Mutant de John Cardos
Mutant ou La Nuit des mutants est une vraie série B fauchée qui compense le manque de budget par une ambiance mêlant fantastique et science-fiction pour offrir un spectacle généreux à ses spectateurs.
Deux frères de la ville descendent dans le sud des États-Unis à l’occasion de congés qu’ils s’offrent. Cependant, ils vont très vite se rendre compte que leur choix de lieu de villégiature n’était pas bon. Entre les rednecks peu accueillants, les créatures mystérieuses hantant la ville et des morts encore plus mystérieuses, les deux frères vont regretter d’avoir quitté leur petite ville.
John Bud Carlos débute sa carrière comme cascadeur et assistant-réalisateur, notamment sur la Horde sauvage, avant de passer à la réalisation. Son film le plus connu reste L’Horrible Invasion avec William Shatner. N’oubliant pas ses débuts au cinéma, il est avant tout un artisan qui sait non seulement comment offrir de bonnes cascades en dépit d’un budget réduit, mais surtout qui sait tenir en haleine le spectateur.
Un film d’exploitation généreux
En effet, Mutant ne dispose sans doute pas d’une écriture soignée, il y a quelques raccourcis et facilités notamment qui pourront surprendre, cependant, le rythme devient de plus en plus effréné, l’humour vient ponctuer les scènes d’action et les visions infernales. Le film lorgne sur la science-fiction autant que le fantastique et offre au spectateur un final explosif et jouissif. C’est en définitive une série B généreuse qui réutilise les codes des genres qu’elle balaye.
S’il y a bien un côté science-fiction, avec une histoire de déchets chimiques transformant les habitants d’une petite ville, il y a également un aspect fantastique tant dans la brume l’enveloppant et la transformant peu à peu en ville fantôme, mais surtout, il y a l’apparence des contaminés qui font tout autant penser aux spectres de Carnival of Soul ou aux vampires de Murnau qu’aux premiers zombies de George Romero. D’ailleurs, le titre La Nuit des mutants que porte également le film n’est pas sans faire penser à La Nuit des morts-vivants, citée plusieurs fois en référence dans le film, notamment dans son final.
Le soin apporté aux maquillages et au son est à saluer. En dépit d’un budget vraiment minime, qu’on perçoit essentiellement dans les décors mais aussi dans la photographie du film qui n’est pas forcément linéaire pendant tout le film, il parvient néanmoins à offrir un récit dense, des scènes d’action intenses et surtout, une vraie atmosphère. De même, si l’écriture n’est pas des plus fines, elle a le mérite de poser des personnages intéressants et charismatiques, du jeune citadin égoïste et charmeur qui va se transformer en héros au shérif alcoolique se rachetant une rédemption, le film se montre même féministe en montrant des personnages féminins forts qui ne se laissent pas facilement faire.
Qui s’inscrit dans une lignée de films devenus cultes
Enfin, il y a aussi ce que le film raconte du sud. Entre le bar décoré de drapeaux ségrégationnistes, le groupe de rednecks aussi bêtes que méchants qui s’avèrent parfois tout aussi dangereux que les contaminés, le film dépeint quelque chose sur ce sud profond coincé dans une espèce de bulle temporelle. Loins de tout, les habitants doivent se débrouiller seuls avec leurs problèmes et se retrouvent la cible d’une entreprise chimique peu scrupuleuse.
On notera quelques morceaux de bravoure, une séquence dans les sous-sols d’une école qui nous plonge progressivement dans une atmosphère digne d’un Zedder ou d’un Démons de Lamberto Bava, un final lorgnant vers le cinéma de John Carpenter, ou encore la manière dont le film infuse progressivement ses contaminations, offrant une conclusion presque aussi glaçante que celle du Retour des morts-vivants. Une série B bien plus maligne qu’il n’y paraît.