Un texte signé Sophie Schweitzer


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The Assassin

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The assassin de Hsiao-Hsien Hou

Nie Yinniang est une tueuse à gage œuvrant pour la caste des assassins. Brillante sur le plan technique, en revanche, elle hésite à tuer un homme sous les yeux de son fils. Cette hésitation impardonnable lui vaut le courroux de son maître qui lui ordonne d’aller tuer son cousin afin de s’endurcir. Mais une fois sur place, retrouvant sa famille qu’elle a due quitter des années auparavant, des sentiments resurgissent compliquant la tâche de la jeune femme. Elle se retrouve face à un cruel dilemme, tuer l’homme qu’elle aimait et qui continue de faire battre son cœur et donc désobéir à son maître, qui l’a recueillie et élevée, ou bien achever sa formation et accomplir l’ordre qu’on lui a donné.

C’est tout le cheminement mental de cette héroïne de l’ombre qui, telle la figure du héros solitaire (parfois sans nom comme dans la trilogie du dollar de Sergio Leone) sans attache, se retrouve face à ses sentiments. La rancœur d’avoir été abandonnée, confrontée à ce qui lui a été refusé (l’amour de son cousin qui vit désormais avec une autre femme) entrant en collision avec son statut d’assassin, qui au fond est tout ce qu’elle possède et tout ce qui la définit. Pourtant cette fonction même qui lui donne une certaine puissance (le pouvoir de tuer, de vaincre ses ennemis, d’être invisible telle une ombre) est également une prison. Le film touche, dans sa thématique mais aussi par le choix de son époque, au phénomène des castes et à la manière dont la société emprisonne les individus et tout particulièrement les femmes. En effet, THE ASSASSIN est le parcours d’une femme qui devra lutter afin de choisir sa propre voie, loin des attentes de sa famille et de celles de son maître.

Comme beaucoup de métrages asiatiques de qualité, THE ASSASSIN prend son temps. Il est de ces films qui hypnotisent, mais pour cela, demandent une certaine dévotion de la part du public. D’autant que la narration ciselée est difficile à appréhender. Toutes les cartes ne sont pas dévoilées immédiatement même si, au bout de trente minutes, on finit par comprendre. L’histoire de la jeune femme assassin est celle d’une enfant sacrifiée dans une Chine féodale (d’ailleurs les codes de celle-ci ne sont pas forcément donnés et demandent au spectateur un effort d’attention supplémentaire), mais aussi du destin attendu d’une femme, à savoir le sacrifice.
THE ASSASSIN est avant tout un film de sabres chinois qui est dans la droite lignée des grands films appartenant à ce genre comme LA LÉGENDE DES POIGNARDS VOLANTS. Étrangement, THE ASSASSIN fait plutôt penser aux films de King Hu, maître du genre dans les années 60. D’une part par sa ressemblance avec les films de Sergio Leone, dont DRAGON INN de King Hu s’inspirait déjà dans sa fresque féodale pleine d’humour et d’ironie, mais aussi par ce portrait de femme forte au sein d’un film à l’esthétique léchée dans lequel les scènes de combat sont raréfiées afin d’être magnifiées comme l’accomplissement de quelque chose.
L’influence de King Hu se ressent dans la beauté du métrage. A TOUCH OF ZEN associait une image sublime à un film de sabres chinois. THE ASSASSIN possède une vraie qualité esthétique. Éclairées à la bougie, les soieries font naître des reflets de couleurs incroyables où le rouge, l’or et le violet se mêlent dans une richesse de couleurs qui n’a rien à envier aux films de King Hu.
Au-delà de l’image, il y a aussi la thématique. A TOUCH OF ZEN racontait l’histoire d’une jeune femme qui, ayant passé sa vie à fuir, trouve refuge auprès de moines guerriers. Le parallèle se tisse donc à la perfection entre les deux films. Et THE ASSASSIN par son image sublime et sa manière subtile de raconter l’histoire d’une femme se libérant des obligations de la société, de son maître et de sa famille, est indéniablement un très beau film, accompagné d’une musique assez éblouissante. Il a une grâce hypnotique et une beauté enchanteresse qui valent le coup d’œil.
En revanche, de par sa lenteur et l’aspect cryptique de sa narration, il n’est cependant pas à mettre devant tous les yeux, du moins, pas sans une certaine préparation. C’est sans doute là que le bât blesse. Le film n’est pas aisément abordable et déplaira sans doute à une grande partie du public du fait de sa lenteur et de sa difficulté à tout de suite emporter le spectateur. Personnellement j’ai eu du mal surtout avec le début en noir et blanc, et d’ailleurs je ne pense pas que ce choix est si judicieux. Le film n’en reste pas moins très beau, méritant les récompenses qu’il a reçues.






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Article rédigé par : Sophie Schweitzer

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