Une femme spéciale
Très actif dans les années 1970, le réalisateur Jean-Michel Pallardy a construit une œuvre légère et intensément sexuels, au sein de laquelle la femme tient le beau rôle. S’il n’a pas réalisé que des films érotiques (cf LE RICAIN ou encore WHITE FIRE), c’est dans ce genre particulier qu’il s’est illustré avec le plus d’aisance.
Ecrit sur-mesure pour la sexy Karin Schubert alors starlette de série B pour ne pas dire de film bis (et ce, après avoir démarré chez Gérard Oury entre De Funès et Montand dans LA FOLIE DES GRANDEURS et avant de sombrer dans le porno au milieu des années 80), UNE FEMME SPECIALE reflète parfaitement l’esprit Pallardy.
Yasmine, jolie quadra au visage d’ange, est passeuse de cannabis pour son mari, un oisif parrain à la petite semaine. Pour la tenir, celui-ci la drogue sans aucun scrupule. Mais alors qu’elle s’apprête à convoyer de l’héroïne pour lui, elle se rend compte qu’il la trompe avec une autre femme et jette la marchandise par vengeance. Paumée, poursuivie par son mari et ses commanditaires, Yasmine trouve son salut en rencontrant un sympathique pêcheur qui va tout faire pour la sortir de cette situation.
Aborder un sujet sombre avec légèreté tout en ménageant une intrigue de polar est à la fois la force et la faiblesse d’UNE FEMME SPECIALE. Force, car cela permet à Karin Schubert de jouer de tout son savoir-faire pour dévorer l’écran et composer un personnage inoubliable. Faiblesse, car les trop nombreuses ruptures de ton décalent violemment le film vers l’outrance et la caricature. Toujours à cheval sur deux tons, Pallardy réalise ici non pas un western mais un film aérien où le naïf et le bucolique le dispute à une violence tellement outrancière qu’elle en devient drôle, notamment par ses combats et bruitages dignes d’un polar turque de l’époque. Pour autant, le film se regarde sans ennui et ce, pas seulement grâce aux scènes de sexe qui le ponctuent à intervalles réguliers. En effet, le scénario esquisse la rédemption d’une femme qui va quitter l’enfer de la dépendance dans lequel elle est plongée grâce à l’amour et par extension, grâce au sexe (voir ainsi l’excellente séquence où Yasmine fini par fracasser rageusement sa seringue). Poétique et torride, cet hymne à Karin Schubert où l’on croise également le vétéran des « gueules du B » Gordon Mitchell, n’est pas exempt de défauts, mais ceux-ci tiennent plus de la maladresse et apportent un capital sympathie au film. Il faut ainsi du temps pour se faire à la post-synchronisation et aux voix dont le sérieux imperturbable et la diction façon commentaire animaliers provoquent une hilarité malvenue, tout comme la morale du film qui voit Yasmine se réaliser comme femme au foyer, trop heureuse de faire tourner son nouveau ménage.
Las, les formes de Karin Schubert, la sincérité de Pallardy (qui se défend comme il le peut dans le rôle masculin principal) et l’indéboulonnable optimisme du métrage font de cette FEMME SPECIALE une curiosité à découvrir.