Hellbent
La logique de Paul Etheredge-Ouzts est simple à comprendre… Pour son premier film et en fan pur et dur du cinéma d’Horreur des années 70-80, il avait envie de faire un vrai slasher comme dans le bon vieux temps. Mais il s’est dit que son métrage passerait assurément inaperçu tant le genre a été exploité et usé jusqu’à la moelle. Mais Paul Etheredge-Ouzts est têtu et, son slasher, il y tient. Comme il est Américain, il sait que pour faire du profit, il suffit le plus souvent d’ajouter un concept vendeur pour réussir à refourguer du vieux. Il sait aussi que s’adresser aux minorités est aujourd’hui politiquement très correct et qu’en plus, les gens aiment bien qu’on parle d’eux ! S’inspirant des producteurs de VENDREDI 13 qui s’adressaient aux ados, Paul Etheredge-Ouzts va donc mettre au cœur de son récit les gays !
Voilà en somme, avec quelques raccourcis, comment a dû germer l’idée de créer un slasher… PD.
Comme tout bon slasher qui se respecte, la première scène se déroule dans une voiture avec deux ados en train de se bécoter avant de trépasser sous l’action d’un méchant serial killer, sauf qu’ici les ados ne sont pas hétéros… Le film ne va pas par quatre chemins pour nous mettre dans le bain.
La demi-heure suivante nous présente les héros de HELLBENT, tous de très, très beaux mecs (si, si, on peut insister… les filles vont encore être désespérées…) qui vivent en plein épanouissement leur petite particularité. Le soir venu, ils partent à une soirée d’Halloween et c’est à ce moment-là qu’ils vont chacun leur tour se retrouver confrontés au serial killer de service.
HELLBENT est assurément un produit intéressant car il fonctionne sur plusieurs niveaux. L’une des réussites de Paul Etheredge-Ouzts est, en premier lieu, d’avoir réussi à élever l’intérêt de son métrage au-dessus du simple fait que ses héros sont exclusivement gays. HELLBENT n’est jamais voyeur et n’exclut personne.
Bizarrement, il rappelle souvent CRUISING où un flic infiltrait dans les années 70-80 le milieu sordide des gays new-yorkais. On pourrait facilement le présenter comme l’antithèse du film de William Friedkin tant on a l’impression que HELLBENT cherche parfois à démonter point par point toutes les scènes glauques de CRUISING. En effet, HELLBENT éclipse complètement l’aspect pervers qui a longtemps poursuivi les homosexuels et présente ses héros sous leur plus beau jour. Ils sont beaux, ils sont drôles, ils sont cools et ils font la fête !
Evidemment, le film incarne alors parfaitement la superficialité et la misère intellectuelle de notre époque. Nos soit-disant héros sont indifférents et individualistes et l’on pourra également regretter le fascisme dont fait preuve la réalisation en ne représentant que des mecs grands, musclés et minces.
N’oublions pas qu’un film d’Horreur, par définition, doit déranger et pas brosser son public dans le sens du poil. C’est pourtant l’un des reproches que l’on pourra faire à Paul Etheredge-Ouzts. HELLBENT apparaît comme un produit purement démagogique, très mode en plus.
En ce qui concerne l’aspect Slasher de HELLBENT, l’amateur pourra s’avérer quelque peu déçu. Le psychopathe de HELLBENT n’est pas Jason et manque d’originalité. Toujours dans la pénombre, on ne fait que deviner sa belle silhouette de bodybuilder. Pour le rendre un peu effrayant malgré tout, on lui a mis deux cornes sur la tête (un peu comme pour le Chewbacca de THE WAR IN SPACE de Jun Fukuda, cf ce numéro…). Le plus décevant reste néanmoins le gore ! Où est-il passé ? Paul Etheredge-Ouzts ne sait-il pas que l’un des attraits principaux des Slashers des années 70-80 étaient le Gore ?! Ici, on a droit tout juste à quelques effets numériques pathétiques que n’importe quel infographiste qui n’a pas terminé son apprentissage pourra refaire avec un logiciel de retouche d’images !
Si l’aspect Slasher est donc relativement décevant, il n’en reste pas moins que HELLBENT sait être efficace. Les meurtres sont plutôt réussis avec quelques jolis plans et surtout un final haletant dans la chambre du héros (héhé). Mais la grande réussite de Paul Etheredge-Ouzts restera sans aucun doute ses personnages. Bien qu’inconnus (en dehors de Hank Harris, transparent dans BREAKING DAWN où il tentait en vain de séduire la belle Kelly Overton), tous jouent très bien et donnent une vraie profondeur à leurs personnages. C’est d’autant plus étonnant que dans tout bon slasher qui se respecte, on attend qu’une seule chose, que les protagonistes se fassent tuer le plus rapidement possible ! Tous s’avèrent ici attachants et on vibre pour eux lorsque le psychopathe se met à les chasser.
HELLBENT interpelle évidemment mais ne remplit pas le contrat dans tous les domaines. Il parvient à donner une image « positive » de l’homosexualité mais qui s’avère superficielle. Quant au côté slasher old school, c’est franchement décevant. Pour le reste, HELLBENT se révèle être très correct. Les personnages sont attachants, l’action rythmée et le film propose quelques bonnes scènes qui consolideront une opinion positive.