The Naked Weapon
Un homme d’affaires, malgré la protection de ses gardes du corps, se fait tuer. Après enquète, La police découvre alors l’existence des « China Dolls ». Mais, qui sont ses fameuses « China Dolls » ?
Réalisateur des illustres HISTOIRES DE FANTÔMES CHINOIS qu’on avait un peu oubliées depuis, Siu-Tung Ching prouve qu’il ne possède pas le sens de la demi-mesure.
Commençant comme un thriller influencé par NIKITA, le film se poursuit en rappellant fortement BATTLE ROYALE. On assiste au recrutement d’orphelines qui se voient réunies sur une île. Elles ont comme ordre de s’entretuer jusqu’à la dernière. Celle-ci se verra alors intronisée la meilleure des tueuses par leur matrone très retorse. Cette partie du métrage fait preuve d’un sadisme surprenant et on a souvent l’impression de voir un film de woman in prison qui oriente souvent le film vers un public plus averti alors que la teneur de l’humour et de la romance qui règnent sur l’ensemble du métrage l’auraient a priori destiné à un large public, même si la violence est esquissée dans le titre (le weapon) et sur l’affiche (les armes blanches tenues par deux des héroïnes). C’est d’autant plus surprenant de la part de ce réalisateur dont on ne s’attendait pas à ce degré de violence psychologique. Il faut voir les mille et un moyens qu’emploie la patronne pour faire vivre à ses prisonnières un véritable enfer psychologique, les poussant à tuer leurs propres amies. Pour elle, tous les moyens sont bons pour leur faire ressentir une haine des plus profondes.
D’une certaine manière, le film pourrait aussi se voir en une sorte de préquelle à CHARLIE’S ANGELS (autant la série que les films) dans le sens où nous voyons ici la formation de ce trio de tueuses. Il faut bien avouer que ce genre d’origine manque cruellement à la bande de Charlie (toujours esquissée lors du fameux générique). Toutefois, on concède que les tortures endurées éloignent ces tueuses de leurs modèles américaines.
On sent que le réalisateur pioche un peu partout pour étoffer son histoire : de BATTLE ROYALE donc, on passe par THE KILLER (un contrat des tueuses donne lieu à une scène quasi-similaire au film de John Woo) puis par MATRIX. Certaines intrigues ont, dès lors, beaucoup de mal à s’imbriquer à l’ensemble, comme, par exemple, la love-story entre l’une des tueuses et l’agent du FBI. Pour le coup, cette fille finit par être plus étoffée que les autres, devenues alors simple faire-valoir. Cette histoire-là donne naissance à des scènes de comique assez ridicules et détonne à côté de scènes plus violentes.
Le développement des personnages s’en retrouve malmené. Là réside en fait le principal problème du film : THE NAKED WEAPON aligne un traitement de comédie, or les films auxquels il fait référence sont dramatiques. La psychologie des personnages aurait mérité d’être plus fouillée mais le réalisateur se contente du mininum syndical nécessaire pour que l’on ressente de l’empathie à leur égard. La mort d’un personnage est traité suffisamment correctement pour que l’on comprenne le sentiment de vengeance éprouvé par le témoin. D’un autre côté, les relations des protagonistes ont été trop sommairement définies, ou plutôt, trop rapidement traitées. D’où le sentiment d’avoir d’un côté une héroïne et ses deux acolytes alors que la mythologie dépeinte dans le film (celle des « china dolls ») aurait tendance à les mettre sur un pied d’égalité. En résulte un sentiment de confusion ; on est tenté de rire par l’emphase causée par la mort du personnage alors que celle-ci exprime une souffrance bien réellement vécue.
Les principaux intérêts attractifs du film demeurent les charmes déployés par le trio qui n’en manque pas et les combats. Il faut bien avouer que sont les aspects les mieux traités du film.
Les fans de cinéma d’art martiaux seront aux anges car ce sont lors de ces scènes que le réalisateur s’épanouit le plus, au point de frôler le ridicule par moment, ce qui irritera les réfractaires au combat câblés. On en vient à se demander si ce réalisateur ne pourrait pas demander à prendre la direction de quelques films de super-héros tel qu’un DRAGON BALL Z ou un SUPERMAN. Le film nous offre tout de même cette scène dans laquelle Charlène (le personnage principal) combat le badguy sans toucher le sol pendant quelques secondes, courtes mais perceptibles. On se croirait dans l’adaptation d’un manga animé.
Enfin, on serait tenté de rapprocher THE NAKED WEAPON de HISTOIRE DE FANTOMES CHINOIS principalement en raison de la mystification des personnages à laquelle on assiste : les « china dolls » apparaissent comme une sorte de légende urbaine à laquelle seul l’agent du FBI semble croire. Légende urbaine qui peut se percevoir comme le pendant mythologique des fantômes chinois de son film antérieur. Cette marginalisation de ses tueuses permet au réalisateur de traiter ses héroînes (ou plutot, son héroîne) en tant que super-héroîne, excusant d’office le déploiement pyrotechnique du combat final fortement influencé par MATRIX. Ce n’est pas dérangeant en soi, c’est même souvent jubilatoire, mais les instants où les personnages prennent des poses avant de combattre (deux ou trois en particulier) peuvent nous faire lâcher quelques rires en raison de leur absence de justification.
Malgré ce bémol d’hétéroclicité sans cohérence, on ne s’ennuit pas un seul instant, le film ressemblant à un melting-pot. Le cocktail n’est pas nouveau (action, charme, humour, romance) mais est toujours détonnant. Tout dans la démesure, ce qui aurait sûrement le don d’agacer comme de charmer. Le film devient idéal pour le programme d’une soirée entre potes et ses combats nous prouvent une nouvelle fois qu’en matière d’art martiaux, un film hong-kongais mineur peut toujours s’avérer supérieur à la majorité des blockbuster hollywoodiens.