Les Anges de l’Ombre
« Ne vous êtes-vous jamais recueilli sur votre propre tombe ? » (P.249)
L’écriture classique telle qu’on la pratiquait au XIXème siècle, notamment dans le fantastique, séduit toujours les amateurs de belle langue et d’élégance. Qu’on en juge à travers LE BOUDOIR DES GORGONES ou à la lecture d’un recueil comme LE PETIT MUSEE DES HORREURS chez BOUQUINS.
Indéniablement, c’est cette voie d’un français d’antan, parfaitement maîtrisé qu’a choisie une écrivaine contemporaine comme MALAIKA MACUMI. La plupart des nouvelles vampiriques de son recueil LES ANGES DE L’OMBRE (EDITIONS LE PETIT CAVEAU) retrouvent en effet la beauté pure des grandes pages de la littérature fantastique. Hommage à DRACULA, nouvelles épistolaires, romantisme noir exacerbé, macabre et même nécrophilie (DE PROFUNDIS, dans l’atmosphère évoque un peu BLUE HOLOCAUST !), sont au sommaire de ces 13 nouvelles (dont 6 inédites).
Le classicisme de la langue de la plupart de ces textes n’empêche nullement les idées originales : achat d’un cercueil sur le net (DELIRES NOCTURNES, rare exemple d’horreur moderne et peut-être moins savoureux pour cela), errance d’un vampire sur un site de rencontres (BALTHUS), victimes d’un suceur de sang devenues autant de fantômes vengeurs (LES MARQUES DU VAMPIRE), fantasy sur fond de légendes bretonnes (LA GRAND’CHERREE), vampire cannibale (LE DEVOREUR DE TETES) ou possédé par l’esprit de l’écrivain qui fut sa proie (L’ENCRE ET LE VENIN)..
Esthétisme et décadence sont souvent dans la lignée d’une ANNE RICE, fort appréciée par l’auteure.
MALAIKA MACUMI n’hésite pas aussi à recourir à l’horreur la plus atroce : description géniale d’un zombie (AD VITAM EATERNAM), avortement cannibale qui évoque incroyablement l’une des plus célèbres scènes d’ANTHROPOPHAGOUS (en mieux), coeur arraché… Souvent les fans d’horreur pure et dure hésitent à s’intéresser de trop près au genre vampirique, qui évoque à leurs yeux fausses dents, dentelles et coupe de cristal. LES ANGES DE L’OMBRE devrait les satisfaire autant que les gothiques amateurs d’ambiance sombre mais raffinée.
Un texte comme ADAGIO POUR UN VAMPIRE, qui évoque vaguement LA MUSIQUE D’ERICH ZANN, est d’une rélle puissance poétique.
Fort d’idées un peu folles et d’une qualité d’écriture peu commune, LES ANGES DE L’OMBRE évite en grande partie l’écueil des recueils thématiques trop spécialisés, même s’il sera assurément plus agréable de le découvrir petit à petit, en lisant une nouvelle par jour par exemple. Comme on le ferait d’un bon vin.
« Je suis l’amie des chrysanthèmes et des vers, la princesse des mausolées ; j’ai le sépulcre pour amant et les étoiles pour confidentes » (P. 250)
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