Un texte signé Éric Peretti

Turquie - 1952 - Aydin Arakon
Titres alternatifs : Red Plume - Genghis Khan, The Red Banner - Genghis Khan
Interprètes : Turan Seyfioglu, Atif Kaptan, Mesiha Yelda, Cahit Irgat, Rauf Ulukut, Nebile Teker, Mücap Ofluoglu, Nubar Terziyan

retrospective

Kizil Tug – Cengiz Han

Il est indéniable que la mondialisation a facilité l’accès, pour les cinéphiles, aux films du monde entier, permettant ainsi la (re)découverte d’œuvres rares ou oubliées, voire totalement inédites. Ainsi, pour la plus grande joie des amateurs d’un cinéma sortant des sentiers battus, sont régulièrement éditées de nouvelles galettes numériques contenant de quoi étancher leur soif de singularité, même si quelquefois la publicité autour du produit est quelque peu exagérée.
KIZIL TUG – CENGIZ HAN est vendu comme le péplum qui a anticipé la production italienne du genre, le film précurseur. Mais daté de 1952, il arrive un an après MESSALINA de Carmine Gallone et la même année que SPARTACUS de Riccardo Freda.
Le scénario narre l’histoire d’Otsukarci, valeureux et fier aventurier solitaire turc. Au détour d’un chemin, il croise la route de trois guerriers qui vont être pris dans une embuscade. Ne pouvant rester passif, il intervient pour sauver la vie de l’un d’entre eux qui allait être lâchement assassiné. Ce dernier n’est autre que Genghis Khan qui, pour remercier son sauveur, lui propose de venir grossir les rangs de son armée. Mais Otsukarci, farouchement indépendant, décline l’offre qui lui est faite, préférant poursuivre ses pérégrinations à travers le pays. Khan lui demande alors une faveur : rendre visite au seigneur Seyhul Gebel et lui rappeler d’honorer sa promesse financière…
L’action de la plupart des péplums se passe dans un contexte spatio-temporel bien défini, à savoir la période de l’antiquité que ce soit en Grèce, à Rome ou en Egypte, voire dans un imaginaire mythologique. Mais ici, les faits se déroulent dans ce qui sera plus tard la Turquie et la présence de Genghis Khan permet de dater l’action aux alentours de 1200, même s’il ne faut chercher aucune référence historique crédible dans ce film d’aventure. Pas vraiment un péplum à nos yeux, KIZIL TUG ressemble en effet plus à un film de cape et d’épée, à la fois dans sa forme et dans son fond.
Si le point départ de l’intrigue est assez simpliste, le reste de l’histoire devient rapidement assez surréaliste et difficile à suivre, bien qu’elle ne se passe que dans un seul lieu pour un long moment. Dès son arrivée au château, Otsukarci est confondu avec Halit, le fils du seigneur Gebel, dont il est le parfait sosie. Plus intéressé par la musique et la poésie que l’art de la guerre, Halit a été enfermé par son père et va devoir prouver sa valeur de combattant devant les vassaux lors d’une joute. Bien évidemment Otsukarci, qui a entre temps charmé la belle Sabiha, fille de Gebel, va remplacer le fils indigne et tenter de duper tout le monde….
Faux semblants, romance et bagarres sont donc au menu de cette aventure bondissante mais totalement inintéressante. Les seules scènes de combats, bien que rythmées et dynamiques, ne parviennent pas à sauver l’ensemble et l’ennui se fait rapidement sentir, d’autant plus que le récit est mené tambour battant, ne laissant pas le temps aux spectateurs de comprendre ce qu’il s’y passe vraiment. D’invraisemblances en improbabilités se tisse une fine trame scénaristique qui tente de justifier les événements. Et lorsqu’arrive le dénouement, sans qu’on l’ait vu venir d’ailleurs, et que se prépare une grande bataille entre clans, avec des centaines de figurants, on se dit qu’on va enfin assister à un spectacle épique. Hélas, la déception est à la mesure de l’attente. Après de beaux plans larges sur les armées qui se chargent mutuellement et une série de gros plans gore bien cadrés pour montrer la violence des combats, soit environ deux minutes pour le tout, le film se termine aussi chaotiquement qu’il s’est déroulé, non sans avoir énoncer une morale sirupeuse à souhait.
Débarrassé de son statut historique de précurseur du péplum européen, KIZIL TUG – CENGIZ HAN perd son intérêt et ne reste plus qu’un film d’aventure exotique daté, comme il en existe des centaines, une curiosité qui, sitôt visionnée, ne risquera guère d’encombrer les étagères mémorielles des amateurs de cinéma turc, mais plutôt celles des collectionneurs de films rares.


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- Article rédigé par : Éric Peretti

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