoureux d’une jolie fille. C’est sur lui que repose la love-story romantique du film (même si les trois personnages connaissent une histoire d’amour), guère originale mais très réussie si on cède une fois de plus aux attachantes ficelles du cinéma indien. Son personnage est malgré tout digne d’intérêt dans son évolution. Au départ superficiel, sans relief, il s’engage pour la première fois de sa vie, en amour tout d’abord puis en militantisme politique après sa rencontre avec Devgan. En effet, quand celui-ci est blessé, c’est Oberoi qui le sauve et l’emmène à l’hôpital. De là naît une amitié solide qui les conduira tous deux au pouvoir, désireux de changer la situation politique du Bengale.
Le voyou promet bien à sa compagne de s’amender, mais c’est impossible. Lui est incapable d’évolution et complètement pourri de l’intérieur. A la fin, il tente à nouveau de tuer Devgan sur un pont dans une scène de bagarre impressionnante, au milieu d’un flot de circulation. C’est la seule grosse scène d’action de YUVA (hormis quelques flingages), mais elle est impeccable.
YUVA, on l’aura compris, est un film atypique, bien réalisé, construit sur un très solide scénario et qui s’appuie sur un casting franchement irréprochable. C’est une fois de plus un film de Bollywood que l’on peut conseiller à ceux qui s’en font une vision réductrice, essentiellement fondée sur des clichés réels ou supposés. Le côté romantique et les bons sentiments sont bien là, mais au service d’une sacrée histoire, ce qui fait toute la différence. L’intelligence et l’émotion transmises par YUVA, comme le traitement des personnages principaux, justifient largement (ou excusent, c’est selon) sa très longue durée.


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- Article rédigé par : Patryck Ficini

- Ses films préférés : Django, Keoma, Goldfinger, Frayeurs, L’Au-delà

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