Un texte signé André Quintaine

Brèves

Extrême Cinéma 2015

Effronté, désinvolte, taquin mais surtout imprévisible, le festival Extrême Cinéma organisé par la Cinémathèque de Toulouse trace en toute décontraction de nouvelles et inattendues perspectives cinéphiles. Tout en contraste et dissonance, cette 17e édition sera donc on ne peut plus fidèle à sa réputation. À commencer par la soirée d’ouverture qui proposera comme à l’accoutumé un ciné-concert aussi inattendu qu’étourdissant. Car le Messy Mess Orchestra, pas moins de douze musiciens, a décidé d’en découdre avec le très expérimental et très macabre Begotten (E. Elias Merhige, 1991) qui ne conte rien de moins que la naissance du Monde. Ce sera ensuite au tour du metteur en scène Yves Boisset de prendre la relève. Cinéaste contestataire, le bonhomme malmène avec un regard acéré pouvoirs et idéologies en place. Que ce soit au travers d’une chronique de la lâcheté (Dupont La Joie, 1974), d’une violente satire des médias (Le Prix du danger, 1983) ou bien du polar rural sans concessions (Canicule, 1984), le cinéaste déploie un cinéma frondeur et séditieux dont il est temps de rappeler l’importance. Certains ne manqueront pas de s’étonner de la visite de l’actrice Marthe Keller. Et pourtant si la comédienne connut la gloire avec La Demoiselle d’Avignon (1972), série télé très populaire dans les années 1960, ce ne sera que pour mieux mettre à genoux Hollywood avec notamment l’ébouriffant Black Sunday (John Frankenheimer, 1977), thriller d’anticipation prophétisant les attentats du 11 septembre 2001, ou encore le désormais culte Marathon Man (John Schlesinger, 1976), polar aussi sombre qu’haletant. Trois Hot d’or et trois Feminist Porn Awards ne sauraient résumer la remuante carrière d’Ovidie qui se fractionne entre ses activités d’actrice de films pornographiques, de réalisatrice, de documentariste, d’écrivain, de journaliste et de productrice. Histoire de saisir au vol cette personnalité hors norme, Extrême Cinéma lui dédie toute une soirée partagée entre carte blanche (Une éducation norvégienne, Jens Lien, 2012) et récente réalisation classée X (Le Baiser, 2014). Dans un tout autre style, l’écrivain et conférencier Sébastien Gayraud, auteur de Joe D’Amato, le réalisateur fantôme (Édition Artus, 2015), viendra nous parler de sa passion dévorante pour cet incontrôlable trublion du cinéma italien, immortel auteur d’Anthropophagous (1980) dont l’affiche précise qu’il est L’Homme qui se mange lui-même. On vous aura prévenu. Enfin, l’indispensable Jean-François Rauger, directeur de la programmation de la Cinémathèque française et grand prêtre du Cinéma Bis, exhumera quelques improbables pépites issues des collections de la vénérable institution. Entre-temps, en élève assidus, vous en apprendrez plus sur le cinéma turc et ses invraisemblables relectures de Tarzan, le changement de sexe, la musique industrielle, les dangers de l’industrialisation galopante et les dérives poétiques de Charles Bukowski. Maturité, sagesse, force de l’âge ? Allez savoir. Toujours est-il que cette année le festival consacrera une séance à destination des juniors qui se régaleront des exploits de Jack le tueur de géants (Nathan Juran, 1962). Une séance on ne peut plus spéciale puisqu’elle se poursuivra par une boum dans la grande tradition animée par l’association Gudule & Galipette. De quoi créer de futures vocations. Quant à la compétition internationale de courts métrages, son grand prix sera décerné par un jury étudiant lors de la traditionnelle nuit de clôture le 7 novembre. Un prélude à pas moins de dix heures de projection composées de films longs, de films courts, de bandes-annonces et de surprises soniques. De quoi clôturer de saine manière un festin où se seront mêlés films de genre, classiques, et expérimentations dingotes. En attendant : entrez, festoyez et surtout éprouvez.

AGENDA
Lundi 2 novembre : Clutchorama
Mardi 3 novembre : ciné-concert d’ouverture – Begotten accompagné par le Messy Mess Orchestra
Mercredi 4 novembre : Yves Boisset
Jeudi 5 novembre : Ovidie
Vendredi 6 novembre : Marthe Keller / Jean-François Rauger
Samedi 7 novembre : Marthe Keller / Jean-François Rauger + Nuit de clôture


- Article rédigé par : André Quintaine

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