Un texte signé André Quintaine

USA - 2006 - Eric Nicholas
Interprètes : Colin Hanks, Ana Claudia Talancón, Jordana Spiro, Jonathon Trent

review

Alone With Her

Doug est amoureux de Amy, mais Doug ne sait pas comment aborder la jolie hispanique.
C’est un féru d’informatique, un peu voyeur sur les bords et un petit malin. Doug entre par effraction dans l’appartement d’Amy pour y installer des caméras vidéo à des endroits stratégiques, afin d’épier les réactions de la jeune fille à chacune de ses tentatives de séduction. Malgré ce stratagème, il ne sera pas facile pour Doug de séduire la jeune fille… En effet, Doug, un peu pataud, n’a pas le charisme du beau Matt que convoite Amy.
Sujet à controverse dans les années 90, la vidéo surveillance est aujourd’hui acceptée, voire même souhaitée parait-il, par une majorité de citoyens se disant honnêtes, convaincus qu’ils n’ont rien à se reprocher, et qui sont effrayés par la violence qui secoue chaque jour le monde.
Mais la nécessité d’avoir recours à ce nouvel outil sécuritaire ne cache-t-il pas autre chose ?
A travers son ALONE WITH HER, Eric Nicholas dresse le portrait d’une société composée d’individus incapables de communiquer ensemble et qui s’arrêtent aux apparences.
Si l’Amour, c’est s’intéresser avec passion à quelqu’un, il est indiscutable que Doug aime Amy. Il prend des risques inimaginables pour s’approcher d’elle, la voir, la connaître et la séduire. Car Doug est malheureusement obligé de passer par de tels excès pour attirer son attention. En effet, Amy est intéressée par Matt, un petit jeune qui, avec ses cheveux mi-longs, son côté féminin surdéveloppé et ses airs de jeune vierge effarouchée, est doté d’un physique qui correspond à 100% à celui qui est à la mode actuellement. Heureusement, Matt va ouvrir les yeux d’Amy. Après avoir déposer un produit irritant dans le lit d’Amy, celle-ci se voit « défigurée » par des boutons disgracieux… Il n’en faudra pas plus à Matt pour prendre ses jambes à son cou… Petite scène qui souligne encore, si c’était nécessaire, la superficialité qui règne de nos jours.
L’absence de communication s’allie à la superficialité et annihile la volonté de connaître l’autre. Ces caméras que l’on installe aux quatre coins des rues attestent de la peur de l’autre. On craint ce qu’on ne connaît pas. Dans une société qui ne cherche plus à connaître son voisin, on vit dans la peur, la peur de l’autre, d’où le besoin de se sentir protégé, ne serait-ce que par des caméras. Doug, quant à lui, détourne leur utilisation première pour les employer d’une manière plus louable, par amour. Il apparaît ainsi comme le véritable héros de ALONE WITH HER, un héros tragique car incompris.
Il n’empêche qu’Eric Nicholas parvient à faire en sorte que le spectateur s’identifie à son anti-héro. Même si sa manière de pratiquer n’est pas très recommandable, on finit par espérer qu’il parvienne à séduire la belle.
ALONE WITH HER est une petite bombe qui rappelle LE PROJET BLAIR WITCH. Tout comme le film de Daniel Myrick et d’Eduardo Sanchez, ALONE WITH HER a été entièrement réalisé en vidéo avec originalité : tout ici est montré depuis les images prises par les caméras de surveillance de Doug.
On oublie très vite ce qui pourrait être assimiler à un handicap car le découpage s’avère finalement très naturel. Autre piège évité par Eric Nicholas : celui du graveleux ou de l’humour puéril lié au voyeurisme dont est victime Amy. Après que les caméras aient été installées, Eric Nicholas expédie en deux ou trois secondes le grattage de nez, le passage aux toilettes et la scène de masturbation pour se recentrer sur l’essentiel, c’est-à-dire les relations à sens unique que vont entretenir Doug et Amy.
Espérons que Eric Nicholas pourra transcender le statut d’ovni cinématographique qui collera assurément à la peau de son film, à l’inverse de Daniel Myrick et Eduardo Sanchez justement, car son métrage fait montre de beaucoup de maturité et d’intelligence. Suffisamment pour que l’on ait envie de le voir développer d’autres thématiques.


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- Article rédigé par : André Quintaine

- Ses films préférés : Frayeurs, Les Griffes de la Nuit, Made in Britain, Massacre à la Tronçonneuse, Freaks

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