Scarecrows
Les épouvantails, en dépit de leur potentiel menaçant, n’ont guère inspiré le cinéma d’horreur autrement que confinés au simple rôle de silhouette, comme par exemple dans les sept films inspirés par CHILDREN OF THE CORN de Stephen King. Peu de métrages mettent en scène ces créatures dans un rôle actif, citons le téléfilm DARK NIGHT OF THE SCARECROW de Frank DeFelitta, LA NUIT DE L’EPOUVANTAIL de Jeff Burr et, plus récemment, les trilogies DARK HARVEST et SCARECROW, cette dernière étant initiée par le français Emmanuel Itter. SCARECROWS était donc le premier long métrage destiné au cinéma où les épouvantails s’animaient pour punir quelques intrus venus violer leur territoire abandonné.
Cinq criminels kidnappent un pilote d’avion et sa fille pour fuir jusqu’au Mexique mais l’un d’eux décide de fuir et saute en parachute avec l’argent. Décidé à le retrouver, ses anciens complices forcent l’avion à se poser. Mais ils ne tardent pas à tomber sur une étrange ferme désertée gardée par des épouvantails menaçants.
Ecrit, produit et réalisé par William Wesley, un inconnu qui ne réalisa plus, par la suite (et bien plus tard) que le film de morts vivants ROUTE 666, ce métrage a acquit, au fil du temps, une bonne réputation parmi les fans d’horreur au point qu’un semblant de culte lui est aujourd’hui voué aux USA. Cependant, la vision de ce titre devenu quasi mythique ne peut que décevoir le spectateur: même si SCARECROWS s’avère sympathique, nous sommes loin d’une grande réussite.
Le rythme général, tout, d’abord, se révèle bien lent. Certes, William Wesley cherche à bâtir une atmosphère mais, malheureusement, on ne peut pas dire que cela fonctionne parfaitement. Le manque de budget et le talent tout relatif des acteurs ruine en partie le métrage qu’il convient d’ailleurs impérativement de visionner en anglais, la version doublée en français étant proprement insupportable et totalement dénuée de la moindre intonation ou implication. Un autre problème de ce SCARECROWS est que tout se déroule durant la nuit et, par conséquent, le spectateur devra deviner les événements plutôt que les voir réellement, en dépit d’une photographie nocturne plutôt soignée et convaincante. Celle-ci est signée Peter Dening et apporte heureusement un certain cachet à l’ensemble. Le bonhomme était alors débutant (même si il avait travaillé sur EVIL DEAD 2) mais il devait par la suite se retrouver sur des budgets bien plus conséquents comme FROM HELL ou LOST HIGHWAY.
Quant à l’intrigue, elle est bien mince. La malédiction qui accable les lieux ne sera de toutes façons jamais explicitées. L’insistance du cinéaste à nous montrer une photographie accablante nous fera malgré tout comprendre que les trois frères (des inconnus, évidemment…hum!) fermiers, les Fowler, sont devenus des épouvantails malfaisants. Pourquoi? Mystère! D’autant que la hantise qui habite les lieux n’est pas vraiment révélée, elle non plus, même si on en constate les conséquences sur divers machines et autres pompes à eaux soudain animés d’une vie propre. La suite de l’intrigue prend rapidement la voie des meilleurs classiques du genre, que ce soit LA NUIT DES MORTS VIVANTS ou EVIL DEAD en présentant un petit groupe qui va rapidement voler en éclat sous l’irruption du surnaturel.
La suite du de ce SCARECROWS ne sera donc jamais vraiment surprenantes, les épouvantails se contentant de tuer un par un tous les membres du groupe. Au niveau des scènes gore, qui valurent à ce titre une partie de sa réputation, disons qu’elles ne sont pas mauvaises. Elles sont relativement originales, inventives et impressionnantes, même si les effets spéciaux sont parfois un peu limite. Pour un métrage à tout petit budget de 1988, William Wesley n’a pas à rougir de ses effets de maquillages. Maintenant, à l’heure de SAW 3, LA COLLINE A DES YEUX et HOSTEL, sans doute que le public, blasé, ne se formalisera plus pour la quantité de sang versé puisqu’il a vu bien pire.
Si le look des épouvantails peut sembler effrayant (le réalisateur évitant le ridicule), la tension n’est jamais vraiment palpable et le suspense est minimal. Vu la caractérisation sommaire des personnages (tous sont peu recommandables, exceptés les deux otages), le spectateur comprend vite qui restera vivant à la fin. Beaucoup de passages un peu stupides et de redites viennent, en outre, gâcher le plaisir d’un public qui aura sans doute rapidement l’impression d’avoir effectué le tour complet des possibilités d’un métrage fort répétitif.
Les seules surprises résident donc dans la manière dont vont mourir les différents protagonistes. SCARECROWS adopte donc un schéma très classique de slasher / survival même si les agresseurs sont, pour une fois, des êtres surnaturels. Rien de franchement motivant. En dépit de sa bonne réputation et d’une certaine classe.
SCARECROWS n’a pas vraiment de début, ni de progression, ni de conclusion et, finalement, donne plutôt l’impression d’une tranche d’horreur servie bien saignante à la manière des Contes de la Crypte. A la différence que la durée avoisine ici les 80 minutes. Sans doute est-ce là bien long mais les scènes gore, plutôt inventives et réussies, suffisent à en justifier la vision auprès des amateurs.