Un texte signé André Quintaine

USA - 2007 - Daniel Myrick
Interprètes : Johnny Messner, Jon Huertas, Daniel Benzali, Erik Passoja, Saige Ryan Campbell

review

Believers

Les films politiquement incorrects ne sont franchement pas légion, à moins que l’on ne se contente des simplistes messages anti-américains qui sont devenus monnaie courante. Alors, lorsqu’un film comme BELIEVERS se paie le luxe d’attaquer par surprise le politiquement correct sur un tout autre terrain, on ne peut qu’applaudir des deux mains !
Victor et David sont deux ambulanciers. Ils doivent intervenir dans un endroit perdu à l’extérieur de la ville, en plein désert. Alors qu’ils sont en train de constater la mort par arrêt cardiaque de la jeune femme qu’ils tentaient de sauver, des hommes en pick-up font irruption et emmènent la victime et les deux hommes avec eux.
Victor et David sont conduits dans un complexe souterrain où ils sont manifestement fait prisonniers. Ils devinent rapidement que leurs hôtes forment une secte dont les membres sont en train de préparer un voyage à l’opposé de l’univers. La civilisation humaine sur Terre est sur le point de s’achever et ils sont les élus qui assureront la survie de l’Humanité. David et Victor comprennent également qu’ils sont les témoins indésirables de la survie d’une poignée d’êtres humains et leurs hôtes ne leur laissent pas de choix. Soit ils acceptent de se joindre à eux lors du suicide de masse, soit ils mourront comme le reste de l’humanité. Alors qu’ils cherchent une manière de s’évader, ils reçoivent la visite de la fameuse femme qu’ils avaient tenté de réanimer en vain, bien vivante !
Durant 90 minutes, BELIEVERS nous plonge corps et âme dans une secte dont les membres ont décidés, pour leur salut, de se donner la mort, mort synonyme de renaissance pour eux. Tout le monde n’est pas complètement convaincu par ce qui est une certitude pour la majorité. Une jeune femme secourue par les ambulanciers et sa fille émettent d’ailleurs de grands doutes quant au bien fondé de l’entreprise. Un sentiment d’incertitude qu’on retrouve également chez Victor et David. Le premier a été élevé dans la catholicisme mais s’en est détourné ; le second est un athée 100% pur jus. Ces trois perspectives apportent une vraie profondeur au propos de Daniel Myrick qui n’est pas, comme on pourrait le penser de prime abord à la vision du film, de donner raison à la secte.
BELIEVERS nous amène à nous interroger sur nos convictions religieuses et sur l’intransigeance que nous pouvons parfois, et même souvent, témoigner envers tout ce qui ne pense pas comme ce qui a été établi.
Si l’objet de Daniel Myrick n’est pas d’encenser ces sectes annonciatrices de la fin du monde, il est en tout cas de nous amener à mettre en doute nos convictions. Pourquoi vénérer un Dieu qui laisse faire tant d’injustices, pourquoi une doctrine inventée par un auteur de romans de SF serait elle plus crédibles qu’une autre, etc.
Plus encore, il nous propose de nous interroger sur notre capacité à concevoir des opinions différentes de celles que nous avons pris pour acquises. A ce titre, BELIEVERS est assurément un grand film sur l’acceptation de l’autre et des ses convictions, mais aussi sur la remise en cause de ce que nous pensons être vrai.
Plus prosaïquement, le film de Daniel Myrick est également une leçon pour les réalisateurs de série B à budget très modeste. Bien que se déroulant également dans un endroit clos, le scénario justifie pleinement ce choix et vaut bien mieux que tout ces médiocres slashers peu inventifs que sont les quatre SAW et ses encore plus pâles copies. L’interprétation, quant à elle, est également tout à fait bonne. Daniel Myrick a su s’entourer de comédiens solides. S’ils ne sont pas très connus, ils bénéficient tous d’une bonne expérience acquises dans des séries pour la télévision (Johnny Messner qui incarne David a également été précédemment le héros de ANACONDAS 2).
Pour son troisième film après THE BLAIR WITCH PROJECT et THE STRAND, Daniel Myrick surprend de nouveau avec un parti pris qui lui fait honneur. De nouveau, il démontre qu’il est tout à fait à l’aise dans les productions à petit budget. Peut-être tenons-nous là un vrai auteur, ancré dans la série B de genre, comme il y en avait tant il y a encore quelques décennies.


Votre soif de lecture n'est pas rassasiée ?
Téléchargez les anciens numéros de Sueurs Froides


Inscrivez-vous à la liste de diffusion et accédez au
téléchargement des anciens numéros de Sueurs Froides :
- Une tranche d'histoire du fanzinat français
- 36 numéros de 1994 à 2010
- Près de 1800 films critiqués
Un index est disponible pour chercher un film ou un dossier
CLIQUEZ ICI.

- Article rédigé par : André Quintaine

- Ses films préférés : Frayeurs, Les Griffes de la Nuit, Made in Britain, Massacre à la Tronçonneuse, Freaks

Share via
Copy link