Un texte signé Philippe Wiedmer

Chili - 1999 - Jorge Olguin
Titres alternatifs : Black Angel
Interprètes : Alvaro Morales, Andrea Freund, Blanca Lewin, Juan Pablo Bastidas, Fernando Gallardo, Arturo Ruiz-Tagle, Patricia Pardo, Alvaro Espinoza, Claudio Rodriguez

retrospective

Angel Negro

Santiago du Chili, centre ville, une équipe de joyeux lurons tous issus de la trop bonne société chilienne s’embarque dans une virée des plus classiques pour des étudiants fraîchement diplômés. Grosses voitures, belles filles courte vêtues et garçons en smoking, alcool et excès d’un soir : le modèle américain n’est pas loin. BLACK ANGEL débute dans une ambiance festive rapportée par de très captivantes images prises sur le vif. Plongé au cœur du sujet grâce à la caméra d’un des fêtards, rien ne nous échappe. Pas même les moqueries incessantes dont est victime Gabriel si maladroitement amoureux d’une des filles du groupe. La fin de soirée se termine au bord de la mer, histoire de vomir les restes de cette nuit les cheveux emportés par un vent violent. La mort accidentelle de la fiancée restée à l’écart de la bande viendra donner une tournure macabre à cette fête délurée. Cette courte et convaincante introduction servira de base aux aventures de Gabriel. Devenu médecin légiste, il ne s’est jamais remis de la mort de sa bien-aimée. Dix ans plus tard, il évolue dans le monde sordide des salles froides où viennent reposer des cadavres. La routine va prendre une tournure bien différente le jour où Gabriel reconnaîtra Rafael Alvarez, un de ces anciens amis sur la table d’autopsie. Alors que la solitude rendait sa vie morne et repoussante, le fantôme des tragédies passées vient donner un coup de pouce maléfique à sa souffrance. Les morts vont s’additionner, les spectres ressurgir. Entre enquête policière plus que calmement menée par un commissaire débonnaire dépassé par les événements et apparitions inquiétantes, Gabriel a de la peine à comprendre de qui lui arrive. Aidé par une police toute en mollesse et Carolina, une ancienne amie, il tente de remettre de l’ordre dans sa vie. Même plein de bonne volonté, les seconds rôles s’enlisent dans un jeu mécanique peu folichon et ne rendent qu’un très faible écho à sa détresse. D’autres personnes qu’il a connues disparaissent encore, un étrange tueur au masque blanc fait son apparition. Il lui semble même entendre parler de l’Ange de la mort. Entraîné dans ce récit de vengeance, c’est par très souvent par l’intermédiaire d’images tirées d’une petite caméra de voyage que sont relatés les moments cruciaux. Qu’elles soient vues en direct ou visionnées lors d’un interrogatoire, elles apportent un plus très efficace à l’ambiance de cette entreprise tout de même pauvre en moyens. Pathétique au possible, Gabriel s’inscrit parfaitement dans ce décor cheap servi par une réalisation des plus simples. Le choix est le bon et la simplicité est ressentie comme un dépouillement bénéfique. La misère affective et amoureuse de Gabriel n’en sera que plus marquée. Les fonds sonores, discrets mais permanents riffs de guitare, si souvent balourds par leur inutilité, accompagnent plus qu’ils ne meublent. Un concert bien senti dans sa veine rock énergique vient même participer à une rencontre du couple maudit. A nouveau, la musique est de la partie et se fait apprécier sans voler la vedette.
Bouclée sur le bord de mer, l’histoire de Gabriel se terminera là où elle a si mal débuté. Le pathétique laisse alors place au grotesque. Le destin en finit avec ce pauvre gars que la réussite de ses études n’aura pas empêché de passer à côté d’une vie un tant soi peu attirante. Des cadavres de son boulot à ceux de ses amis qui reviennent le hanter, son chemin de croix s’achève dans le vent humide des côtes chiliennes. Un film cohérent, froid et morne comme la vie de son misérable héros.


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- Article rédigé par : Philippe Wiedmer

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