Cellat
Orhan Polat est un architecte sans histoires, apprécié de ses collègues de travail, et soucieux du bonheur de ses proches. Il est marié à la belle Filiz, et sa soeur cadette Sevgi file également le parfait amour avec Jahil. Les deux couples sont presque inséparables. Mais tout bascule un jour où les deux jeunes femmes rentrent à la maison après avoir fait quelques courses. Elles n’ont pas remarqué qu’elles étaient suivies par un trio de malfrats en quête de sensations. Les trois hommes parviennent à s’introduire dans la demeure, font main basse sur l’argent et les bijoux avant de s’en prendre aux deux malheureuses. Elles sont battues et violées. Après qu’ils aient quitté les lieux, Sevgi trouve la force de décrocher le téléphone et appeler son mari. Lorsqu’Oran apprend à son tour la nouvelle, il se précipite à l’hôpital au moment où sa femme rend son dernier souffle. Sa sœur, quant à elle, traumatisée, est en état de choc. Entre le médecin réservé sur un diagnostic favorable, et l’inspecteur de police pessimiste quant à la possibilité d’identifier les assassins, Orhan décide alors de faire justice lui-même. Architecte le jour, il va se muer en tueur implacable à la nuit tombée, éliminant la vermine arpentant les ruelles sombres des quartiers malfamés d’Istanbul.
Remontons un an en arrière : Michael Winner réalise UN JUSTICIER DANS LA VILLE (DEATH WISH) avec Charles Bronson dans le rôle d’un architecte se transformant en vengeur à la suite du meurtre de sa femme et du viol de sa fille par une bande de voyous. L’acteur américain reprendra à quatre reprises le personnage de Paul Kersey, entre 1982 et 1994. Mais cette franchise controversée dans la mesure où elle aborde un sujet à forte polémique, le droit à l’autodéfense, va également être imitée, sinon plagiée, dans les années qui suivent, dans différents pays. La Turquie ne va pas être en reste, adepte du « vigilante movie » depuis les années soixante. Ce remake à peine déguisé, CELLAT, est mis en scène par Memduh Ün, cinéaste également producteur, scénariste et acteur, une polyvalence que l’on retrouve souvent dans le cinéma turc. Il confie le rôle du justicier à Serdar Gökhan, qui a vingt ans de moins que Charles Bronson, mais arbore une superbe moustache tout comme son illustre modèle. Gökhan livre une composition honnête, et sa sobriété le rend crédible dans ce rôle de vengeur éperdu de douleur qui parvient néanmoins à conserver sa lucidité dans sa quête de justice. Malgré cette prestation convaincante, Serdar Gökhan ne demeure pas, aux yeux des fans turcs de cinéma-bis, comme l’un des représentants emblématiques du héros justicier ; il reste même très loin derrière un trio de vedettes spécialisées dans le genre, comme Ayhan Isik (BÜYÜK KIN), Yilmaz Güney (CANLI HEDEF) ou encore Cüneyt Arkin (ALIN YAZISI).
Dans la forme, CELLAT est une bonne copie du film de Michael Winner, avec tout le charme du cinéma turc en plus. Le teaser présente les protagonistes du film, à savoir les deux couples, dans un style confondant de naïveté et d’emphase. Ce côté « image d’Epinal » pourrait en rebuter certains, mais heureusement le film change très vite de ton à partir de l’agression des deux femmes, et s’avère un véritable film d’exploitation n’évitant aucun code du genre : violence, situations extrêmes et soupçon d’érotisme. Les méchants de l’histoire sont stéréotypés à la limite du caricatural, et les expéditions punitives du héros dans les bas-fonds d’Istanbul sont tout aussi nombreuses que jouissives. A ce propos, le fait que l’opinion publique (relayée à travers la presse) et même la police ne condamnent pas les actes d’Orhan rebuteront les adeptes de la morale. Quant aux autres, ils apprécieront certainement la manière dont finissent les trois violeurs/criminels, puisqu’ils on droit à un traitement spécial de la part du justicier. On n’en attendait pas moins de lui, en vérité.
Trente cinq ans plus tard, le « vigilante movie » reste toujours d’actualité, puisque Sylvester Stallone s’attaque au remake du film de Michael Winner. Cette nouvelle mouture de UN JUSTICIER DANS LA VILLE devrait voir le jour en 2010. Avec Stallone devant et derrière la caméra !