Zombie Ass : Toilet of the dead

Un texte signé Philippe Delvaux

Japon - 2011 - Noboru Iguchi
Titres alternatifs : Zonbi asu
Interprètes : Asami

Une lycéenne en costume marin, un geek, un obsédé et drogué et Maki, sa copine bombasse, partent camper près d’une rivière où la dernière espère trouver un parasite qui, une fois ingéré, lui permettrait de perdre encore du poids. Mais très vite, ils sont assaillis par des zombies et se réfugient dans un petit village… d’où provient la menace. Les zombies sortent en effet des latrines publiques. Il s’agit plus précisément de corps infectés par des parasites qui en ont pris le contrôle et ressortent par l’anus de leurs victimes. Problème, Maki a donc ingéré ce très hostile vers et ressent bientôt des douleurs stomacales et une envie de déféquer.

Que dire après vision, si ce n’est s’exclamer, tel le critique de LA CITE DE LA PEUR: “ce film est une merde”… sauf qu’ici, ce sera plutôt un compliment.

Amateur de concepts improbables et de films barrés, ZOMBIE ASS : TOILET OF THE DEAD t’es destiné.

Le nouveau Noboru Iguchi offre un croisement improbable entre le MEET THE FEEBLES de Peter Jackson – souvenez-vous, la mouche à merde – et le SHIVERS de David Cronenberg. Du premier, le référentiel aux fèces et la comédie Z ; du second, l’idée des parasites qui contaminent toute une communauté.

S’il s’agit bien d’une production Nikkatsu, elle n’a pas été conduite par leur label Sushi Typhoon. Ouf, le résultat, pourtant totalement Z, en sort grandi. On retrouve aux côtés de Noboru Iguchi les habitués qui gravitent dans son giron, au rang desquels le concepteur d’effets spéciaux – et parfois réalisateur – Yoshihiro Nishimura.

On ne peut s’empêcher de penser qu’un tel concept reflète son époque : il découle en partie de la segmentation du porno sur le net. La structure même du web a influé sur le type d’image pornographique créée. Au fil du temps, des niches hyper spécialisées ont vu le jour, focalisant notamment sur certaines pratiques et perversions telle la scatophilie ou les lavements. Si celles-ci ne sont pas nées avec le web – rappelons-nous, pour rester dans le lavement, le célèbre WATER POWER (chroniqué sur Sueurs Froides) – elles s’y sont cependant épanouies. Par ricochet, le cinéma non pornographique de genre a donc pu en récupérer une certaine imagerie. On l’a vu avec HUMAN CENTIPEDE et ses acteurs collés bouches-à-culs, on le voit ici avec ZOMBIE ASS et ses actrices exhibant leurs postérieurs à la caméra et criant leur besoin de se soulager, ou ses parasites sortant de leurs culs sous forme de longs tentacules. La proximité de thématique avec le porno de ZOMBIE ASS : TOILET OF DEAD n’étonnera pas : Noboru Iguchi a commencé sa carrière en réalisant des vidéos pornos, notamment de lavement.

Rappelons également qu’en 2003, Noboru Iguchi a écrit et dirigé la comédie d’horreur A LARVA TO LOVE, déjà avec Yoshihiro Nishimura aux effets, et qui traitait de la relation entre un garçon, une fille… et un parasite.

La société japonaise a en outre un rapport particulier à la pudeur… et a par réaction avec celle-ci développé un érotisme qui joue de la gène et la honte. Un film qui évoque des parasites sortant par l’anus et des besoins de défécation procède sans doute de cette perversion de la honte, quand bien même le métrage n’est pas explicitement pornographique mais relève plus de la comédie scatologique.

Le Japon est aussi le pays qui a développé l’érotisme des tentacules. Le plus souvent, ceux-ci émanent de démons et s’en viennent pénétrer et violer leurs victimes. On retrouve quelque peu ces tentacules ici via ces parasites vermiculaires qui rentrent ou sortent des orifices des infectés.

L’ensemble est donc totalement japonais. D’une part par son côté décomplexé, réaction classique du ciné de genre local par rapport à la formalisation extrême de la société japonaise, d’autre part par les styles mêmes qu’on y retrouve : outre l’influence de la pornographie de niche scato ou de tentacules que l’on vient d’évoquer, le climax se focalise sur un combat entre humains et parasites, qui renvoie clairement à toute la tradition du film de monstres en costumes ou en marionnettes. Rien d’étonnant quand on sait que Nishimura est aux effets spéciaux.

ZOMBIE ASS est un spectacle généreux, mené tambours battants. Totalement irréaliste, diablement foutraque, Z dans le bon sens du terme, son côté jusqu’au-boutiste n’attirera cependant que les fans hardcore de cinéma de genre. Il va sans dire qu’il ne s’adresse qu’au public qu’amuse l’humour à base d’excréments et de pets.

Le BIFFF a déjà par le passé programmé Noboru Iguchi, via le fendard MACHINE GIRL et son bras mitrailleuse préfigurant la jambe mitrailleuse de PLANET TERROR, le segment GRINDHOUSE réalisé l’année d’après par Roberto Rodriguez. MACHINE GIRL mettait déjà en valeur l’actrice Asami, qu’on retrouve dans ZOMBIE ASS et quelques autres réalisations d’Iguchi. En 2011, le BIFFF programmait en séance de minuit KARATE ROBO ZABORGAR.

ZOMBIE ASS : TOILET OF DEAD a été présenté, toujours en séance de minuit, en toute fin du trentième Brussels International Fantastic Film Festival (BIFFF), dans le cadre des festivités du centenaire de la Nikkatsu, où il a récolté un beau succès à l’applaudimètre d’une assistance hilare. Quelques temps plus tard, ce sont les parisiens de l’Etrange Festival qui auront été confronté à cet OFNI.

Avec ZOMBIE ASS : TOILET OF DEAD, ça va IguCHI-ER !

Retrouvez nos chroniques du BIFFF 2012.

Retrouvez notre couverture de l’Etrange Festival 2012.


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- Article rédigé par : Philippe Delvaux

- Ses films préférés : Marquis, C’est Arrivé Près De Chez Vous, Princesse Mononoke, Sacré Graal, Conan le Barbare


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