Torso
Un mystérieux maniaque sexuel provoque un vent de panique parmi les étudiantes de l’université de Pérouse. Quatre d’entre elles décident de quitter la ville, où elles se sentent en danger, pour se réfugier dans une villa retirée à la campagne. Mais le tueur en série ne va pas tarder à retrouver leur trace.
TORSO est un giallo particulièrement sordide qui a marqué les esprits avec son tueur cagoulé découpant ses victimes à la scie à métaux. Il règne dans ce thriller une tension extrême qui ne connaît presque aucun relâchement. Depuis les premiers meurtres, puis lors de la mémorable poursuite dans la forêt enveloppée par le brouillard, jusqu’au huis clos étouffant dans la villa isolée flanquée en haut d’une falaise.
Des cinq gialli tournés par Martino – STRANGE VICE OF MRS WARDH, YOUR VICE IS A CLOSED ROOM AND ONLY I HAVE THE KEY, CASE OF THE SCORPION’S TAIL, ALL THE COLOURS OF THE DARK et TORSO, seul ce dernier ne voit pas figurer Edwige Fenech ou George Hilton (les vedettes attitrées de Martino) au générique. On peut considérer comme d’une grande habileté ce souci du metteur en scène de mettre sur le devant de la scène des acteurs moins familiers. En effet, cela permet d’accentuer le malaise chez le spectateur qui n’a aucune certitude quant au sort réservé au moindre personnage (et pas seulement pour les actrices incarnant les étudiantes de l’université). Ce choix de casting est donc particulièrement efficace et malin de la part de Sergio Martino. On y trouve notamment Luc Merenda, qui apparaît pour la première fois dans un film de Sergio Martino et qui jouera par la suite dans bon nombre de ses polars ainsi que dans ceux de Fernando Di Leo. On y retrouve aussi Suzy Kendall, trois ans après L’OISEAU AU PLUMAGE DE CRISTAL de Dario Argento et un an avant SPASMO d’Umberto Lenzi.
Incontestablement, TORSO est un film malsain habilement structuré, notamment grâce au travail du scénariste, Ernesto Gastaldi, un habitué du genre qui a régulièrement travaillé avec Martino. Gastaldi sait faire monter la pression crescendo, nous montrant comment le climat de suspicion qui s’insinue en chacun des protagonistes va conduire à l’exil des quatre étudiantes. Même les seconds rôles sont particulièrement bien travaillés. La plupart d’entre eux présentent (comme dans un roman d’Agatha Christie) un profil de suspect idéal, depuis l’étudiant complexé jusqu’au marchand de foulards obsédé sexuel.
En plus de posséder un scénario très subtil, TORSO bénéficie également d’une image superbe. Cela est dû au talent de Giancarlo Ferrando, déjà responsable de la photographie sur CASE OF THE SCORPION’S TAIL. Le travail de Ferrando est remarquable, notamment dans les nombreuses scènes nocturnes : forêt marécageuse rendue menaçante par les nappes de brouillard, silhouette du tueur se découpant dans la brume, atmosphère étouffante dans les ruelles du village… La nuit semble être la complice du tueur.
Accompagnant les images, la musique composée par Guido et Maurizio De Angelis est en parfaite adéquation avec le déroulement de l’action. Enfin, on peut souligner un équilibre idéal dans la structure narrative, la première moitié du film se situant à Pérouse, la seconde dans la villa et ses alentours.
Lors de sa sortie, TORSO n’a pas eu le succès escompté en Italie car il a eu la malchance d’être distribué dans les salles en même temps que LE DERNIER TANGO A PARIS de Bertolucci. Par contre il connut un énorme succès au box-office américain. Ce n’est guère étonnant si l’on songe que ce film, à l’instar de LA BAIE SANGLANTE de Mario Bava, a anticipé la vague de slashers qui déferlera aux Etats-Unis durant les années 80.
Car au delà des mécanismes propres au giallo, TORSO possède un côté gore qui était très inhabituel à l’époque.
Pour finir sur une anecdote, le film devait s’appeler à l’origine « I CORPI NON PRESENTANO TRACCE DI VIOLENZA CARNALE ». Mais dans un souci d’attirer un public plus nombreux, les producteurs décidèrent de retirer le « non ». On ne peut pas dire que cela ait permis de retenir plus facilement le titre.