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Les Colons (2024) – Western crépusculaire

Un texte signé Sophie Schweitzer

Nationalité
Chili, Royaume-Unis, Argentine, France, Allemagne, Suède, Taïwan
Année de production

2023
Réalisation

Felipe Gálvez
Interprètes

Mark Stanley, Camilo Arancibia

Les Colons, premier long métrage de Felipe Gálvez, retrace l’histoire sanglante du Chili.

En 1893, José Menéndez, un riche propriétaire terrien chilien, demande à son homme de main, MacLennan, un ancien soldat britannique, de tracer un chemin jusqu’à l’océan à travers les terres que lui a accordées le gouverneur. Il part accompagné de Segundo, un jeune métis, et de Bill, un « chasseur d’Indiens » originaire du Texas. Les trois hommes s’adonneront à une véritable boucherie en chemin et croiseront de curieux personnages qui céderont, eux aussi, à la barbarie en ces terres où de nouvelles nations se bâtissent.

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La naissance d’une nation

Felipe Gálvez propose avec Les Colons de jeter un regard assez dur sur l’histoire du Chili et en particulier de comment les autochtones ont été traités par les colons blancs. Pour raconter cette histoire, il se place du point de vue de Segundo, un jeune métis, dont on ignore le passé, mais avec qui on va découvrir les exactions des colons blancs, souvent d’anciens soldats de l’empire britannique, sur les populations autochtones, mais également envers eux-mêmes. C’est un passé ensanglanté que nous dépeint le réalisateur chilien.

Il s’agit du premier long métrage de Felipe Gálvez qui auparavant a réalisé trois courts métrages. Et ce premier long est maîtrisé, comme en témoignent les nombreux prix qu’il a reçus : à Cannes, celui de la critique internationale, mais aussi celui de Lima pour le meilleur scénario et meilleur film.

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Un premier film réussi

Tout d’abord par son image soignée de Simone D’Arcangelo qui donne à ce film tourné en numérique une image proche de la pellicule. D’une part avec ses couleurs contrastées et saturées, mais aussi avec l’utilisation de filtres qui ajoutent un peu de flou aux bords du cadre ou encore distordent les couleurs. Les plans sur le paysage ou encore les intérieurs bourgeois sont d’une rare beauté et donnent au film une véritable atmosphère envoûtante.

La musique, tantôt un chant magnifique, tantôt une atmosphère qui s’accorde aux images violentes qui émaillent le long métrage, est composée par Harry Allouche, un compositeur français qui a été primé. À cela s’ajoute le travail du son opéré par Tu Duu-chih et Tu Tse-kang qui tantôt étouffe les sons, tantôt les amplifie comme pour souligner les émotions éprouvées par les personnages. Notamment dans une scène particulièrement difficile de viol qui n’est pas sans évoquer le bouleversant Outrage de Brian de Palma.

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Des choix particuliers et audacieux

Les Colons épouse plusieurs genres. Tout d’abord, le western avec l’histoire de ces trois hommes que tout sépare : l’un est Écossais, un autre est Américain et le troisième est métissé, ne se sentant à sa place ni auprès des blancs ni auprès des autochtones. Ensuite, le film épouse le format du thriller, lorsque les tensions naissent au sein du groupe, mais aussi, au gré de leurs rencontres. Par moment, on vient même toucher du bout du doigt l’horreur. Avant de basculer dans le film politique dans une fin qui s’écoule des années après la première partie. Cette fin peut s’avérer frustrante, car elle n’offre pas toutes les réponses, laissant le spectateur faire le lien et aboutir à ses propres conclusions.

On notera également les choix d’écriture, notamment avec les dialogues. En effet, le film est très silencieux au début. On y suit Segundo qui parle peu et des hommes blancs qui laissent plus parler leurs poings que leurs lèvres. Segundo est tantôt témoin, tantôt complice, à son corps défendant. Comme l’est le spectateur. C’est un choix volontaire du réalisateur qui cherche à chatouiller le spectateur. Or à la fin, un nouveau personnage apparait, très bavard, puisque politicien, il modifie grâce à son apparition le film dans son format, mais aussi dans le son.

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Un tournage à risque

Selon le réalisateur, le tournage a été difficile, car la Terre de Feu est une terre aride aux températures froides et au climat complexe, mais également parce que ces terres appartiennent toujours à la famille Menéndez. Mais le choix de tourner sur les lieux du massacre rejoint la volonté du réalisateur d’adopter une approche quasi-documentaire, avec une mise en scène minimaliste qui n’est pas sans rappeler celle de Robert Eggers sur The Witch ou encore celle de Pablo Larraín sur El Club.


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Article rédigé par Sophie Schweitzer

Ses films préférés - Le bon, La brute et le Truand, Suspiria, Mulholland Drive, Les yeux sans visage, L'au-delà - Ses auteurs préférés - Oscar Wilde, Sheridan LeFanu, Richard Mattheson, Stephen King et Poppy Z Brite