Le Manoir des fantasmes (1974) – perle noire post-Hammer
Le Manoir des fantasmes bénéficie d’un superbe scénario, admirable alchimie entre le film de maison hantée et le psycho thriller.
Riche, mais seul, Andrew Marr décède dans un hôpital psychiatrique. À ses côtés, Edward Foster recueille ses dernières volontés : il doit prendre en charge l’ancestrale demeure familiale en attendant le retour des enfants qui ne manqueront pas de revenir récupérer le magot caché quelque part derrière l’un des innombrables murs que comporte le manoir. Foster se met en route et découvre que la maison n’est peut-être pas aussi inhabitée qu’elle en a l’air.
Old Dark House
Tous les ingrédients du film d’épouvante se sont donné rendez-vous dans la vieille maison : apparitions fantomatiques, objets qui se déplacent inexplicablement, découverte depuis la maison voisine de lumières qui s’allument dans des chambres la nuit sans explication…
Musique peu rassurante, décors inquiétants (ah, ces vieux chevaux à bascule dissimulés sous une bâche en plastique transparent poussiéreuse…), Le Manoir des fantasmes est un film qui s’inscrit dans la pure tradition anglaise de l’horreur gothique.
Bien sûr, en 1974, le film de Don Sharp paraît sacrément en inadéquation avec les standards de l’époque que sont des films comme La Dernière Maison sur la gauche (1972) ou Massacre à la Tronçonneuse (1974). Cette incongruité explique probablement pourquoi le film est tombé dans l’oubli. Aujourd’hui, détaché des conventions de la mode, Le Manoir des fantasmes peut être apprécié à sa juste valeur. Le film permet également de se rendre compte de la maîtrise de son réalisateur qui a su mettre agréablement en images un scénario riche en faux-semblants.
Sur les traces du psycho thriller
Parce que Le Manoir des fantasmes ne se contente pas d’alimenter la filmographie des films de fantômes… En effet, lorsque Foster découvre que certaines personnes au village ont été mises au jus et sont donc au courant de l’existence d’un magot, le film commence à cultiver un sujet plus complexe. Dès lors, le passé d’Andrew Marr se dévoile au rythme des actions menées par les protagonistes tournant autour de Foster, certainement pas aussi désintéressés qu’ils aimeraient le laisser croire…
L’avocat Prescott (Herbert Lom) semble indifférent aux intrigues qui se trament. Est-il un soutien non négligeable pour Foster ou cache-t-il des intentions moins louables ? Les choses sont plus claires en ce qui concerne le médecin du village, Mandeville (Christopher Lee). Dénué de tout scrupule, le praticien n’hésite pas à envoyer sa sœur (Joan Collins), avec laquelle il entretient des relations troubles, dans le lit de Foster (Robert Hardy). Foster, quant à lui, commence à subir d’étranges visions dans lesquelles apparaît la gouvernante des Marr (Jane Birkin)…
Un mystère bien entretenu
C’est le moment où Foster commence à souffrir d’hallucinations de plus en plus inquiétantes, au point de mettre en danger son équilibre psychologique. Est-il victime d’une sombre machination comme tant de héros de films de l’époque ? Ou bien les fantômes s’acharnent-ils vraiment à lui jouer de mauvais tours dans cette maison poussiéreuse où les vieilles toiles d’araignées côtoient des jouets d’enfants brisés qui n’augurent rien de bon ?
Quoi qu’il en soit, la belle brochette d’acteurs réunis dans ce petit film fantastique assure une interprétation de qualité. La palme revenant à Robert Hardy, le Cornelius Fudge des Harry Potter, qui incarne ici carrément deux rôles…
Après une révélation surprenante et sombre, le final cruel, plein de cadavres et ponctué d’un humour noir typiquement british, ne donnera pas toutes les réponses. Ainsi, une explication fantastique pour justifier une partie des étranges événements qui ont rythmé l’enquête de Foster reste possible, pour notre plus grand plaisir.