Un texte signé Sophie Schweitzer

Italie - 1971 - Duccio Tessari
Titres alternatifs : Cran d'arrêt
Interprètes : Helmut Berger, Evelyn Stewart, Giancarlo Sbragia


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retrospective

Le Papillon aux ailes ensanglantées – Giallo crépusculaire

LE PAPILLON AUX AILES ENSANGLANTÉES est un film policier italien appartenant au genre nommé giallo d’après la couleur jaune des couvertures des livres policiers. Il est réalisé en 1971 par Duccio Tessari. Ce dernier a débuté sa carrière en réalisant quelques péplums (LES DERNIERS JOURS DE POMPEI, LES TITANS), mais également et surtout des westerns spaghetti (À PISTOL FOR RINGO, MORT OU VIF, DE PRÉFÉRENCE MORT). LE PAPILLON AUX AILES ENSANGLANTÉES est l’une de ses rares incursions dans le genre du policier à l’italienne. Pour autant, c’est une incursion qu’on pourrait qualifier de réussie.

Une étudiante française est retrouvée assassinée dans un parc. Plusieurs témoins voient un homme s’échapper du parc. Très vite les soupçons se portent sur l’une des connaissances de la victime, un présentateur télé. Ce dernier n’ayant pas d’alibi et ayant laissé ses empreintes digitales sur l’arme du crime est condamné durant le procès malgré les efforts de son avocat pour l’en sortir. Mais alors que sa famille tente d’accepter la situation, un second corps est découvert dans le parc, tué de manière très similaire. La police commence alors à se poser des questions, le présentateur télé est-il bien l’assassin de la jeune Françoise ?

Papillon aux ailes ensanglantées 03

Du giallo, LE PAPILLON AUX AILES ENSANGLANTÉES a l’ADN. Il coche pas mal de cases du genre : tueur au couteau, ganté et avec un chapeau, de jeunes personnages féminins victimes d’une violence graphique, des scènes de course-poursuite dans une ville à l’architecture envoûtante et labyrinthique. Mais là où il rompt avec le genre c’est dans la manière dont il suit l’enquête, en mettant l’accent sur le sérieux de celle-ci, en accordant de nombreuses séquences et de plans à la police scientifiques scientifique, mais aussi sur le procès auquel on assiste dans ses grands instants. En somme, c’est tout autant un giallo qu’un film de procès, qu’un policier se voulant crédible, mais également un thriller psychologique qui va s’attarder sur les troubles psychiques et traumatismes de ses personnages.

Éléments qu’on trouve dans les films de Dario Argento qui semble être une des inspirations du film, notamment avec l’omniprésence symbolique d’un animal, ici un papillon. Le lien avec le giallo s’inscrit aussi dans le casting. Ida Galli qui incarne une femme au foyer désoeuvrée, avait tourné avec Lucio Fulci dans L’EMMURÉE VIVANTE ou encore Silvano Tranquilli abonné au genre (DANSE MACABRE, LA TARENTULE AU VENTRE NOIR). Enfin, il y a également ce milieu dépeint : des personnages bourgeois qui s’enfoncent dans le vice, thématique qu’on retrouve souvent dans les films de Lucio Fulci, et surtout, de Mario Bava, qui n’est nul autre que le père fondateur du giallo (genre qu’il a lancé avec LA FILLE QUI EN SAVAIT TROP et SIX FEMMES POUR L’ASSASSIN). Enfin, il y a la présence de la ville. Ici c’est Bergame qui est très bien mise en scène, notamment ses petites ruelles où les personnages se perdent et s’échappent. Il y a bien évidemment le parc, les ruelles pavées à l’ancienne, la présence de fresques religieuses, de nombreuses œuvres d’art classiques qui croisent la modernité de l’architecture d’une partie basse de la ville et enfin un immeuble abandonné où déroule la fin du film, autant de lieux emblématiques du giallo.

Le Papillon aux ailes ensanglantées 02

Mais LE PAPILLON AUX AILES ENSANGLANTÉES est aussi lié au cinéma italien plus classique, notamment celui de Visconti avec qui avait travaillé Helmut Berger, star du film dont le nom apparait en premier dans le générique d’ouverture. Il campe un jeune noble en perdition et tourmenté. Mais aussi par la présence de Carole André, la première victime, qui a joué dans MORT À VENISE et Ida Galli qui a tourné dans LE GUÉPARD et la DOLCE VITA de Fellini. Eux aussi ont mis en scène des personnages bourgeois décadents en soulignant le passé artistique de l’Italie. Ce dernier est sublimé dans LE PAPILLON AUX AILES ENSANGLANTÉES. Mais le film s’attarde sur la concupiscence et le manque de morale de cette classe sociale qui s’imagine au-dessus des lois. Le jugement du film envers ses personnages est d’ailleurs sans appel.

Chacun de ces hommes est rempli de vice et profondément mauvais, même les femmes, celles matures, sont au mieux des complices. Seules les jeunes filles sont d’innocentes victimes, dont l’innocence tranche plus encore, par effet de contraste. De par son intrigue, et son besoin de distiller le doute chez le spectateur, le film va s’évertuer à nous montrer les vices de chacun de ses suspects. L’étrangeté étant que cela donne un jeu de piste ludique pour le spectateur qui peut s’amuser à dénombrer les indices et décider qui est le coupable selon lui, comme dans un whodunit. Ce genre de policier où l’auteur offre à son lecteur ou spectateur une série d’indices sur une série de suspects, généralement suivie à la fin d’un twist surprenant. Indubitablement, LE PAPILLON AUX AILES ENSANGLANTÉES s’inscrit également dans ce genre. Mais le fait avec un sérieux parfois dérangeant.

Le Papillon aux ailes ensanglantées 01

En effet, il y a dans ce film les prémices du film de tueur en série qui s’est épanoui à Hollywood. On y retrouve l’obsession macabre, le caractère torturé des personnages, la manière clinique d’observer leurs errements, l’accent mis sur la psychologie, enfin le suivi de l’enquête et la mise en avant de l’aspect scientifique de celle-ci. Autant d’éléments qu’on retrouvera plus tard dans le cinéma de David Fincher ou encore de Michael Mann dans MANHUNTER.

Enfin, il convient de souligner que la photo du film assurée par Carlo Carlini qui, aidé par le Technicolor a rendu les couleurs vraiment palpables et puissantes, notamment le rouge du sang presque vibrant, mais également le rouge des joues des personnes, l’éclat de leurs regards ou encore l’aspect décadent des lieux parfois rococos. Une photo mise en valeur dans la restauration du film qu’on retrouve dans sa version Blu-ray éditée par Le chat qui fume.

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Article rédigé par : Sophie Schweitzer

Ses films préférés : Le bon, La brute et le Truand, Suspiria, Mulholland Drive, Les yeux sans visage, L'au-delà - Ses auteurs préférés - Oscar Wilde, Sheridan LeFanu, Richard Mattheson, Stephen King et Poppy Z Brite

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