Un texte signé Faye Fanel

USA - 1974 - Tobe Hooper
Titres alternatifs : The Texas Chain Saw Massacre
Interprètes : Marilyn Burns, Gunnar Hansen, Edwin Neal, Allen Danziger


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retrospective

Massacre à la tronçonneuse (1974) – L’horreur naturaliste

Au début des années 70, Tobe Hooper est un jeune étudiant en cinéma. Il assiste d’autres réalisateurs et filme des documentaires. Son travail personnel se limite à un métrage expérimental. Inspiré par le contexte culturel et politique de l’époque et sa violence, Hooper imagine une famille de tueurs. Son but premier est de gagner de l’argent avec un petit film d’exploitation. Cependant, Massacre à la tronçonneuse s’est révélé bien plus profond qu’il n’y paraît et continue d’influencer de nombreuses œuvres de la pop culture aujourd’hui.

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Inspiré de faits réels

Le long métrage commence par un monologue indiquant que cette histoire est basée sur des faits réels. L’introduction renforce cette idée en précisant que les personnages ont réellement vécu ces événements. La note d’intention est claire, Massacre à la tronçonneuse est un témoignage de la réalité. Tout comme pour le film Terreur sur la ville, le réalisateur choisit de raconter cette histoire sordide sous la forme d’un docu-fiction.

Pour cela, Hooper reprend les codes du documentaire naturaliste, plaçant sa caméra au plus près des personnages et de l’action. Il installe le spectateur dans la position de l’observateur impuissant face à l’horreur qui se joue sous ses yeux, à l’instar d’un documentaire animalier. Le réalisateur n’hésite pas à faire appel à la peinture en proposant des compositions de nature morte. Ces plans servent à replacer constamment les personnages dans l’espace tout en soulignant la menace de la mort qui plane sur eux.

Enfin, Hooper utilise une photographie très réaliste pour donner une tonalité naturelle à la pellicule. Rien n’est exagéré, le film doit retranscrire au mieux l’ambiance réaliste afin de témoigner des faits.

Ce parti pris rend les scènes de violence beaucoup plus impressionnantes et viscérales. Leatherface n’est pas une entité diabolique, mais un homme. Pour donner vie au personnage et à sa famille, Hooper prend modèle sur Ed Gein, un célèbre tueur qui a également inspiré Alfred Hitchcock pour Psychose et le tueur du Silence des agneaux.

Pourtant, comme nous pouvons le découvrir dans le comics d’Éric Powell et Harold Schechter, Gein était un homme victime de mauvais traitements et ayant eu une relation toxique avec sa mère. Au départ, il n’avait rien de diabolique. Il n’est que le produit d’un contexte familial violent et de la dure réalité de la vie.

Il en va de même avec Leatherface. Dans sa façon de se déplacer, le public comprend qu’il s’agit d’une personne ayant un handicap mental, maltraitée par une famille de cannibales. Il y a quelque chose de presque enfantin qui émane du personnage, notamment lors des gros plans sur son visage masqué. Cependant, il agit comme un animal bondissant de sa cachette lorsque quelqu’un s’introduit sur son territoire.
Voir un être humain poussé à de telles extrémités pour survivre est bien plus effrayant qu’une créature surnaturelle. En ce sens, le film est précurseur d’Halloween de John Carpenter, qui présente le mal absolu à la fois comme quelque chose d’externe et propre à la nature humaine.
Le spectateur se demande s’il serait capable de commettre des actes aussi horribles pour sa propre survie. La force du long métrage réside dans son côté perturbant, accentué par le travail sur le son. Pas de musique, mais une utilisation de sons métalliques et mécaniques qui exacerbent l’horreur lorsqu’ils se mêlent aux hurlements des personnages.

Ce souci de réalisme fait de Massacre à la tronçonneuse un film terrifiant, qui a été longtemps interdit dans de nombreux pays.

