Un texte signé Jérôme Pottier

Belgique, Italie, France - 1971 - Jean Brismée
Titres alternatifs : The Devil's Nightmare
Interprètes : Erika blanc, Jean Servais, Ivana Novak, Shirley Corrigan, Lucien Raimbourg, Daniel Emilfork

Offscreen 2016retrospective

La Plus Longue Nuit du Diable

C’est en 1971 que Jean Brismée signe son seul long métrage : LA PLUS LONGUE NUIT DU DIABLE. Tout auréolé du Prix Spécial du Jury obtenu à Cannes en 1965 pour le court MONSIEUR PLATEAU, le metteur en scène Belge, parallèlement à son travail de documentariste, envisage de réaliser sa première œuvre pour le cinématographe. C’est avec quelques soutiens de poids, tel André Hunebelle (auteur de la série des FANTOMAS avec Jean Marais entre 1964 et 1967) qui assure ici une supervision technique (?), qu’il y parvient. Cette bobine est ainsi accueillie avec enthousiasme lors de la première édition du Festival du Film Fantastique de Paris en 1972.

A Berlin, en 1945, lors de la chute du régime nazi, la Baronne Von Rhoneberg meurt en donnant naissance à un enfant. Son époux, Général de son état, met fin aux jours de sa progéniture. Vingt-cinq ans plus tard, un minibus qui contient sept passagers est contraint de passer la nuit dans la demeure des Von Rhoneberg…
Il n’en faut pas plus pour donner naissance à un film d’exploitation parmi les plus sympathiques tourné cette année là. Cette coproduction franco italo belge sans ambition particulière nous conte une classique histoire de maison hantée mise en scène avec soin et interprétée par la crème du Bis de l’époque.
Jean Servais (1910-1976), acteur Belge au regard impénétrable signe ici l’une de ses dernières prestations. On peut l’apercevoir, la même année, dans l’étrange film de Jean-François Davy, LE SEUIL DU VIDE. Il était aussi, l’année précédente, le narrateur de PEAU D’ÂNE de Jacques Demy, il a marqué de nombreux spectateurs avec son interprétation d’Alejandro Gual dans le classique de Luis Buñuel : LA FIEVRE MONTE A EL PAO (1959). La gironde brunette Ivana Novak forme un couple des plus charmant aux côtés de la blonde vénitienne Shirley Corrigan. La généreuse Ivana fit don de ses attributs à quelques bandes érotiques et termina sa carrière en apothéose avec deux polars italiens de haute tenue : SOS JAGUAR : OPERATION CASSEURS d’Umberto Lenzi (1976) et EQUIPE SPECIALE de Domenico Paolella (1977). Shirley Corrigan joue ici pour la première fois au cinéma, elle tourne la même année, sous la direction de Ferdinando Baldi, dans le frappadingue BLINDMAN LE JUSTICIER AVEUGLE. Elle croisera également, tout comme la partenaire de ses délicieuses joutes saphiques, la route d’Umberto Lenzi avec le polar BRACELETS DE SANG (1975). Lucien Raimbourg, véritable légende du cinéma hexagonal qui passa sa vie à faire le second couteau dans quasiment une centaine de productions (de Verneuil à Franju en passant par Prévert), complète cette distribution dans laquelle brillent deux étoiles du cinéma de genre : Daniel Emilfork et Erika Blanc.
Daniel Emilfork est ici un Satan énigmatique. Cet acteur Chilien jouit, grâce à son faciès des plus singuliers, d’un véritable culte auprès de nombreux cinéphiles, et cela malgré le fait qu’il fut sous employé par un grand nombre de réalisateurs. C’est onze ans avant sa mort que Jean-Pierre Jeunet lui offre enfin un rôle à la hauteur de son talent dans le poétique LA CITE DES ENFANTS PERDUS. Erika Blanc, vedette féminine de cette LONGUE NUIT DU DIABLE, est une vénéneuse succube dans les bras de laquelle nous tomberions volontiers ! Cette beauté rousse transalpine continue aujourd’hui de tourner pour la télévision Italienne. Peu avare de ses charmes elle dévoila ses atouts dans des pelloches ritales bien azimutées telle que L’APPEL DE LA CHAIR d’Emilio Miraglia (1971). Elle est la vedette féminine du chef d’œuvre de Mario Bava OPERATION PEUR (1966).
Cette brochette d’interprètes sert avec brio cette bande gentiment érotique aux accents gothiques. La réalisation est sans génie mais appliquée (bien que le rythme soit peu soutenu), elle utilise avec talent les magnifiques décors naturels du Château d’Antoing (près de Tournai). La série de meurtres perpétrée par notre succube s’avère parfois d’une belle richesse plastique, à l’image de cette victime avalée par des sables mouvants dorés à l’or fin. D’autres scènes plus travaillées suscite l’intérêt telle celle qui voit Jean Servais jouer l’alchimiste dans son laboratoire. La musique lancinante d’Alessandro Alessandroni fait merveille et rend indispensable la vision de cette petite série B pleine de charme.


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- Article rédigé par : Jérôme Pottier

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