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Val Lewton, Nancy Drew, Ulli Lommel, Flower and Snake, Leprechaun, Patrice Herr Sang, Marian Dora.

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Gamera – Gardien de l’univers (1996) – Le retour du héros

Un texte signé Faye Fanel

Nationalité
Japon
Année de production

1996
Réalisation

Shusuke Kaneko
Titres alternatifs

Gamera: Daikaijū Kuchu Kessen, Gamera: The Guardian of the Universe
Interprètes

Tsuyoshi Ihara, Shinobu Nakayama, Ayako Fujitani

L’arrivée de Godzilla en 1954 a profondément marqué la culture japonaise et son cinéma. De nombreux studios ont tenté de rivaliser avec le Kaiju, sans succès. Pourtant, un monstre est parvenu à se démarquer : Gamera. Né en 1965 dans une production du studio Daiei, le parcours de la tortue volante reste chaotique. À la fin des années 60, la Daiei traverse une crise, fragilisée par le contexte économique et des problèmes de gestion. Malgré cela, le studio parvient à produire un film Gamera par an, avec un petit budget, jusqu’à sa fermeture en 1971. Dans les années 80, d’anciens employés relancent la Daiei avec le soutien d’un grand groupe. Gamera fait son retour en 1989, mais la mauvaise qualité du film le renvoie rapidement dans l’oubli. Il faudra attendre 1995 pour le voir revenir avec succès sur les écrans.

Gamera Gardien de l'univers 05

Une équipe de passionnés

Pour ressusciter le Kaiju, la Daiei réunit des fans de Godzilla, Certains ont même travaillé sur la licence. Shusuke Kaneko hérite de la réalisation. Il rêve de tourner un Godzilla, mais la Toho rejette sa candidature à cause de son passé dans les films érotiques : une aubaine pour la Daiei. Pour accompagner le metteur en scène, on trouve deux autres figures importantes. Le scénariste Kazunori Itô, célèbre pour son travail avec Mamoru Oshii, notamment sur Ghost in the Shell et au sein de l’équipe artistique, Shinji Higuchi. Il commence sa carrière sur Godzilla et développe par la suite une belle réputation dans le monde des effets spéciaux. Le public le connaît surtout comme co-créateur du studio d’animation Gainax et pour le succès de Nadia, le secret de l’eau bleue. En 1995, il participe à Neon Genesis Evangelion. L’esthétique de l’animé et celle du film partagent des thématiques et un design de créatures proches. L’équipe souhaite proposer une œuvre plus sombre en s’éloignant du film pour enfant pour séduire un nouveau public.

Gamera Gardien de l'univers 02

Un poids lourd à porter

Dans Gamera – Gardien de l’univers, on suit une scientifique, un militaire et une adolescente. Le Japon subit l’attaque d’étranges oiseaux, les Gyaos. Tandis qu’ils tentent de comprendre leurs origines, une autre créature surgit : Gamera. Elle pourrait bien représenter l’ultime espoir face à la menace.

Les années 90 marquent un tournant pour le Japon. Le pays sort d’une grande crise et se tourne vers l’avenir en misant sur le nucléaire, la technologie et la jeunesse. Pourtant, le spectre de Hiroshima plane toujours, suscitant l’angoisse, notamment chez les plus anciens. Les films de Kaiju sont souvent le reflet de ces inquiétudes. Celles-ci sont traitées via le prisme de la mythologie et de la religion comme un exutoire, mais surtout pour faire la morale. Les Kaiju incarnent ces sentiments.

Dès son apparition, Gamera est iconisé établissant ainsi son aura divine. Le spectateur perçoit immédiatement sa puissance sans pour autant la voir. On ressent l’influence du cinéma de Spielberg et plus précisément de Jurassic Park dans cette mise en scène. La révélation de Gamera rappelle celle du T-rex, faite au fur et à mesure : des empreintes sont trouvées, des informations révélées par des lignes de dialogue, on entraperçoit la créature avant qu’elle n’entre réellement dans la lumière. Cela permet de prendre conscience de la fragilité de l’humanité face à ce titan. Même procédé pour les Gyaos : une simple analyse d’excréments suffit à en comprendre la dangerosité. Lors de leur première attaque, la scène reste suggérée par un montage cut et un plan subjectif, mais l’ampleur des dégâts et l’impuissance des humains marquent les esprits. Les personnages comprennent que ces oiseaux symbolisent une histoire qui se répète : celle d’une humanité autodestructrice et aveuglée par la cupidité.

Contrairement à Godzilla, Gamera n’est pas un dieu punitif, Il est là pour réparer les erreurs de l’humanité. Il pousse les protagonistes à s’interroger sur leurs actions et choisit pour intermédiaire, une adolescente en lui confiant un Magatama, un objet sacré lui conférant ainsi le rôle de prêtresse. Asagi représente l’espoir, celui d’utiliser la connaissance du passé pour guider l’humanité avec sagesse au travers de Gamera. Le message est lourd de sens, la jeunesse doit faire mieux que ses aînées.

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Le pouvoir du déni

Gamera – Gardien de l’univers critique ouvertement le gouvernement, tant par le scénario que la mise en scène. Les autorités politiques et militaires sont paralysées, enfermées dans des procédures bureaucratiques. Elles refusent d’agir, incapables de prendre des décisions rapides. Ceux qui osent intervenir sont punis pour avoir agi sans autorisation. Ce fonctionnement absurde provoque des morts inutiles. Kaneko accentue cette critique par des zooms exagérés dès qu’un ordre est donné, soulignant l’absurdité du système.

Le pouvoir ne pense qu’au profit potentiel que représentent les Gyao, ignorant les conséquences. Ils pourraient servir la science et l’armement militaire. Aveuglés par leur avidité, les dirigeants rejettent la faute sur d’autres. Gamera n’est pas l’ennemi, mais le reflet des erreurs passées. Il incarne un péché originel qui menace de se reproduire tant que le Japon refuse de faire face à la vérité. Ce n’est que lorsque tout semble perdu que les autorités se tournent vers lui, non par conviction, mais par désespoir. Le gouvernement pose un poids énorme sur sa jeunesse qui doit prendre en charge le combat, il est démissionnaire.

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Un retour réussi

Ce retour en force rend à Gamera son aura mythologique, après des années passées à amuser les enfants. L’équipe plante avec intelligence les graines d’une trilogie qui s’annonce assez dépressive. Ce premier film traite du déni et de l’autodestruction, le suivant, L’Attaque de légion, poursuivra sur cette lancée en plongeant un peu plus en eaux sombres.


TEST DU BLU-RAY/DVD


Le film est présenté dans un coffret, édité avec soin par Roboto Film, regroupant la trilogie. La copie proposée est très belle. Les longs métrages sont accompagnés d'entretien avec l'équipe du film et

Les plus :

Très belle copie
Présence d'une version Française de qualité
Entretien avec l'équipe du film

Les moins :

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Article rédigé par Faye Fanel

Ses films préférés - Chantons sous la pluie, The Thing, La maison du diable, Evil Dead 2, Fire walk with me... Ses auteurs préférés - JRR Tolkien, Stephen King, Amélie Nothomb, Lovecraft, Agatha Christie... J’adore le cinéma d’horreur et parler de mes nombreuses passions dans mes podcasts sur James & Faye ainsi que sur le site Les Réfracteurs.