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Un instantané des États-Unis des années 70

Massacre à la tronçonneuse n’est pas seulement un simple film d’horreur, c’est aussi une critique de la société américaine. Dans les années 70, l’Amérique a été marquée par de nombreux événements traumatisants qui ont ébranlé la confiance du peuple envers son gouvernement. La guerre du Vietnam et le scandale du Watergate ont ainsi laissé des cicatrices profondes dans le cœur des Américains. Des divisions sont apparues entre les classes sociales, la modernité s’oppose à la tradition, la jeunesse face à l’ancienne génération et enfin les villes écrasent la campagne. Hooper utilise alors l’horreur pour mettre en lumière toutes ses tensions en livrant un instantané de son époque.

La scène de l’auto-stoppeur en est un exemple frappant. Des jeunes gens prennent un homme en stop dans leur camionnette. Dès le premier regard sur son apparence campagnarde, les citadins le jugent rapidement comme étant peu recommandable. Cependant, Franck, le personnage en fauteuil roulant, engage une discussion avec ce mystérieux protagoniste sur l’évolution des techniques d’abattage des animaux. Il s’émerveille de l’utilisation de machines plus rapides et plus humaines pour tuer les animaux. Mais il adopte une attitude condescendante envers le passager qui évoque les pertes d’emplois subies par sa famille à cause de la modernité. Le réalisateur renforce cet échange en alternant des plans d’abattoirs et d’animaux tristes et sales.

Pendant que les grandes villes s’enrichissent, les régions plus modestes attachées aux anciennes traditions luttent pour survivre. Encore une fois, l’auto-stoppeur illustre cette réalité en tentant de vendre au groupe la photo qu’il vient de prendre. On peut également observer ce désespoir lors de la scène du cimetière avec un homme ivre et désillusionné. Les jeunes ont peur de lui, mais le spectateur comprend le contexte difficile de cette région du Texas, d’où le réalisateur est originaire.

Le peuple est à la fois déprimé et en colère. Franck incarne ce sentiment. Il ne supporte pas d’être en fauteuil roulant. Il a l’impression d’être un fardeau pour les autres et de ne pas être considéré. À travers ce personnage en situation de handicap, Hooper aborde le traumatisme de la guerre du Vietnam et le traitement réservé aux vétérans. Après avoir vécu l’horreur, ils sont rentrés dans un pays qui ne voulait plus d’eux et qui les a complètement abandonnés. Il y a une grande colère et beaucoup de ressentiment de leur part. Toute cette rage est parfaitement exprimée dans la dernière scène où Leatherface danse en agitant sa tronçonneuse, comme pour évacuer sa colère et sa frustration. Massacre à la tronçonneuse est donc l’illustration d’un pays désabusé qui ne sait plus vers qui se tourner.

Dans le livre accompagnant l’édition Blu-ray, Une expérience américaine du Chaos, Jean-Baptiste Thoret compare le film à l’œuvre du peintre Edward Hopper. Il a utilisé le réalisme et la nature morte pour dépeindre son pays durant la crise de 29. “D’un Hopper à l’autre”, le rêve américain n’est toujours qu’une illusion. Un propos qui trouve encore de nos jours un écho.





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TEST DU BLU-RAY/DVD :



Carlotta propose une magnifique édition pour accompagner le film culte, riche en informations et analyses. Le long métrage est magnifique que ce soit dans l'image et le son. Un très beau travail.

Les points positifs :

- Une belle restauration
- Beaucoup de bonus
- Un livre de Jean-Baptiste Thoret

Les points négatifs

- Un menu trop simple


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Article rédigé par : Faye Fanel

Ses films préférés : Chantons sous la pluie, The Thing, La maison du diable, Evil Dead 2, Fire walk with me... Ses auteurs préférés - JRR Tolkien, Stephen King, Amélie Nothomb, Lovecraft, Agatha Christie... J’adore le cinéma d’horreur et parler de mes nombreuses passions dans mes podcasts sur James & Faye ainsi que sur le site Les Réfracteurs.


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