Un texte signé Tom Flener

Turquie - 1969 - Cetin Inanc
Titres alternatifs : Iron Claw the Pirate
Interprètes : Demir Karahan, Nebahat Cehre, Yildirim Gencer, Necati Er


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retrospective

Demir Pence Korsan Adam

Fantomas (Necati Er) décide de rentrer à Istanbul pour se venger (on ne sait pas vraiment pourquoi) et pour éliminer Iron Claw/Demir (Demir Karahan). Ce héros masqué, de son côté, ne jure également que par la vengeance (sans qu’on ne sache vraiment pourquoi non plus). En même temps, il promet de protéger sa patrie (ah, là on avance !). Avec sa compagne Mine (Nebahat Cehre) et l’Oncle (Danyal Topatan), il décide donc de combattre Fantomas. Yildirim (Yildirim Gencer) se joint alors au trio, parce qu’ il veut venger son frère, tué par les hommes de Fantomas. Tandis que ce dernier a élaboré plusieurs plans, de la chasse au microfilm à un projet qui demande beaucoup de caisses de TNT, Iron Claw et son équipe passent leur temps à chasser les méchants, à les cogner ou à leur tirer dessus, et à généralement gêner l’exécution des fameux plans de Fantomas.
Tous ceux qui adoraient IRON FIST : THE GIANTS ARE COMING et SPY SMASHER sauront à quoi s’attendre avec cet IRON CLAW et son intrigue volontairement vidée de tout superflu. A la vue du titre légèrement trompeur, ceux qui espèrent voir des pirates turcs et des combats navals vont être déçus. Loin d’être une histoire de corsaires, IRON CLAW s’apparente plutôt à un remake de SPY SMASHER, tant leurs intrigues se ressemblent. IRON CLAW se déplace à moto et trouve à ses côtés une belle femme masquée ainsi qu’un side-kick plus ou moins drôle. IRON CLAW va encore plus loin que son prédécesseur sur certains aspects. Ainsi, le nationalisme et l’amour de patrie de nos héros sont encore plus prononcés que dans SPY SMASHER (le film se termine sur une vue du drapeau turc) et le sadisme de Fantomas envers ses subordonnés incapables (surtout envers les femmes) est encore plus poussé.
L’intrigue (si l’on veut parler d’intrigue) s’avère minimaliste à l’extrême. Ainsi, l’Oncle travaille dans le club où Fantomas concocte ses plans et écoute à la porte lors de chaque réunion (disons que Fantomas n’est pas le méchant le plus prudent ni le plus malin). Ceci procure au réalisateur l’alibi parfait pour se débarrasser de toute autre explication et envoyer ses héros d’une scène de bagarre à l’autre, sans qu’on ne soit supposé se demander comment ils retrouvent sans la moindre hésitation les méchants. De toute façon, il semble que beaucoup de films de super-héros turcs préfèrent nous montrer des fusillades et des cascades visiblement assez dangereuses plutôt qu’une intrigue logique, cohérente ou motivée. IRON CLAW ne fait pas exception à cette règle et chaque plan concocté par Fantomas est abandonné au premier obstacle (après un quart d’heure, on ne parle même plus du microfilm apparemment indispensable au début du film). En vérité, on a plutôt l’impression d’observer des enfants qui font leur propre film et qui réalisent après quelques minutes qu’ils s’amusent bien plus à se casser la figure et se tirer dessus qu’à mémoriser des dialogues.
Il faut ainsi regarder ce film avec la même innocence et le même enthousiasme que ceux avec lesquels les acteurs abordent leurs rôles. Il faut se moquer des trous de logique, ô combien nombreux. Il faut ignorer le fait que plusieurs bobines semblent manquer à l’intrigue et que le tout n’a pas trop de sens. Une fois ceci accompli, on peut se délecter d’une œuvre sans le moindre temps mort, un film surtout plein d’humour et de détails amusants (pour la plupart, il faut l’admettre, probablement involontaires).
Ces moments amusants sont nombreux. Ainsi, Fantomas vient à Istanbul exprès pour s’occuper d’Iron Claw mais cinq minutes après, il ne sait pas qui son adversaire est supposé être. Il y a le fait que tout le monde connaît l’identité secrète de Iron Claw/Demir (il se montre aussi bien avec masque que sans) et il distribue même des cartes de visite à tour de bras. Puis, il y a l’habitude de Fantomas (et il n’y pas que lui) de ne jamais regarder son interlocuteur quand il veut avoir l’air méchant pendant une conversation (il est, après tout, Fantomas et on est supposé savoir quand il nous cause). Ensuite, essayez de repérer l’actrice qui aimerait se gratter le nez mais hésite parce qu’elle se trouve en plein milieu du cadre (on dirait presque qu’il n’y a que les mauviettes qui font une deuxième prise).
Finalement, il y a des running gags (assez sûrement involontaires) comme les bons qui tirent les méchants presque sans faute au plein milieu du visage et l’obsession malsaine de Fantomas avec les réunions. Son premier ordre du jour lors de son arrivée à Istanbul ? Organiser une réunion pour parler de la force de son organisation. A l’écouter, on dirait un vendredi après-midi au bureau.
Si on pouvait donc s’attendre à une intrigue plutôt maigre en surprises, la mise en scène de Cetin Inanc reste, quant à elle, plutôt fonctionnelle. On remarque néanmoins le désir du réalisateur d’expérimenter. Il retient particulièrement une scène « en ascenseur », pendant laquelle la caméra nous montre des bagarres à plusieurs niveaux et qui reste assez inventive. Finalement, le souci principal semble être de finir le film avec un budget minimal et dans un temps très restreint.
Ceci se voit également dans le jeu des acteurs. Physiquement, leur présence est irréprochable, avec Demir Karahan en bel héros et Nebahat Cehre en belle (à regarder, quoi). Yildirim Gencer et sa moustache turque nous donnent du macho pur et Necati Er, sous son masque, fait le méchant agréablement menaçant. Le jeu de presque tous les protagonistes demeure néanmoins assez artificiel (moins pour Necati Er, qui peut se cacher derrière son masque), la délivrance des lignes assez incertaine. On a en effet parfois l’impression qu’une première prise, imparfaite, était préférée à une deuxième prise potentielle pour gagner du temps et de l’argent.
Au final, il nous reste donc une œuvre de héros masqué turc typique, très prise au sérieux par ces créateurs, mais pleine d’humour involontaire, et qui peut séduire avec son charme et son énergie enfantine tous ceux qui sont prêts à se laisser prendre au jeu.






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Article rédigé par : Tom Flener

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