Bienvenue sur L’Autoroute de l’Enfer, le néerlandais Ate de Jong est le chauffeur
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La lecture de cet article dure pile-poil 3 minutes 28, soit la durée du cultissime Highway to Hell du groupe AC/DC… Même si L’Autoroute de l’Enfer (Highway to Hell en VO) n’a aucun rapport avec le titre de AC/DC, pourquoi ne pas accompagner votre lecture d’un peu de bonne musique…
Classique de l’ère des vidéothèques . L’Autoroute de l’Enfer est une comédie d’horreur tournée dans le désert de l’Arizona et profondément marquée par les années 80 comme l’atteste la bande-son. Le synthé où les riffs de guitare se mesurent aux couleurs vives qui donnent une belle touche nostalgique au film d’Ate de Jong. Les effets spéciaux, quant à eux, s’associent aux nombreuses trouvailles visuelles pour faire de L’Autoroute de L’Enfer un petit bijou.
Charlie (Chad Lowe) et Rachel (Kristy Swanson) sont jeunes, amoureux et fugueux. En effet, ils viennent de fausser compagnie à leurs parents parce qu’ils ont la ferme intention de se marier contre leur volonté. C’est pourquoi, comme 100 000 autres couples chaque année, ils tentent de rallier Las Vegas où il est facile, peu cher et rapide d’obtenir un contrat de mariage. Au milieu de la nuit, ils sont arrêtés en plein désert par une voiture de police. Nul autre que C.J. Graham, Jason Voorhees sixième du nom, sort de la voiture. Le Hellcop au visage brûlé s’empare de Rachel et l’emmène avec sa voiture de police directement en enfer où il a l’intention de la livrer à Belzébuth lui-même (Patrick Bergin). S’il veut sauver sa bien-aimée, Charlie n’a pas d’autre choix que de prendre son courage à deux mains et de la suivre en Enfer.
No stop signs, speed limit – Nobody’s gonna slow me down
Au début des années 90, les amateurs de cinéma devaient lever leur popotin du canapé pour voir des films. Les gros titres sortaient en salle ; les séries B comme le film d’Ate de Jong prenaient, quant à elles, directement la direction des vidéothèques. Ces échoppes implantées dans toutes les villes de l’Hexagone étaient gérées par des patrons qui choisissaient en toute indépendance les titres qu’ils souhaitaient offrir à la location pour leurs clients. Ce système de distribution, facilitateur de diversité, était particulièrement avantageux pour des séries B du gabarit de L’Autoroute de l’Enfer.
Ce petit chef-d’oeuvre mêle sans temps mort comédie, fantastique, horreur et action.
Le scénario ingénieux exploite efficacement le désert omniprésent qui lui sert de décor naturel. Celui-ci ne fait jamais vide, tout comme le script pétri de petites idées puisant même parfois dans la mythologie grecque. Ainsi, le mythe de la descente aux Enfers d’Orphée et d’Eurydice sert de toile de fond à l’intrigue, tandis que des clins d’oeil farfelus surprennent le spectateur comme la présence d’Adolf Hitler qui tente de persuader Cléopâtre qu’il y a maldonne sur sa personne ; or sa ressemblance avec le dictateur nazi crève les yeux…
Le scénario est l’oeuvre de Brian Helgeland qui s’est ensuite fait remarquer en rédigeant les scripts de plusieurs grands succès comme L.A. Confidential en 1997 et pour lequel il a d’ailleurs été oscarisé.
Nobody’s gonna mess me around – Hey Satan, payin’ my dues
Les effets spéciaux sont signés Randall William Cook. Peu de temps après le changement de millénaire, il remportera trois Oscars pour son travail sur la trilogie du Seigneur des anneaux de Peter Jackson. En attendant, il livre pour L’Autoroute de l’Enfer des trucages numériques de bonne qualité à l’image de ces voitures volantes ou poignées de porte qui disparaissent comme par magie. Deux ans avant Jurassic Park, L’Autoroute de l’Enfer n’est pas ridicule. Les effets spéciaux ont même étonnement bien vieilli et décuplent aujourd’hui le charme années 90 du film.
Mais L’Autoroute de L’Enfer, c’est aussi des peintures sur verre pour donner corps à l’Enfer et en particulier à City Hell, des maquillages horrifiques avec le Hellcop et un démon femelle nymphomane qui fait froid dans le dos. Il y a aussi un cerbère, chien à trois têtes, animé images par images, gardant l’entrée de City Hell.
Hey mama, look at me – I’m on the way to the promised land – Woo!
L’interprétation de Chad Lowe n’est peut-être pas toujours à la hauteur, mais il participe avec enthousiasme à l’entreprise. Par ailleurs, il a le mérite d’avoir un nom puisqu’il est le petit frère de Rob (l’une des figures des films d’adolescents des années 80). Patrick Bergin, de son côté, est un Lucifer particulièrement convaincant et intéressant puisqu’il montre des qualités humaines. Pour l’histoire, la même année, il incarne le mari psychotique de Julia Roberts dans Les Nuits avec mon ennemi. Kristy Swanson, quant à elle, est une figure populaire des années 80, puisqu’on la croisait aussi bien dans les films de John Hughes qu’au sein du cinéma fantastique ; elle est en effet l’Amie Mortelle de Wes Craven et Buffy dans la version de 1992.
C’est beaucoup d’atouts pour un film qui n’a finalement bénéficié que de peu d’attention de la part du public ou de la critique. Il faut dire qu’à l’époque, on sortait quand même de Hellraiser, un film autrement plus sombre que L’Autoroute de l’Enfer qui s’avère une comédie d’action endiablée, probablement un peu trop en avance sur son temps.
Aujourd’hui, avec le recul, force est de constater que ce manque d’intérêt était injuste. L’Autoroute de l’Enfer, ce n’est pas un voyage en Enfer, mais plutôt un retour vers une époque où le cinéma fantastique savait proposer une évasion.